Le talentueux David
Khara s'empare du mythe du vampire pour nous en donner une vision différente, plus contemporaine, sans jamais remettre en cause la mythologie initiale mais en lui donnant une cohérence statutaire et une modernité tangible.
La condition de vampire décrite ici est à la fois fascinante et solitaire. Car à quoi sert-il de vivre éternellement si c'est pour vivre seul et ne rien partager ?
C'est la question que finit par se poser Werner von Lowinsky, vampire de son état, reclus depuis plus d'un siècle. Il se met donc en quête d'une âme-soeur. Mais les vampires ne courent pas les rues et c'est avec un humain qu'il va se lier d'affection : Barry Donovan. Un flic désabusé, meurtri par la vie, qui ne vit plus que par et pour son boulot.
Werner et Barry.
Deux belles âmes qui se font écho à travers les siècles et résonnent dans le présent. Une magnifique histoire d'amitié à la lisière de l'amour tant l'intensité est grande et immédiate entre eux.
Barry et Werner partagent des souffrances communes. Des déchirures qui les ont profondément marqués tous les deux. Des pertes et des trous dans leur psyché. Deux êtres fragiles finalement mais en pleine reconstruction et qui vont se "nourrir" l'un de l'autre.
Mixant 2 époques atroces et lourdes de sens dans la culture nord-américaine, à savoir la guerre de sécession (l'ennemi est à l'intérieur) et les attentes du 11septembre (l'ennemi est à l'extérieur), les visions des deux hommes se reflètent dans les yeux de l'autre. L'ennemi, n'est-ce pas l'homme tout simplement ?
Ce qui est intéressant ici pour les amateurs de
Khara, c'est la différence de "ton" d'écriture versus celui qu'il prendra sur la trilogie des projets.
Stephen King a cette force (on lui a de ce fait beaucoup reproché l'utilisation de nègres) et David
Khara semble l'avoir aussi. Il n'a pas encore assez écrit de romans pour que l'on puisse l'affirmer. Mais ça ouvre un champ des possibles et une richesse infinie.
De même que le mélange entre l'écriture à la première personne et celle à la troisième personne qui permet le regard différent entre les scènes vécues par Barry et celles vues par Werner et de relancer l'action ou le fil de l'histoire. Efficace.
Plein de belles promesses donc dans ce livre. Juste des promesses pour l'instant à cause du format très (trop !) court.
Du coup, lire "La Nuit Éternelle" sera un indispensable pour s'émerveiller de nouveau.
Car le livre laisse un goût de trop peu (c'est mieux que l'inverse) et laisse beaucoup de questions en suspens notamment sur la réalité de transformation d'humain à vampire. On sent que la mythologie est très riche derrière et le lecteur impatient (oui, c'est moi !) veut en savoir plus :-)
3/5