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« Il y a les livres. Certains sont des tombeaux. Ils immobilisent dans le cours du temps, arrachent les êtres à l'oubli, les figent dans la pierre. D'autres sont des châteaux. On trouve, courant dans les couloirs, les morts épars à la mémoire, ceux dont la silhouette sur la photo et dont le nom n'est plus qu'un mot transparent. Ces livres s'amusent du bruissement du souvenir. Ils n'ont pas enterré l'amour ; ils ont simplement oublié d'être malheureux. »

Le livre d'Emmanuelle Lambert est un château, certainement pas un livre de deuil même s'il raconte les derniers jours de son père, structuré en 6 chapitres quotidiens du dimanche au vendredi. Ce n'est pas le deuil qui commande, c'est au contraire la vivacité du présent et du sentiment, « ces particules de temps et d'affection mêlés » qui demeurent en suspens.

La narration est extrêmement mobile, refusant toute fixité mortuaire. Elle multiplie les voix/ voies temporelles, superposant des couches de souvenirs aux scènes du moment. Plusieurs époques s'entrelacent au gré du flux des souvenirs, racontant l'enfance du père mais aussi celle de la fille, évoquant presque en mode sociologique l'évolution des Soixante-huitards tout comme sa place à elle dans une lignée de femmes qui n'ont pas toutes vécues la liberté féministe.

Elle parvient ainsi à saisir au plus près du coeur ce père à la fois brusque et bienveillant, explosif et séduisant, fantaisiste et brutal, comme si elle voulait vivre à nouveau à ses côtés, cherchant sa présence dans des souvenirs parfois lointains qui ressurgissent. Pour le garder vivant auprès de lui en faisant s'entrechoquer tendresse, ironie, humour et lucidité, joie et tristesse. Jusqu'à esquisser un portrait lumineux de ce père qui vient de mourir.

Ce roman est un livre de vie, de ces moments où la vie palpite dans les mains, même en pleine agonie, à l'unisson d'une écriture extrêmement pulsée. Les mots d'Emmanuelle Lambert, sensibles et précis, emplis de poésie, parvient à capter l'intensité de chaque moment, les derniers, partagés avec son père, avec une certaine mélancolie mais sans la lourdeur du pathos ou l'indécence gênante de l'impudeur. Plusieurs passages sont absolument superbes. Tellement justes que j'ai parfois eu du mal à me concentrer, troublée de lire les mots que je n'étais pas parvenue à poser sur les derniers jours de ma mère, décédée de la même façon que le père de l'auteure. C'est presque miraculeux d'écrire ainsi sur la mort en l'extirpant du marbre du chagrin.

«  le regard doucement hagard avant d'accrocher sa prunelle aux nôtres, de cette lenteur avec laquelle les habitants de la fin de la vie reviennent parfois auprès de vous, encore capables, par amour, par ennui, d'arracher un résidu de leur lumière intérieure à leur épuisement. Pour vous voir, vous connaître, vous reconnaître et vous le dire en silence.(...) Ces menus réveils, cette manière de nous amener à lui une dernière fois, à chaque fois la dernière, avant son sommeil solitaire, j'aurais voulu les immobiliser, les laisser suspendus dans le temps, nous figeant, dans cette chambre moite, à la lisière de sa mort. J'aurais voulu saisir l'instant comme lorsqu'on essaie, enfant, d'attraper les poussières qui dansent dans la lumière, et jamais ne prennent corps dans nos mains, pour conserver près de moi le regard de mon père. »

