Comment être sûr d'un Blanc qui se glisse dans les terres que le Grand Esprit nous a données au commencement du monde ? Un peuple si différent, venu d'ailleurs, avec une pensée linéaire si loin de la nôtre. Une civilisation qui ne veut que nous dominer. Des colonisateurs qui ne voient le monde que par en avant, capables de tout détruire sur leur route pour l'idolâtrie du gain. Eux qui ne savent pas se retourner et regarder derrière eux pour s'instruire à la sagesse des Anciens.
Je n'aime pas le temps. On dit tellement souvent qu'on voudrait revenir en arrière pour corriger nos erreurs, mais même lorsqu'on marche à reculons le temps continue d'avancer. Ce que je sais du temps, c'est qu'il se fait toujours mesquin et qu'il nous vole nos vies.
J'écoute la forêt. Elle est silencieuse, la nuit, à cette période de l'année. Sans doute ne suis-je pas la seule à attendre avec impatience le printemps.
Ça se peut... trop aimer ? C'est possible d'éprouver tellement de bonheur en pensant à une personne qu'on ne peut envisager la vie sans elle ?
Parfois, je me demande si c'est bien. Celui qui ne possède rien ne craint personne. Mais celui qui cache un trésor craint de le perdre.
Je crois qu'il y a plus grand que cette vie, et si j'ai tort, si tout ce qui existe est perceptible, au moins toute ma vie durant j'aurai eu l'espoir.
Ce qui était important pour le moment, c'était de ne pas laisser la peur prendre le dessus. Les nouvelles rapportaient toujours les disparitions en forêt et leurs dramatiques conséquences. La peur en forêt paralyse ou fait faire des gestes dangereux.
Dans une harangue qui traite de la fragilité de la vie et du refus de la mort, je dis à l'homme qui porte des gants que jamais la nation wendate ne disparaîtra du dos de la Grande Tortue.
Et si j'osais couper ma connexion, serai-je enfin libéré?
A force de vivre chez les Québécois, au milieu d'eux, j'ai toujours eu du mal à me rapprocher de mes semblables. A force d'avoir grandi dedans, de connaître seulement les codes de cette société-là, j'observe de loin ceux qui sont en moi et ceux de qui je suis.
J'ai brûlé toutes les lettres de mon prénom.
Devenons nos désirs au lieu de les quérir comme un braconnier.