Citations sur Le concert posthume de Jimi Hendrix (21)
Les rues vivent longtemps, survivent aux hommes qui la peuplent, génération après génération.
Un sourire se dessina sur le visage d’Alik, suscité par l’idée que sa petite cour, pratiquement la dernière dans cette rue, avait survécu à un aussi grand pays que l’URSS. Non, lui, Alik, n’avait jamais été un adversaire du régime soviétique. Il ne s’était jamais battu contre lui. Il s’était contenté de l’ignorer. Le régime s’en était offensé, et pour sa part n’avait pas ignoré Alik et ses amis.
Les poissons vivants n’ont pas leur place dans une cuisine ! Ils risqueraient de se méprendre sur tes intentions !
Autrefois, au mauvais vieux temps des Soviets, la moindre petite table de cuisine rectangulaire, garnie de tabourets, eût paru immense. Ce temps-là et ces tables-là appartenaient désormais doublement au passé : c’était un autre siècle, et un autre pays. Aujourd’hui, on avait envie d’une vraie chaise – visiblement, avec les années, les fesses réclamaient de la douceur et du confort.
Le passé s’accumule, tandis que le présent coule sans s’arrêter. Un être humain, ce n’est jamais, en gros, qu’un vivant « appareil », très ordinaire et élémentaire, de transformation du futur en passé.
Le monde passé était fait de conventions, c'est pourquoi il s'est désagrégé, dit-il, songeur. Ce monde actuel n'est pas différent, mais les conventions sont autres. Lui aussi se décomposera avec le temps. L'essentiel, c'est de protéger son propre monde intérieur de toutes les conventions, quelles qu'elles soient.
Un être humain, ce n'est jamais, en gros, qu'un vivant "appareil", très ordinaire et élémentaire, de transformation du futur en passé.
Mais vous avez dû tomber amoureux, n'est-ce pas ? Vous êtes devenu du jour au lendemain un homme heureux ! C'est ça ? Les gens heureux, tant qu'ils sont heureux, ne remarquent pas les anomalies, mais ce n'est que temporaire. Les anomalies sont toujours là, à côté d'eux!
Il ne voulait penser qu'à elle, à Darka, comme si c'était pour la revoir qu'il lui fallait foncer à bord d'une vieille guimbarde dans les rues les plus cahoteuses de Lviv, secouer ses passagers pour les libérer de leurs calculs rénaux et aller ensuite la rejoindre, retrouver son guichet éclairé toute la nuit, rempart de lumière protégeant sa magicienne aux longs gants colorés.
« Tu sais, déclara le Lituanien d’un ton assuré, certaines villes n’existent que pour qu’on rêve d’y aller un jour. Mais le rêve est quelquefois plus important que le voyage... »