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Citations sur Oeuvres - Bouquins (10)

Qu’est-ce qu’un poète? Un homme malheureux qui cache en son cœur de profonds tourments, mais dont les lèvres sont ainsi disposées que le soupir et le cri, en s’y répandant, produisent d’harmonieux accents. Il en est de lui comme des infortunés torturés à petit feu dans les flancs de Phalaris : leurs cris ne parviennent pas aux oreilles du tyran dans un hurlement d’épouvante; il les percevait comme une douce musique.
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Les hommes sont vraiment absurdes. Ils n'usent jamais des libertés dont ils jouissent, mais ils réclament celles qu'ils n'ont pas; ils ont la liberté de penser, ils demandent la liberté de parole.(28)
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Au point de vue chrétien (et en dépit de toute esthétique), toute existence de poète est péché, le péché de se livrer à des fictions au lieu d’être, de se rapporter au bien et au vrai par l’imagination au lieu d’être ces choses, c’est-à-dire au lieu de s’efforcer sur le plan existentielle de les vivre de façon existentielle. L’existence de poète dont nous parlons ici diffère du désespoir en ce qu’elle a l’idée de Dieu et se passe devant Dieu, mais elle est dialectique dans une immense mesure et constitue une espèce d’impénétrable imbroglio dialectique empêchant de voir dans quelle mesure elle a l’obscure conscience d’être péché. Un semblable poète peut avoir un besoin religieux très profond et son désespoir comporte l’idée de Dieu. Avant tout, il aime Dieu, son unique consolation dans son tourment secret que pourtant il aime aussi et refuse d’abandonner. Il est tout disposé à être lui-même devant Dieu, sauf au point précis où son moi pâtit ; là, dans le désespoir, il ne veut pas être lui-même ; il espère que l’éternité fera disparaitre cette infortune, mais ici-bas, malgré toute la souffrance qu’il endure à ce sujet, il ne peut se résoudre à s’en charger, à s’en humilier en croyant. Il n’en continue pas moins de se rapporter à Dieu et cette piété fait toute sa joie profonde ; pour lui, la pire épouvante serait d’avoir à se passer de Dieu, « ce serait à désespérer » ; et en fait pourtant, il se permet, peut-être à son insu, de se représenter Dieu un peu autrement qu’Il n’est, un peu à la façon d’un tendre père qui se plie aisément à l’unique désir de son enfant. Comme l’amant qu’une passion malheureuse a rendu poète trouve sa félicité à chanter le bonheur de l’amour, il devient aussi le poète de la religiosité. Dans ce domaine, il est devenu malheureux ; il comprend vaguement qu’il est exigé de lui qu’il s’affranchisse de ce tourment, c’est-à-dire qu’il s’en humilie en croyant et s’en charge comme d’un élément de son moi ; car il veut le tenir en-dehors de lui, mais de la sorte justement, il le garde fixé en lui, bien qu’à vrai dire cette conduite signifie à ses yeux qu’il s’en sépare autant que possible et s’en délivre autant qu’un homme en est capable (et il faut l’entendre à rebours, toute parole d’un désespéré étant exacte à condition d’en renverser le sens). Mais il ne peut s’en charger en croyant, c’est-à-dire qu’en dernière analyse il ne le veut pas, ou encore, qu’ici son moi plonge dans l’obscurité.
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Parlons de ces choses à la manière humaine. Quelle bassesse, celle d’un homme qui n’a jamais ressenti le besoin de tout sacrifier par amour et qui, par suite, ne l’a jamais pu ! Mais s’il découvre que justement ce sacrifice qu’il accomplit par amour risque d’entraîner le plus grand malheur de l’autre, de l’être aimé, que va-t-il se passer ? – Ou bien l’amour perd en lui sa tension ; au lieu d’être une vie jaillissante, il s’effondre et se referme au fond d’un sentiment mélancolique ; l’homme s’est départi de l’amour ; il n’a pas osé faire cette œuvre de l’amour, même en succombant, non sous l’œuvre elle-même, mais sous le poids de cette possibilité. De même en effet qu’un poids devient infiniment plus lourd quand on le fixe au bout d’un bâton que l’on doit tenir à l’autre extrémité pour le soulever, de même aussi toute œuvre devient infiniment plus pénible quand elle prend un caractère dialectique, et le plus pénible quand cette dialectique est sous le signe de la sympathie, de sorte que ce que l’amour pousse à faire pour l’être aimé, la sollicitude dont celui-ci est l’objet semble par ailleurs déconseillé. – Ou bien l’amour a triomphé et l’homme a osé agir par amour. Mais dans la joie de l’amour (et il est toujours joyeux, surtout dans le sacrifice total), il y a eu pourtant une profonde tristesse, car la possibilité était là. Et c’est pourquoi il a accompli son œuvre d’amour à lui et a effectué le sacrifice (qui l’a quant à lui rempli d’allégresse) non sans larmes ; car – comment m’exprimer – cette sombre possibilité plane au-dessus de ce tableau d’histoire intérieure. Et pourtant, si elle n’avait pas plané ainsi, son œuvre n’aurait pas été celle de l’amour vrai. – O mon ami, que sont tes épreuves dans la vie. Force ton cerveau, enlève tout voile et mets à nu les viscera du sentiment dans ton cœur, fais tomber toute muraille qui te sépare de celui dont tu lis l’histoire ; lis alors Shakespeare – et tu frémiras devant les conflits qu’il présente. Mais même Shakespeare semble avoir reculé d’effroi devant les conflits religieux proprement dits. Peut-être aussi ne peut-on les exprimer que dans la langue des dieux. Et nul homme ne peut la parler ; car comme un Grec l’a déjà dit en termes magnifiques, l’homme apprend des hommes à parler, et des dieux à se taire.
