J'aurais aimé pouvoir dire que j'ai aimé ce livre mais ce n'est malheureusement pas le cas. Michèle(@paroles), conseillée par son libraire pyrénéen, en disait le plus grand bien; il a eu en 2022 le 41e prix littéraire de la ville de Caen (prix largement supérieur à tous les autres); enfin
Lilia Hassaine était une chroniqueuse espiègle de Quotidien !
Donc tout, absolument tout pour plaire.
Mais ça n'a pas fonctionné, je suis vraiment désolé.
Il faut dire qu'écrire une mini-histoire de l'immigration algérienne en 180 pages relève d'une énorme gageure.
L'autrice tisse une trame narrative à partir des années soixante : Naja, native des Aurès, rejoint son mari Saïd avec ses trois filles. Saïd a beaucoup changé, piégé dans l'alcool et la violence. Ouvrier spécialisé dans l'automobile ( la bagnole c'est important si on veut comprendre les violences urbaines d'aujourd'hui), il quitte son logement insalubre pour vivre avec sa famille l'âge d'or des cités HLM de la banlieue parisienne.
Naja est de nouveau enceinte.
À partir de là
Lilia Hassaine accélère, ralentit, digresse un peu et nous raconte l'histoire de l'intégration de cette famille dans la France des années 60 jusqu'à la fin des années 80 (en gros, on le devine, jusqu'à sa propre naissance).
Deux aspects du roman n'ont pas fonctionné pour moi :
Lilia raconte la vie de plusieurs communautés, évoque le chômage, l'arrivée de la drogue et du SiDa, la transformation progressive des cités HLM communautaires en banlieue désertée par la classe moyenne, leur détérioration, l'absence des pères, l'installation du racisme ordinaire etc. Bref on pourrait en faire 3 ou 4 livres mais tout cela est survolé. Et maillé avec certains destins individuels. Elle tricote alors avec les secrets de famille, les déchéances et les abandons successifs, une sorte d'histoire de la résilience de la deuxième génération. C'est triste, drôle, attendrissant, c'est beaucoup, beaucoup de choses en même temps. Trop.
Le style m'a déplu, je ne m'y suis pas fait. On démarre sur des accents rimbaldiens ( Toute lune est atroce et tout
soleil amer) , embraie sur une littéraire populaire classique mais bien foutue ( c'est ce que j'ai le plus aimé) puis on rajoute des aphorismes à la flamboyance hugolienne, enfin tout cela oscille entre le glauque et le grandiloquent. Heureusement , dans le fond on ne peut qu'adhérer au propos : « les enfants d'immigrés portent en eux l'exil et l'ancrage.
On les a perfusés à la mélancolie »
En fait j'aurais adoré 5 tomes genre L'amie Prodigieuse sur le même thème, avec le même tempo et le même style.
Je ne suis pas si difficile.