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EAN : 9782490501069
248 pages
Editions du Typhon (08/10/2019)
3.85/5   30 notes
Résumé :
Dans les années 50, un jeune compositeur allemand, Siegfried, est en Italie. Durant les quelques jours qui le séparent de son concert, il découvre Rome à la splendeur ternie par les traces du conflit. Alors qu'il se pensait libéré des siens, Siegfried aperçoit des membres de sa famille et finit par croiser le plus terrible d'entre eux : son oncle, un ancien haut-dignitaire nazi. La présence de ce persécuteur impénitent qui maudit la démocratie et croit en un IVe Rei... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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Le mardi 8 octobre, les toutes jeunes éditions du Typhon, installées à Marseille, présentaient leur nouvelle parution, La Mort à Rome de Wolfang Koeppen, au cinéma Lumière de Bellecour.

Une soirée spéciale au cours de laquelle ce roman allemand, oublié après sa sortie scandaleuse en 1954, résonnait avec le chef d'oeuvre de Roberto Rossellini, Allemagne année zéro.

Berlin, Rome. Deux villes meurtries par la guerre et peuplées de fantômes. Deux capitales, symboles de puissance et de violence, de pays qui voulurent se réinventer au prix du sang et dont les peuples furent hypnotisés par des bergers qui se révélèrent être des bouchers. Deux cités marquées, depuis la défaite, par le sceau de l'infamie. Berlin éventrée chez Rossellini, Rome hantée chez Koeppen.

Presque dix ans séparent le Berlin encore en ruine filmé par Rossellini de la cité éternelle que dépeint Koeppen, mais une même interrogation parcourt les deux oeuvres : comment continuer à vivre ?

Comment continuer à vivre, quand vous et vos compatriotes avez été dévorés par un nihilisme fou, quand même vos proches se sont complu dans le meurtre et que d'autres l'ont accepté par lâcheté, quand il y a eu les jeunesses hitlériennes, les camps et la fin de toute humanité ?Dans les années 50, Siegfried, jeune compositeur allemand, a répondu par la fuite. Dégoûté par leur bassesse morale et l'horreur dont ils ont été capables, il a rompu avec son pays et les siens : un père, maire de sa petite ville, aussi à l'aise avec les concepts du IIIe Reich que ceux de la démocratie ouest-allemande, une mère effacée et un frère ambitieux étudiant en droit. Venu à Rome pour la première de sa symphonie, Siegfried apprend que sa famille s'y trouve aussi, tout comme son pire cauchemar : Judejahn, son oncle, dignitaire nazi et seigneur de guerre que tout le monde croyait mort, y compris sa femme Éva, pasionaria du IIIe Reich, et son fils Adolf, devenu diacre, également présents à Rome. Un fantôme qui laisse planer son ombre funeste sur le jeune Siegfried, sa famille et sur la ville entière.

Koeppen fait entendre les voix de toutes ces Allemagne qui semblent irréconciliables, chaque personnage représentant l'un des caractères d'un pays qui n'a pas disparu avec la guerre et qui doit vivre avec le souvenir terrible de ce qui a été commis en son nom. La famille de Siegfried, comme les autres, est une famille de survivants, et c'est bien là son malheur, car elle doit se souvenir. Certains, comme le père de Siegfried, dont les nuits sont paisibles, font semblant. Il pense « Ceux qui s'en étaient tirés pouvaient continuer à vivre. ».

Son inconscience et son opportunisme réside dans cette notion de possibilité, comme si on s'échappait de la guerre comme d'un mauvais rêve. Pour d'autres, Siegfried, Judenjahn et sa femme Éva, vivre est au contraire une pénible obligation, parce que le IIIe Reich n'est plus, ou parce qu'a contrario, il a laissé des stigmates trop douloureux... suite de la chronique sur le blog
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Un écrivain allemand qui semble avoir eu son heure de gloire dans son pays, mais dont l'oeuvre romanesque paraît s'arrêter dans les années 50 du siècle dernier. Il n'est pas très connu en France, La mort à Rome a été publié par Albin Michel en 1962, et vient de reparaître aux éditions du Typhon, une jeune maison marseillaise, dont le catalogue semble très intéressant. La mort à Rome serait le dernier volet d'une sorte de trilogie, qui ferait le bilan peu enthousiaste de la société allemande de l'après guerre, qui n'aurait pas vraiment soldé ses comptes avec son passé.

