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Critique de Fleitour


Jean de la Fontaine, fêté récemment à la grande librairie avec Eric Orsenna et Michel Onfray et des comédiens, était-il poète , moraliste ou philosophe ? C'est finalement Michel Onfray qui avança l'idée qu'il était libertaire et philosophe, et qu'il avait largement usé de poésie pour y glisser une morale, son art de vivre.

C'est peut-être le loup et le chien qui définit le mieux cet homme, qui ne prêtait pas une importance essentielle à sa tenue, mieux sa prestance. Donc le loup est séduit par le discours du chien, félicité, vie facile d'abondance jusqu'au moment où il découvre que celui-ci doit porter un collier : "je ne voudrais pas même à ce prix un trésor, cela dit, Maître Loup s'enfuit et court encore. (page 4)"

Il eut le bon goût de s'attacher les grâces de Fouquet, puis de la duchesse d'Orléans, avant de devenir l'hôte de Mme de la Sablière jusqu'à sa mort, puis l'hôte du couple d'Hervart à Bois-le-Vicomte. Il s'enfuyait comme le loup mais il trouvait refuge. Et Madame de la Sablière de s'écrier « je n'ai gardé que mon chien, mon chat et La Fontaine. »

On ne trouvera donc pas dans sa vie de choses singulières, plutôt un gentilhomme épris de liberté, voire de désordres, et beaucoup de légèreté. On se riait de lui, et il fut pour les moqueurs la fable du quartier. Passé l'âge de 37 ans il était inconnu, ignorant son talent.

Jean de la Fontaine a le goût de la nature et sa charge de Maître des eaux et forêts l'y invite. Fouquet qui le reçu lui demanda : "savez-vous lire et écrire ? En êtes vous sûr ? Je vous inscris comme poète à tout faire"  . Sur ce il recevait de la main du poète une « ode à la paix », « la paix fait nos souhaits, et non point nos soupirs ».

L'on trouve chez Jean de la Fontaine, ce trait qui colore souvent l'ambiance de ses fables, le loisir, le goût de ne rien faire, d'observer la nature.Dans une missive à Jean Racine il avoua ; "le loisir que mes affaires me laissent, ce n'est pas la poésie, c'est la paresse qui l'emporte."
On trouve aussi ce motif , "je le trouvais dormant sur un lit de pavots, les songes l'entouraient sans troubler son repos."

Chez Jean de la Fontaine il y a cette indépendance d'esprit qui va le conduire à réaliser la plus époustouflante création poétique, guidée par sa pétillante intelligence, et sa philosophie libertaire, «  la véritable grandeur est de régner sur soi-même, et le véritable plaisir de jouir de soi ». Sa morale pourrait être synthétisée en quelques mots, éviter les filous et cultiver son champ, prudence et exigence, une morale universelle.



Ajoutons qu'il entretenait dans ses fables un amour charnel pour la nature, "je vis des plantes, je vis des arbres, je vis des cristaux liquides, je vis des animaux et des hommes."


Fallait-il que j'égratigne le poète, qui me semble pour la gent féminine montrer parfois un peu de misogynie ?
Pardonnez moi donc de lever le voile sur deux fables : ainsi, « Deux Coqs »
"Deux coqs  vivaient en paix :
Une poule survint et voilà la guerre allumée.(page 152)"
puis dans « Les femmes et le secret » : 
" Rien ne pèse tant qu'un secret :
Le porter loin est difficile aux dames,
Et je sais même sur ce fait
Bon nombre d'hommes qui sont femmes... (page 174)"

Malgré ces piquants propos, rien n'est plus délicieux à lire que ces fables, qu'un seul vers, vous soit servi, c'est la suite qui se lève, tant ils ont été sus, comme le laboureur que mon père savourait.
« Travaillez prenez de la peine c'est le fonds qui manque le moins », évoquons « la poule aux oeufs d'or » chère à Luchini, ou le Héron;  "L'onde était transparente ainsi qu'aux plus beaux jours, La commère la carpe y faisait mille tours...(page 148)"

Ainsi convient-il de saluer le créateur de l'esprit français, au style sublime et percutant, lui de conclure par :
L'épitaphe de la Fontaine par lui-même
Quant à son temps, bien sut le dépenser ;
deux parts en fit, dont il voulait passer
l'une à dormir, et l'autre à ne rien faire.

Lu ces Fables de Jean de la Fontaine
librairie illustrée Jules Tallandier éditeur paris 1906
12 livres 130 fables (BNF)
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