Ecrivain majeur de l'Allemagne Fédérale,
Wolfgang Koeppen (1906 – 1996) est l'auteur d'une trilogie dont
La mort à Rome, publiée en 1954, constitue le 3ème opus. Il décrit dans ce livre une famille allemande en exil après la Seconde Guerre Mondiale et montre à quel point les reliquats de la période nazie sont encore omniprésents.
Siegried Pfaffrath est un jeune compositeur allemand qui effectue un voyage en Italie afin d'assister à la première d'une de ses symphonies. Errant dans les rues de Rome, s'abandonnant à des réflexions sur la ville, il est tiré de ses méditations par l'apparition dans cette même ville, de membres de sa famille, qui ont été des fervents admirateurs du régime nazi.
Il s'agit en premier lieu de l'oncle Judejahn, un général SS, condamné à mort par contumace, et qui a trouvé à se réemployer pour un pays arabe contre Israël. Il vient y retrouver sa femme, Eva, qui pleure quant à elle la Grande Allemagne du Führer. On y retrouve ensuite la soeur d'Eva, mariée à Frédéric-Guillaume Pfaffrath (le père de Siegfried). Ce dernier est maire d'une ville allemande dans laquelle il jouait déjà un rôle dans l'époque nazie. On discute notamment de la manière de faire rentrer le vieux Judejahn en Allemagne… Vous l'aurez compris, c'est une vision peu flatteuse qui est donnée de cette famille allemande, montrant la survivance du sentiment nazi à une époque où la RFA voulait se reconstruire sur des bases démocratiques. C'était d'ailleurs l'un des buts avoués de l'auteur,
Wolfgang Koeppen, de réveiller ses concitoyens en leur montrant cela.
Ce livre est d'un accès assez difficile. C'est tout d'abord la touffeur qui est omniprésente pour le lecteur, voire un certain malaise, notamment en raison de la personnalité de Gottlieb Judejahn, un homme habitué à se faire obéir, dont le caractère méprisant, violent transpire à chaque ligne.
La relative difficulté à suivre ce livre est renforcée aussi par les changements de narration qui obligent le lecteur à un surcroît d'attention, par un style assez descriptif ou encore l'emploi de nombreux adjectifs, parfois contraires.
Dans ce contexte, on voit bien la difficulté des enfants de cette génération de trouver leur propre voie. Siegfried cherche à faire table rase du passé, à transformer le monde, son frère quant à lui suit ses parents. Quant au fils du vieux Judejahn, il va être ordonné prêtre et s'interroge lui-aussi, dans un sens complètement opposé à Siegfried.
A côté de cette famille, nous trouvons le chef d'orchestre Küttenberg et sa femme Ilse. Eux aussi viennent de la même ville. Ilse est juive et les souvenirs l'assaillent quand elle voit le père de Siegfried à la fin du concert.
Le livre est intitulé «
La mort à Rome ». Cela signifie qu'il n'y a pas d'issue heureuse à ce livre, disons-le tout simplement. Jusqu'au bout, cette pesanteur nous accompagne et les pensées de Judejahn ne faiblissent pas.
Difficile de conclure sur ce livre et de donner une recommendation. C'est une lecture exigeante, dérangeante mais qui me semble après coup essentielle. C'est la dernière fiction que Koeppen a écrit, le livre l'ayant également beaucoup marqué (ou plus exactement l'absence réelle de réponse de ses concitoyens).
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