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Critique de Dixie39


«  Même pas mort » ! Dans la bouche d'un Bellovèse, c'est toute la hargne et le défi lancé avec moult morgue à la tête de tous ceux qui n'attendaient que cela !
Dans celle d'un Ambigat qui l'enterrait déjà, c'est la rage, la haine et la colère face à l'invraisemblance de cette survivance dont les dieux ne peuvent être innocents !

L'épopée à laquelle nous convie Jean-Philippe Jaworski est celle de Bellovèse, fils du roi Sacrovèse, dépossédé de l'héritage du trône qui lui revenait de droit par son oncle, Ambigat. C'est au cours d'une célèbre bataille, dont l'issue fut fatale pour Sacrovèse, qu'Ambigat a pris le pouvoir en laissant les fils et la femme de celui-ci, dans une vie, si ce n'est de misère, tout au moins sans aucune mesure avec celle sensée être réservée aux personnes de sang royal. Ces jeunes neveux grandissant, Ambigat les envoie à la guerre pour s'en débarrasser vite et bien. Seulement c'était compter sans le bon vouloir du destin, qui refuse à Bellovèse, blessé à l'agonie, l'entrée du monde des morts.
Tout cela, nous l'apprenons de la bouche de Bellovèse, qui, craignant qu'il ne reste plus rien des aventures de sa vie, une fois la mort venue, entreprend d'en faire le récit à un aventurier, marchand de son métier, qu'il reçoit pour quelques nuits, durant lesquelles va se dévider le fil de sa mémoire...

En effet, comment celui qui a survécu d'entre les morts, est revenu de l'île des vieilles, pourrait-il accepter de tomber dans l'oubli ? Car c'est sans doute cela, qui va sceller le destin de Bellovèse, comme une renaissance, pas forcément de bonne augure, car qu'est-il celui qui porte en lui une part du royaume des morts ? Crainte et défiance plus que confiance et respect.

Ouvrir les « Rois du monde », c'est ouvrir grand les portes du monde Celte, de ses croyances, de ses mythes et de ses codes où l'offense et le déshonneur sont pires que la mort...
Jean-Philippe Jaworski nous embarque avec lui comme un colporteur de mots et d'histoires qui nous prend par la main sur ces champs de bataille, sur les sentiers de ces forêts oniriques où rêve et réalité ne font qu'un, où tout imprévu est un signe des dieux, toute vision incertaine une prémonition qui doivent être suivis et réalisés. Si vous avez déjà été happé par la faconde et le charme d'éloquence d'un conteur, lui au centre, vous accroché à sa voix, les oreilles et les sens en émoi, vous serez conquis par « Même pas mort » et son auteur.

Que dire de plus qui a déjà été dit : la beauté du style de cet écrivain, son érudition qu'il sait nous faire partager sans être pédant (c'est une qualité qui tend tellement à se faire rare que cela serait dommage de ne pas le noter) et cette facilité qu'il a à nous faire accepter sans broncher cette prose truffée de mots de vocabulaire propre à cette époque (en matière d'armement, d'habillement, ...) qui coule et fanfaronne comme une évidence. Je ne vous cache pas que j'ai sorti le dictionnaire et me suis constituée un petit lexique : J'aime les mots et leurs sens, j'en ai découvert ici plus d'un, noms propres ou mots communs, aux sonorités qui donnent un charme fou au récit et façonnent d'autant mieux cet univers de mythes et de légendes qui s'ouvre à nous.

Seul petit bémol, l'auteur a bien failli me perdre un moment : Vers les trois quart du livre, j'ai senti les prémisses d'une lassitude, tout juste reprise à temps par une accélération du récit qui vous revient en pleine face comme un boomerang dont la course nous paraît lente, perdu à l'horizon, mais qui, au final, nous surprend par un retour à l'envoyeur, net et précis !

Quand le rythme de la lecture correspond au rythme du récit, c'est pour moi le signe des grands conteurs ; Alliez à cela un style impeccable et une imagination féconde vous obtenez du grand Jaworski !
D'ailleurs, « C'est loin d'être fini, en fait cela vient de commencer »
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