Mysterium conjunctionis 01

[…] à l’intérieur même des limites de l’expérience psychologique, l’inconscient collectif prend la place du royaume platonicien des idées éternelles.

Mais quelle valeur peut avoir l’amour aux yeux d’un homme d’aujourd’hui possédé par la faim de dominer ? C’est pourquoi nous trouvons toujours deux causes principales de catastrophes psychiques : d’une part l’amour déçu et d’autre part l’ambition contrariée.

[…] les couples d’opposés transcendent la conscience. Ils n’appartiennent pas à la personnalité gouvernée par l’ego, mais ils la dominent.

L’objet de son art [au médecin] est toujours un individu et il est convaincu que rien n’a été fait si l’on n’est pas venu en aide à l’individu. Il est responsable devant l’individu d’abord et seulement ensuite devant la société. Si donc il préfère, de toute nécessité, la thérapeutique individuelle à une méthode collective, cela correspond à l’expérience selon laquelle l’influence exercée sous une forme sociale ou collective conduit d’ordinaire à l’ivresse des masses et que seule l’action d’homme à homme permet de réaliser une transformation véritable.

Le problème psychopathologique de l’inceste est la forme erronée sous laquelle la nature traite le problème de l’union des opposés qui n’est pas encore devenu conscient comme tâche psychique ou, s’il l’a été un moment, a de nouveau disparu du champ de vision.

Les facteurs qui se combinent dans la « conjonction » sont conçus comme des contraires qui, ou bien s’affrontent d’une manière hostile, ou bien s’attirent avec amour.

De même que l’astre du jour surgit de la mer nocturne, la conscience se lève de l’inconscient au double point de vue ontogénétique et phylogénétique, et chaque nuit plonge de nouveau dans cette condition naturelle primitive. Ce caractère double de l’existence psychique est un modèle et une représentation primordiale du symbolisme du soleil et de la lune.

C’est avec le christianisme que les opposés « métaphysiques » ont commencé pour la première fois à pénétrer dans la conscience de l’homme, et cela sous la forme d’une confrontation confinant au dualisme qui atteignit son plus haut degré dans le manichéisme. Cette hérésie contraignit l’Eglise à accomplir un pas considérable en formulant la doctrine de la privatio boni, grâce à laquelle elle établit l’identité du « bien » et de l’ « être ». Le mal en tant que non-être fut mis à la charge de l’homme […].

Il est difficile d’imaginer une description plus excellente de l’archétype féminin caractérisant l’inconscient de l’homme, l’image de l’anima, que la figure de l’incertissima amasia (la très vague bien-aimée) ici décrite comme immortelle, figure qui, à la manière d’un esprit malicieux, poursuit l’homme dans le calme des forêts et des sources.

Ainsi que l’indiquent à eux seuls le nom que s’est donné l’art spagirique ou la devise souvent répétée : « Solve et coagula » (dissous et coagule), l’alchimiste voit l’essentiel de son art dans la séparation et la dissolution d’une part, la réunion et la coagulation d’autre part. Il est tout d’abord en présence d’un état initial dans lequel les tendances et les forces opposées sont en lutte les unes avec les autres, et doit ensuite affronter le grand problème d’un processus capable de ramener à l’unité les éléments et les qualités séparées et ennemis. Dans cette affaire, l’état initial ou « chaos » n’était pas fourni d’emblée, mais il fallait le découvrir en recherchant la materia prima.