Le roman se déroule à Rome, où se rejoignent, plus ou moins volontairement, les membres d'une famille allemande. le livre commence avec Siegfried, un jeune compositeur, dont l'oeuvre doit être créée par un chef célèbre. Il a fuit son pays et sa famille, et retrouver ses parents et son frère, dans la capitale italienne ne lui fait pas vraiment plaisir. D'autant plus qu'ils y retrouvent l'oncle de Siegfried, Judejahn, que ce dernier pensait mort. Haut responsable SS, condamné après la guerre, il avait disparu. Il s'est réfugié dans un pays arabe, dans lequel il s'occupe d'entraîner des troupes et d'acheter du matériel militaire. le père de Siegfried, redevenu bourgmestre, malgré son soutien au régime nazi, pense que Judejahn peut maintenant revenir en Allemagne, le temps de l'oubli étant venu, et veut en persuader son beau-frère.

Wolfgang Koeppen dresse un portrait sans complaisance de ses compatriotes. Certains ne rêvent que de retour à l'ordre ancien, n'ont aucun remord, et seul le regret d'avoir perdu, en attendant de rejouer la partie. Ils y a ceux prêts à s'accommoder de tout et de suivre le plus fort. Et là jeune génération semble impuissante, Siegfried choisit la fuite. Sa musique même, paraît porter les signes d'une sorte de capitulation, dont il n'est pas conscient.

Le roman est très habilement construit, nous passons d'un personnage à un autre, nous les suivons de l'intérieur, avec leurs obsessions, leurs ressassements. le cadre d'une ville étrangère libère les pulsions, permet une expression plus pleine de ce que sont réellement les personnages. Les différentes voix se répondent, construisent un tableau complet progressivement.

Ce n'est pas un livre aimable, aucun personnage n'est réellement sympathique, sauf peut-être Kürenberg, le chef d'orchestre et sa femme Ilse. Mais ils ne peuvent pas grand-chose contre la force brutale de Judejahn.

Malgré d'indéniables qualités, j'ai trouvé le roman un peu trop démonstratif à partir d'un certain moment. Wolfgang Koeppen assène plus qu'il ne suggère, c'est sans doute puissant, mais manque un peu de nuance.
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Je connaissais La mort à Venise. Et l'expression Voir Naples et mourir. L'opération Masse Critique m'avait proposé cette fois parmi d'autres livres ce roman méconnu datant de 1954, signé de Wolgang Koeppen. Un travail soigné des éditions du Typhon à Marseille. La mort à Rome n'est pas un ouvrage a priori facile et s'il semble avoir acquis un statut d'oeuvre importante en Allemagne il n'a jamais été un succès populaire. Pas très enthousiasmant ce roman, dernier épisode de la Trilogie de l'échec. Il me semble, mais je suis loin d'être péremptoire, que ce livre et les deux précédents Pigeons sur l'herbe et La serre (le premier, une journée banale dans Munich d'après-guerre, le second misère et corruption dans la petite capitale fédérale Bonn) relèvent d'une littérature certes assez forte et qui n'est pas sans fulgurances, mais d'une littérature de l'expiation qui m'a laissé de marbre. Il est vrai que nous sommes moins de dix ans après la découverte des horreurs.

