Citations sur Calpurnia (74)
Je levai les yeux vers bon-papa.
- Je suppose que tu viens de voir tes premières créatures microscopiques, remarqua-t-il en souriant. Platon dit que toute science commence par l'étonnement.
- Mon Dieu ! dis-je en appliquant de nouveau mon oeil à l'oculaire. Une chose garnie d'un tas de poils minuscules passa à toute vitesse. Puis une autre ondoya, avec sa queue en forme de fouet ; une sphère roulait et culbutait, barbelée comme une massue du Moyen Âge. Des ombres délicates, vaporeuses, fantomatiques, voletaient, entrant dans le champ, puis en sortant. C'était chaotique, c'était sauvage, c'était... ce que j'avais vu de plus étonnant de toute ma vie.
A Fentress, les familles de religion méthodiste étaient divisées entre celles qui ouvraient les cadeaux la veille de Noël et celles qui les ouvraient le jour même. Heureusement, nous étions du côté de celles qui les auraient la veille. Selon notre pasteur, Mr Cornelius Barker, les cadeaux n'étaient qu'un divertissement païen, dénué de sens et coûteux. Oui, eh bien, essayez donc d'expliquer ça à sept enfants ! Ma mère n'y était pas parvenue, ni même le révérend Barker, qui d'ailleurs, il faut le reconnaître, n'avait pas insisté outre mesure.
Pourquoi les filles doivent-elles être jolies ? Dans la nature, ce sont pourtant les mâles qui font des efforts. Comme les colibris par exemple.
Eh bien, parce que dans la nature, c'est la femelle qui choisit. Le mâle arbore des plus belles couleurs pour attirer son attention.
Et puis il y avait mon grand-père, qui, de sa voix basse de baryton, ajoutait une douce et triste harmonie à la musique, sa longue barbe luisant à la lueur du feu. Nous aurions pu si facilement passer à côté l'un de l'autre sans nous voir. C'était lui qui m'avait apporté le plus, finalement, c'était lui qui avait été mon plus beau cadeau. (p. 411)
Je passai mon bras sous le sien. Bon-papa était tellement plus grand que moi que nous nous heurtâmes en descendant les marches, et que je laissai retomber mon bras, préférant glisser ma main dans la sienne. Sa paume était rugueuse et ridée, ses ongles épais et arrondis, un ensemble miraculeux de cuir et de corne. Mon grand-père eut l'air interloqué, puis ravi, je crois, bien que je n'aie pu en être tout à fait sûre. En tout cas, sa main se referma sur la mienne. (p. 39)
J'avais tellement de choses à faire depuis ce jour particulier où, flottant sur la rivière et regardant le ciel, j'avais été frappée par la foudre de la connaissance, comprenant soudain ce qu'il en était de mes sauterelles et - en réalité - du monde lui-même ! Le temps de remonter sur la rive, je m'étais transformée en exploratrice, et la première chose que j'avais découverte, c'était qu'un autre membre de mon étrange espèce vivait à l'autre bout du couloir. Il y avait un trésor vivant sous notre toit, et aucun de mes frères ne s'en apercevait.
Après tout, ce n'était qu'un livre. Ca n'avait vraiment aucune importance. Un jour, j'aurais tous les livres du monde, j'en aurais des étagères et des étagères. Je vivrais dans une tour de livres. Je lirais toute la journée en mangeant des pêches. Et si jamais de jeunes chevaliers en armure osaient venir m'appeler sur leur destrier blanc, me suppliant de défaire ma longue chevelure, je les bombarderais de noyaux de pêche jusqu'à ce qu'ils rentrent chez eux.
Je pris le sandwich et "De Grandes Espérances", puis me laissai tomber sur mon lit avec le sentiment que c'était le comble de la volupté.
Aaah ! Lit, livres, chaton, sandwich !
Que désirer de plus dans la vie ?
Un jour, j'aurais tous les livres du monde, j'en aurais des étagères et de étagères.
Je vivrais dans une tour de livres.
Je lirais toute la journée en mangeant des pêches.
Je me tins résolument devant la fenêtre, dégageai les épaules en posture militaire, inspirai profondément et ouvris les rideaux.
C'était là : une couverture parfaite, toute blanche, s'étendait sur l'allée, les arbres, la route, aussi loin que portait ma vue. Tout est immaculé, intact, immobile. LA NEIGE. Ce devait être la neige.