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Citations sur Journal d'un timonier et autres récits (13)

« Beaucoup se passe, à bord, comme si Kavvadias y reprenait à son compte la phrase de Paul Valéry : « Qui se confesse ment, et fuit le véritable vrai, lequel est nul, ou informe et, en général, indistinct. » Et, autant que pour distraire la monotonie des traversées au long cours, c’est pour l’occulter ou en différer le dévoilement que chacun des membres de la tribu ambulante des gens de mer y va de sa version, de ses amulettes et de ses contrepoisons. Ce qui, dans le creuset, demeure pour chacun de son pot au noir intime est forcément consumé, racorni, à saisir précautionneusement s’il ne veut pas le voir se pulvériser entre les doigts. »
(Gilles Ortlieb, postface)
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Vous laissiez la fumée envelopper votre visage et vous êtes restée un instant, les yeux mi-clos, concentrée sur une vision... Peut-être les volutes dessinaient-elles le contour de visages, de visages aimés qui ont compté pour vous naguère.
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Tout homme doit garder en lui un désir inassouvi. Tout homme doit garder quelque chose qui continue à le hanter...
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Ceux qui aiment la mer avec passion, cela a été prouvé, ne peuvent jamais en faire leur métier. Et quand ils y parviennent, ils cessent de l’aimer. Vous avez entendu parler de ces marins qui vivent la plupart du temps sur les docks, dans les ports. Ils regardent les bateaux partir et servent d’interprètes aux navigateurs étrangers. Ce sont eux, les incurables ! Ils ont été soutier, matelot, steward, charbonnier, mais ne sont jamais restés plus d’un mois au même poste et sur le même bateau. Jamais ils n’ont pu s’habituer à la mer.
Elle leur donne le vertige. Ils trébuchent là où d’autres avancent droit, ils se coincent les doigts dans les portes, ils n’arrivent pas à tenir la barre alors qu’ils connaissent autant la boussole que les bons marins. Ils tombent malades et quittent le bateau en pleurant. On voit dans leurs yeux quelque chose d’étrange. Et sur leur visage défait, une expression un peu folle.
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Rester à la passerelle douze heures sur vingt-quatre, quinze, vingt ou trente jours d’affilée, devant la roue en bois entièrement chevillée du gouvernail, donner un léger coup de barre tantôt à bâbord, tantôt à tribord, sans quitter le compas des yeux, en essayant de garder le cap sans relâche. Le jour, tout va bien, on voit le ciel, la mer, on entend parler quelqu’un de temps à autre, mais la nuit !… J’ai pris mon quart depuis deux heures à peine et je tombe désespérément de sommeil. Mon coéquipier dort assis à côté de moi, il se réveille chaque fois qu’il perd l’équilibre et se rendort aussitôt… C’est l’heure à laquelle, chez moi, nous nous préparions à dormir. Ma mère avait replié son journal et pour la centième fois peut-être, ma sœur allait terminer en pleurant le Journal de Marie Bashkirtseff. Installé à ma place habituelle, je fermerais Les Voyages imaginaires de Maître Jules ou le Robinson Crusoé de Hambourg. Et maintenant !… Maintenant, me voilà dans une cabine fermée, flanqué d’un coéquipier avec qui je n’ai rien en commun hormis la fatigue, sur un bateau chargé de charbon qui fend les eaux de l’océan Indien en direction du Tonkin, et je suis mort de sommeil. Le commandant de bord arpente le pont en faisant claquer ses bottes de cuir pour essayer de se dégourdir les jambes.
Je me souviens de mon premier embarquement sur un grand paquebot. Au moment précis où se réalisait le plus beau de mes rêves, j’étais rongé par le doute et la peur. Je me souviens de ce « mal du départ » tragi-comique qui m’a longtemps tourmenté. Puis l’arrivée dans des ports pleins de gaîté sur la Méditerranée. Marseille, Naples, Barcelone, les bars avec leurs filles fardées, les départs fréquents, l’embarquement des passagères, les adieux, les larmes, les sanglots étouffés et les mouchoirs qu’on agitait, tout cela m’avait tellement envoûté que mes doutes et ma peur avaient complètement disparu.
Puis sur des cargos tout noirs, comme en deuil. Je ne connais pas de départ plus sinistre, et la vie à bord est lugubre. Le silence qui y règne est un réel supplice.
On ne parle jamais très fort sur les cargos. Les postes de proue sont toujours sombres, saturés d’odeurs lourdes, ils ressemblent à de grandes cellules de prison.
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Quand je suis arrivé à Naples, j'ai longtemps gardé la dégaine d'un type paumé pour qui le bonheur se bornait à pouvoir se laver à l'eau douce et manger avec une fourchette et un couteau. J'avais l'air d'un homme rongé depuis des années par une étrange maladie et qui récupère très lentement, jour après jour...
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Je ne suis pas descendu du bateau à Port-Saïd. Je suis resté des heures à regarder le bout du canal, du côté de la mer Rouge, m'imaginant des ports avec mes yeux aveuglés par le soleil. Et lorsque, à la tombée de la nuit, j'ai entendu qu'on levait l'ancre, j'ai eu l'impression d'être le modeste héros du conte qui reste des heures devant la porte ouverte d'un jardin enchanté, en se contentant de respirer le parfum enivrant des fleurs et en écoutant gazouiller des oiseaux invisibles, sans pouvoir pénétrer dans le jardin, parce qu'on l'a attaché. Et quand le bateau est reparti, je suis resté à l'arrière, près du loch, en regardant clignoter l'oeil énorme du phare, submergé par un chagrin semblable à celui qu'on éprouve quand on laisse passer une occasion de s'enfuir...

Février 1932
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Parfois je me dis que tout est mort au fond de moi et que mon coeur est devenu aussi sec que la paume de mes mains...
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Ceux qui aiment la mer avec passion, cela a été prouvé, ne peuvent jamais en faire leur métier. Et quand ils y parviennent, ils cessent de l'aimer.
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Lorsque nous sommes arrivés à proximité du cap Sainte-Marie de Madagascar, la chaleur est peu à peu devenue insupportable. Nous travaillions torse nu, sous de larges chapeaux de paille. L'eau à boire et pour se laver était bouillante ; à l'époque, les bateaux n'avaient pas encore d'installations frigorifiques. Les conserves gonflaient comme si elles cherchaient à sortir de leurs boîtes en fer-blanc, la gorge et les yeux nous piquaient de manière atroce et déprimante.
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