La gauche a le mensonge honteux, embarrassé, emberlificoté.
Le centre l'a mielleux, un peu flasque, détaché de lui même.
Sarkozy a le mensonge brut de décoffrage. on pourrait dire qu'il est franc du mensonge comme on dit de quelqu'un qu'il est franc du collier.
Ce qui n'est pas sans évoquer cette histoire : de saintes religieuses décidèrent de faciliter la réhabilitation de prostituées en leur fournissant argent, couvert et petits travaux dans une annexe de leur couvent. Mais la charge devenant trop lourde, on dut peu à peu leur permettre d'arrondir leurs fins de mois. Jusqu'au jour où l'on s'avisa qu'on avait reconstitué un bordel au sein du monastère.
Sauf que la République n'est pas le nom d'un music-hall géant, ni celui d'un sanglant champ clos à quoi se réduirait la démocratie. Or, l'assimilation de la politique à la guerre, qui fait du mensonge le carburant de sa machinerie, exclut presque par définition que la vérité puisse y trouver le moindre espace pour y verser la moindre goutte.
À l'instant où ces lignes sont écrites, l'Europe et l'euro sont sauvés pour la huitième fois en deux ans. Alléluia ! Gloire à notre grand démiurge national qui gagne tous les quinze jours une victoire de la Marne.
A tirer le tapis à soi, on finit par se prendre les pieds dedans. Et celui qui s'approprie tout finit par ne plus être exonéré de rien.
Le discours, écrit ou parlé, ne porte plus alors un constat, une idée, une opinion, un raisonnement, une analyse, il devient une arme et simplement une arme. Au point qu'on peut, sous l'appellation d'"éléments de langage", en distribuer d'avance la partition. Et transformer des personnes humaines en caniches dont même les aboiements sont préenregistrés.
Quand j'étais enfant, je ne comprenais pas pourquoi il y avait des pauvres, puisqu'il suffisait d'aller à la banque pour y retrer de l'argent.
On nous a fait prendre, non seulement des vessies pourdes lanternes, au risque de se brûler, mais la régression pour la réforme, l'archaïsme pour la modernité, le recul pour l'offensive, des glands pour des truffes et de la piquette pour du château-margaux.
La Sarkozie décomplexée ment. La gauche complexée déconne. Ici, on transforme le réel en son contraire. Et là, on le refaçonne aux normes de ses apriorismes.