Cet album de Tintin fait fait partie de la "bibliothèque idéale de Télérama", dans laquelle cent écrivains français dévoilent leurs livres préférés ; c'est en effet
Pierre Assouline qui le place dans sa liste.
C'est donc avec curiosité que je me suis replongée dans cet épisode, qui en revanche est bien loin d'être mon favori, peut-être parce que je ne l'ai pas lu enfant ?
Ce qui saute à mes yeux d'adulte, donc, c'est la métamorphose de la série dans cet album.
Du point de vue de la trame, la mue avait déjà commencé avec l'opus précédent, les cigares du pharaon, qui prenait un tour aventureux. Mais ici le scénario s'avère bien plus construit, et annonce la couleur pour la longue lignée d'albums à venir, comme le prophétise M. Wang : "Adieu, cher Tintin, et que dans ton pays d'occident, d'autres amitiés recueillent le souffle de la longue course que tu vas entreprendre. "
Avec cet album
Hergé franchit également un cap en collant à l'actualité. Il dénonce en effet le traffic d'opium, la présence occidentale en Chine et le racisme qui l'accompagne (tentative de se racheter après le très polémique Tintin au Congo...?) et met en avant les tensions avec le Japon. Cette critique à peine dissimulée de l'actualité apparaîtra dans de nombreuses aventures par la suite.
C'est la première fois aussi que l'on retrouve des personnages récurrents, en dehors du fidèle Milou, et les Dupont et Dupond font déjà partie des prottagonistes "cultes", en attendant l'apparition de Haddock et Tournesol. Heureusement qu'ils sont là d'ailleurs pour assurer la part comique de cette histoire !
On rencontre Tchang, l'ami fidèle, le frère que Tintin tentera de sauver au Tibet. La dernière page où ils se font leurs adieux est très émouvante et renvoie sans doute à l'histoire personnelle d'
Hergé.
On retrouve aussi Rastapopoulos, méchant récurrent, même si force est de constater que dans cet album il est inexistant. La vedette lui est volée par Mitsuhirato, méchant XXL qui finit tragiquement. La présence de ces gredins permet de mettre en valeur la droiture de notre héros et sa détermination à aider les gens, que ce soit un tireur de pousse-pousse ou son hôte et ami Monsieur Wang.
Bref, un album marquant dans la série car il jette les bases des valeurs de Tintin : aventure, actualité politique, comique de répétition, honnêteté et bonté.
Pour finir, un détail m'a marquée : la réplique de Didi, le fou malheureux, "je vais vous couper la tête", participe grandement à la personnalité de l'album... mais n'aurait-il pas été plus simple de ne pas confier un sabre à quelqu'un ayant perdu la raison...?
;-)