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Accepte le fait d'être ce que tu es, car c'est ce qui change ce que tu es.
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S’il se concevait (je ne l’ai pas admis) qu’un lecteur eût lu ce livre jusqu’ici (je ne l’ai pas pensé, sinon je n’aurais pas écrit cela), et s’il parlait à d’autres de sa lecture, certains de mes compatriotes diraient peut-être : ne faites pas attention à cet écrivain, ne l’écoutez pas, c’est un séducteur. Et l’un d’entre eux poursuivrait peut-être en ces termes : « On rattache d’ordinaire l’idée de séducteur à celle de la femme, et même alors, on le représente le plus souvent rusé et dissimulé dans le déchaînement d’une passion démoniaque. Mais ce n’est pas l’espèce dangereuse de séducteur, même pour la femme. Non, je me représente le séducteur sous la figure d’un jeune homme doué de beaucoup d’imagination et intelligent. Il ne recherche pas la faveur des femmes, et cette indifférence n’est pas le masque d’une passion secrète, loin de là ; il ne court pas après les filles ; il est un rêveur. Il ne va pas au bal avec les belles, il est très arriéré à ce sujet ; il a sa place au boudoir près de la salle de danse, et dans un coin du salon. Quand les jeunes filles sont un peu lasses de danser, ou quand le crépuscule tombe à la fin du travail, quand la pensée devient vagabonde, son heure est alors venue et il est à son poste. Elles l’écoutent, son imagination lui permet de les entraîner vers les idéals séduisants et, tout en parlant, de tendre les aspirations de l’âme et l’anxiété des pressentiments. Lui-même, il ne convoite rien. Et de nouveau elles recherchent le plaisir de la danse, ou reprennent leurs occupations ; mais en secret, elles se laissent porter par ses discours élevés et elles soupirent après le moment où elles pourront encore s’abreuver de l’enchanteresse illusion. Pour lui, il reste le même, car il n’a de joie que celle de la parole, et de désir que celui de la pensée tendue vers l’idéal. Quand il se tait, il lui semble qu’une profonde tristesse règne en son âme ; il se croit en sa mélancolie semblable à un vieillard aveugle que la parole, comme un enfant, conduit dans la vie. Les jeunes filles l’écoutent, séduites peu à peu ; vainement elles cherchent l’idéal qu’il a décrit ; elles ne le trouvent ni en elles, ni en lui, mais elles attendent le moment d’entendre sa parole et vieillissent en l’écoutant. Et quand leur vieille tante leur disait un peu plus tôt : « Attention, mes petits enfants, ne l’écoutez pas, c’est un séducteur », elles répondaient en souriant : « Lui, le meilleur homme du monde ! Il est si prévenant, si réservé ; on dirait qu’il ne nous voit pas ou qu’il a peur de nous ; et il parle si bien, il dit de si belles choses ! » Un pareil séducteur peut être un poète […] Laissez-le pour ce qu’il est, railleur et rêveur à la fois, bourgeois au total, trompeur, pure négation. Si vous faites ainsi, il cesse d’être séducteur. » Ah ! Ah ! Ah ! Quelle chance de ne pas avoir un lecteur qui lise jusqu’au bout.
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Je ne comprends la vérité que lorsqu’en moi elle devient vie.
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N'oublie pas de t'aimer toi-même
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Le drame de l’homme contemporain c’est de relativiser l’Absolu et d’absolutiser le relatif. 
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Dans la chrétienté, on n’a pas la moindre idée de ce qu’est le christianisme, on ne saurait s’aviser ou comprendre que le christianisme a été aboli par sa propagation. (l’Instant.)
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