Les protagonistes, apparentés entre eux, se retrouvent à Rome, la Rome alliée, la Rome traîtresse aussi pour ces nostalgiques, voire plus pour certains, du Troisième Reich. La mort à Rome est féroce et annonce Heinrich Böll et Gunther Grass qui eux, dix ans plus tard, connaîtront le succès. Deux beaux-frères, le bourgmestre et l'ancien général, qui eurent de lourdes responsabilités, leurs épouses, leurs enfants, cousins très différents sont les personnages assez complexes et fort antipathiques qui peuplent cette histoire. On comprend le propos de Wolfgang Koeppen, et sa rage à constater que finalement rien n'a raiment changé et que la plupart de ces hommes seraient partants pour un remake. C'est un peu trop catégorique pour moi.

L'autre personnage est la ville, la louve romaine ensanglantée, avec ses touristes revenus nombreux, humiliation suprême, beaucoup d'Allemands. Et là Koeppen fait preuve de beaucoup de talent. Plus qu'avec la Germanie, c'est avec les pierres, avec L Histoire, avec la religion catholique que les mots sont les plus forts. N'y aurait-il que les deux pages et demie sur le pape en prière, qu'il faudrait citer intégralement (c'est magistral, je ne suis pourtant pas un croyant) La mort à Rome mérite finalement l'intérêt. Ce voyage à Rome, version morbide, voire méphitique est un ouvrage intéressant, à consommer avec modération, Thanatos étant tout de même encombrant.

-Tu ne cherches pas Dieu dans sa maison, tu le cherches dans les impasses, dit Adolf. ( diacre, à son cousin Siegfried).

-S'il existe, il vit aussi dans les impasses (réponse de Siegfried, compositeur).
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Ce chef-d'oeuvre de la littérature allemande d'après-guerre, bénéficiant enfin d'une traduction française, est tout du long parcouru par l'ombre de la mort, tant par le champ lexical employé que par le symbolisme qui le nimbe. Nul autre choix n'était plus indiqué pour le cadre de cette histoire : Rome, cet immense tombeau des gloires défuntes bâti sur les dépouilles opimes des peuples subjugués. L'intrigue gravite autour de la première représentation d'une symphonie et se concentre principalement sur trois personnages. Tout d'abord Gottlieb Judejahn, personnage central et inquiétant, ancien dignitaire SS et commandant de la police de Rome, toujours pénétré du bien fondé de ses convictions rances, dans l'attente du renouveau de la grande Allemagne. Viennent ensuite un neveux et son fils qui se sont affranchis de cette figure tutélaire et dont les choix de vie sont l'objet de la réprobation tant de Judejahn que de la belle famille, les Pfaffrath, des grand bourgeois bon teint qui ont su louvoyer, tout en pensant que le IIIème Reich avait somme toute du bon. le neveu Siegfried est l'auteur de la symphonie qui va être jouée, c'est un compositeur de musique dodécaphonique, musique de dégénérés pour les nazis, pédéraste de surcroit, amateur des étreintes stériles, révulsé par la simple idée de procréation, complexé par le manque d'éducation que lui a légué ces piètres années dans les jeunesses hitlériennes. Enfin Adolf (!) le propre fils de Judejahn, est diacre, c'est un futur officiant d'une religion frelatée, en proie au doute devant les somptuosités froides de la Basilique Saint-Pierre .

