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Critique de LoupAlunettes


"Le magicien des morts" est une autre histoire, différente du "livre noir des secrets" mais l'action se passe à Urbs Umida, la ville même d'où s'est échappé notre jeune Ludlow du premier livre.

L'endroit même où les rues sont très nettement moins sûres qu'à Pagus Parvus, ville du Nord plus aisée de l'autre côté de la rivière où Ludlow aura la chance de rencontrer son employeur au livre mystérieux.

C'est dans cette "cour des miracles" populaire, Urbs Umida, que Ludlow grandit dans la crasse, le vol, la tromperie et la honte.

Higgins est très amateur des atmosphères lugubres, étranges, aux allures grossièrement comiques. Comme ses personnages, d'ailleurs, souvent gratifiés ici de physiques ingrats,de logiques boiteuses et doués de roublardise imaginative.

Mais il s'y passe toujours des événements insolites dans ses pays et on y rencontre aussi des hommes aux histoires et destins étonnants. Comme le jeune Pin, comme l'intrigant magicien des morts.



Tristement ironiquement, le nouveau héros de cette deuxième histoire, est né en revanche du côté du Nord du fleuve et va inversement atterrir par disgrâce à Urbs Umida.

Son nom est Crispin "Pin" Carpue.

Le destin aura séparé Pin de ses parents assez tôt et il traînera comme un boulet de forçat une triste histoire que tout le monde maintiendra comme un des sujets principaux de Urbs Umida.

Ce n'est pas l'histoire des Orphelins Baudelaire de Lemony Snicket, c'est bien pire.

Le père de Pin est accusé d'avoir tué son frère, nous ne connaissons pas la vérité au moment où il disparaît pour ne pas être arrêté, il est plus tard baptisé par le journal de la ville "l'Assassin à la pomme d'argent".



Pour subsister et oublier, Pin se trouve un petit travail d'assistant dans les pompes funèbres de l'aimable Goddfrey Gaufridus (il y a plus réjouissant mais à Urbs Umida, on peut trouver bien pire).

Les descriptions de l'auteur n'épargneront pas Gaufridus dans l'ingratitude physique non plus mais il sera un bon maître pour Pin. Ses rituels et techniques de boutique pour déterminer la totale mortalité d'un défunt sous trois jours fait presque sourire.



F.E Higgins est une auteure à la démarche peu commune.

F.E. Higgins commence de nouveau, comme avec "Le livre noir des secrets", son aventure avec un petit préambule où elle se fait personnage voyageur de son propre univers, collecteur d'histoires, conteur donc pour être précis au final, d'histoires frissons qu'elle aura entendu et dont elle aura recueilli des éléments personnels et aura coeur à nous restituer l'histoire.

Nous pourrions entendre "Jeunes lecteurs, je vais vous conter ce qu'il m'est arrivé".

L'histoire dans l'histoire.



F.E. Higgins raconte en préambule avoir retrouvé le journal de Pin et quelques articles de journaux d'un autre personnage important, le chroniqueur journaliste Déodonatus Snoad, celui-là même qui surnomma le père Carpue de son nom de criminel et entretint sa réputation.

Les deux documents permettent astucieusement à l'auteur d'entrer dans une démarche d'enquêteur, recollant pour nous les pièces d'un puzzle qu'il assemble petit à petit.

Il varie aussi le genre du récit en alternant journal, article et narration extérieure.



Les pages de journaux intimes et les articles vont aider à faire le jour sur l'affaire du meurtre de l'oncle certe, mais ils vont aussi raconter l'histoire de la ville de Urbs Umida, décrire sa cupidité, sa jolie bêtise et sa médiocrité sur le ton de l'humour noir, puis surtout, établir le portrait du fameux magicien des morts, un "artiste" de la gargote du "Doigt Agile"qui réveille les morts et permet aux proches, les vivants, de s'entretenir avec eux un court instant.

Qui est Bénédicte Pantagus? Pourquoi l'auteur en fait-il le personnage titre?



Comme avec le maître Joe Zabbidou du "livre noir des secrets", le mystère reste entier sur la nature intrigante de Bénédict, mais cette fois, le doute se pose un peu plus quant à sa vraie capacité à faire des choses extraordinaires.

Bénédicte Pantagus est-il un véritable magicien ou un arnaqueur doué? Pour être honnête, le personnage est un prétexte pour introduire le personnage de la nièce qui ne laisse pas Pin indifférent et semble occuper un rôle très important dans ces séances de réveil de défunts.

Avec cette jolie nièce Juno, experte en herbes de toutes sortes, nous flairons d'un côté le subterfuge pour se faire un peu d'argent avec une arnaque aussi rodée que celle d'autres personnages mais aussi la véritable bienveillance, en permettant aux vivants les derniers adieux de vive voix.

Bénédict Pantagus ne pourrait-il pas interroger le cadavre de l'oncle de Pin afin de connaitre le nom de son meurtrier?



Les cadavres vont en tout cas se multiplier depuis et Pin va se trouver ému de peut-être revoir enfin son père mais aussi éprouver l'inquiétude de confirmer son rôle d'assassin si il est encore là.


On nous présente dans le récit un nombre certain d'énergumènes qui nous divertissent tout du long et passerait pour des phénomènes de foire, dont l'autre clou du spectacle de la gargote du "Doigt Agile", le terrible Monstre goulu ou le poète nain Beag Hickory, lanceur de patates ou encore l'élégant Aluph Buncombe, liseur de "bonne aventure" crânien.

Les chapitres nous présente tour à tour la galerie de personnage de l'histoire, à la valeur presque égale, à la bizarrerie presque aussi égale (Pin a un odorat exceptionnel et c'est presque un supplice de travailler à la morgue ou de vivre près d'un fleuve qui draine les odeurs de macchabées. L'auteur insiste sur les odeurs, elles auront grande importance pour l'intrigue du livre.

Y a t-il un assassin parmi l'un d'eux?

L'auteure creusera l'idée du crime d'une façon fine, propre évidement mais aussi philosophique, la résolution de l'histoire confirmera la chose, entre couperet sec et douce émotion amère.


Bien que l'on puisse lire les histoires du "Livre noir des secrets" et "Le magicien des morts" de façon dissociée, F.E Higgins place astucieusement des passerelles avec des personnages familiers du Livre Noir dans ce titre-ci et fait de nombreuses allusions à des révélations précieuses qui pourraient nous éclairer encore d'avantage. Très astucieux. Bien que la préférence ira au "Livre noir des secrets", pourquoi se priver de lire les deux?


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