La Mort à Rome est le réquisitoire sans appel qu'un auteur lucide fait de ses contemporains. Il dresse le tableau d'une société composée d'anciens nazis nostalgiques, dont les talents divers ont permis de se recycler auprès des puissances étrangères, de bourgeois opportunistes, oublieux de leurs compromissions passées, béats devant le nouveau miracle allemand et d'une jeunesse frappée de stérilité, en proie au doute et à la culpabilité. Cet acte d'accusation serait inefficace sans la formidable technique narrative de Koeppen, qui multiplie les points de vue, dans une variation cinématographique de focalisation, résolument moderne.
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Je viens de terminer "La mort à Rome" avec beaucoup de mal -je dois dire- tant les personnages ont une psychologie tourmentée - que le lecteur , doit , en outre, endosser, car il s'agit d'un roman polyphonique qui nous fait revêtir les différentes personnalités. Et ces affres de remords, de complaisance, de paranoïa, de schizophrénie sont assez pénibles à vivre de l'intérieur. En outre, l'ouvrage, de 1952 réédité aujourd'hui, est actuellement loin de nos préoccupations. Il s'agit des états d'âmes des allemands ni jugés, ni en fuite, survivants de cette apocalypse de la 2nde guerre mondiale dans laquelle ils ont eu , pour beaucoup, une "certaine "responsabilité et de leur reconstruction psychologique quasi impossible dans la voie d'une nouvelle "normalité" Comment revenir au quotidien après un tel déchainement de haine, de peur, de cruauté ? Pour la génération actuelle, ces postures me semblent cependant relever davantage d'une réflexion intellectuelle que d'un vécu tant qu'on n'est pas soi même passé par là. le livre est extrêmement bien écrit, dans un style très actuel. J'ai pensé parfois à l'écriture si fluide et si précise de Thomas Mann ou Stefan Zweig, mais le vocabulaire et les réflexions de Siegfried notamment, sont d'un modernisme stupéfiant.C'est une excellente littérature assez exigeante toutefois. Sur un sujet analogue, je me suis rappelée avoir vu un film de 2017 "Le labyrinthe du silence" (titre allemand original : "Im Labyrinth des Schweigens"), inspiré de l'histoire vraie de Fritz Bauer, procureur général de Francfort à l'origine du procès "Auschwitz" qui se déroula en 1960. Ce film, beaucoup plus accessible, m'avait permis une vraie réflexion sur le sujet du déni, du pardon, de la reconstruction des protagonistes. Ce livre vient la compléter d'une manière beaucoup plus violente, le personnage de Judejahn est vraiment terrifiant.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Je ne savais plus l’heure du rendez-vous que j’avais pris avec
Adolf. Était-ce dans la matinée, était-ce l’après-midi ? Je l’ignorais.
Je l’avais oublié. Peut-être ne voulais-je pas m’en souvenir.
Je ne désirais pas voir mon cousin et pourtant je me rendis à
l’endroit convenu : déjà, j’étais prisonnier ; j’enrageais, parce
que je me sentais pris au piège. Adolf troublait ma liberté, il
troublait mon sentiment immédiat de la vie, mon perpétuel
ébahissement.
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Et Siegfried pensa aux voix, aux voix de la rue, aux voix de la brutalité, de l'angoisse, de la torture, de l'avidité, de l'amour, de la bonté, de la prière ; il pensa aux bruits de la méchanceté, aux chuchotements du vice et aux hurlements du crime. Et il pensa : et demain il m'abaissera, il m'opposera les lois de l'harmonie et une sévérité de maître d'école - chef d'orchestre célèbre, déchiffreur précis, peut-être jardinier qui taille tout, alors que je suis plante sauvage et mauvaise herbe.
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Les chats se disputent les rognures. Il y va de leur vie. Malheureuse créature, pourquoi s'est-elle multipliée ! Les bêtes sont abandonnées par centaines, elles sont affamées par centaines; elles sont lubriques, enceintes, cannibales. Elles sont malades et perdues, et tombées aussi bas que l'on peut tomber quand on est chat.
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."..déjà, ils s'étaient liés avec d'autres voyageurs, des compatriotes de même milieu et partageant leurs vues; des rescapés , des gens que la peur avait secoués et qui avaient oublié comme eux; des propriétaires de Volkswagen, des conducteurs de Mercedes, guéris par l’efficacité allemande et redevenus des porteurs bienvenus de devises..."
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Le salut était-il dans le refus, dans la fuite, dans la solitude ? La vie de l’ermite était-elle la seule forme d’affirmation ?
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Videos de Wolfgang Koeppen (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Wolfgang Koeppen
Yves Torrès vous présente la ré-édition de "La mort à rome" de Wolfgang Koeppen aux éditions du Typhon. Rentrée littéraire Septembre 2019.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2365537/wolfgang-koeppen-la-mort-a-rome
Notes de musique : Youtube Audio Library
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