Lu dans le cadre du Coup de coeur des lectrices Version Fémina décembre 2021
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Il y a parfois des hasards qui vous proposent la lecture d'un livre auquel vous n'aviez pas pensé. Vous lisez la quatrième et vous vous dites , pourquoi pas ?
Vous cochez la case et , incroyable , vous obtenez le livre ! Alors , évidemment, une parole est une parole , et vous écrirez une critique ,,parce que , ne pas le faire, c'est possible , mais ce n'est , ni sympa , ni moral du tout .... Alors , d'abord , lire et .....vous voilà embarqué(e) dans une histoire qui pourrait être la vôtre...Une chambre d'hôpital, une vie qui part , ses sept derniers jours ....ou huit ...ou cinq ...ou...peu importe , les derniers .Les moments ultimes d'une vie qui s'échappe, là, sous vos yeux , vous les attendez , vous les redoutez , vous les lui souhaitez , mais ça, c'est dur ... Et , tant qu'il est vivant , les souvenirs remontent à la surface , les bons moments qui vous ont construit(e ) , qui vous ont aidé( e) à grandir, pas un deuil , non , un moment d'une rare force , un moment où il appartient encore au présent. Pour le deuil, il faudra attendre .L'instant présent, douloureux , se mêle au passé au point de se confondre ...Pas de miracle , il meurt , car tout le monde meurt , mais , comment dire , il meurt parce que c'était le bon moment , pour lui , pour vous ....
J'ai trouvé ce livre très fort , poétique, fier . Pas de pathos avant le " Grand départ " , non , un retour sur " son " passé et tous ceux et celles qui ont fait qu'il était " comme ça " , et que sa fille est comme ça . Un livre court car il est sans doute inutile de se perdre , il faut aller à l'essentiel , comprendre le passé pour mieux comprendre le présent...
J'ai été subjugué, vraiment , par tout ce qui concerne l' amour de la " lecture " dans ces pages , c'est vraiment " énorme, incroyable de justesse" , très, mais vraiment très troublant et édifiant . D'autres passages m'ont semble moins " accrocheurs " mais qu'importe , il y a tant à puiser dans ce roman intimiste et ...universel . Contradictoire ? Dans les mots , peut - être, dans les faits ...à voit . Un livre qui , en nous plaçant là où on redoute tous et toutes de se retrouver , nous apprend à être humble et , surtout , ....sincère devant la précarité de la vie...et la mort de ceux qu'on aime et ....plus . Une vie , la nôtre , qui va se nourrir ...
Je ne sais pas si je dois vous " conseiller " cette lecture , la seule chose que je puisse vous dire c'est que , moi , je l'ai adorée et qu'elle m'a ému ....et que j'ai bien fait de " tendre la main " à ce bien beau livre.
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Lorsqu'un cancer de l'ampoule situé près du pancréas emporte son père, Emmanuelle décide de lui rendre un magnifique hommage. Ouvrage poignant et intime, cette biographie où se mêlent les souvenirs du passé à différentes époques nous relate les derniers jours vécus avec cet homme d'exception. Par son travail d'écriture, Emmanuelle Lambert a su évoquer certains thèmes difficiles tels que la maladie ou la mort mais tout en y glissant une certaine douceur et, c'est avec une grande sérénité que j'ai refermé cet ouvrage…

Pour les amoureux de la littérature française et des biographies familiales, cet ouvrage est une valeur sûre, n'hésitez pas à le découvrir...

Je tiens à remercier Version Fémina et les éditions Stock pour la découverte des écrits d'Emmanuelle Lambert.

#Item 2
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Le garçon de mon père est un magnifique récit sur une relation indestructible entre un père et sa fille qui prend toute sa force au stade ultime quand la fille adulte accompagne son père en fin de vie vers l'autre rivage.

J'avais peur d'y trouver de la lourdeur, de la tristesse profonde, au contraire le livre d'Emmanuelle Lambert respire de sérénité.

Pour être en accord avec elle-même dans ce moment très difficile, la narratrice tisse une toile familiale extrêmement vivante par l'évocation de ses souvenirs, ceux du temps d'avant bercés des notes de musique et des livres de son enfance.

Tout un monde est de nouveau réuni, des photos, des sons, des images dans la fureur des années 80.
L'époque et ses nouveaux changements forment le décor d'une histoire familiale en quête de racines, des femmes nimbées de solitude, une filiation à trous qui se répercute de génération en génération.

Et au dessus de tout cela, la figure paternelle, asile et refuge d'une enfant qui grandit dans ses yeux. L'enfant qu'il rêvait d'être.

La narration ressemble à un long poème dédié au père disparu par le rythme lent et ses belles images évocatrices comme les fleurs d'un printemps japonais.



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"Le garçon de mon père" relate les derniers jours du père de l'auteur. Elle va, avec sa soeur lui faire des visites à l'hôpital durant ces 5 derniers jours jusqu'au moment de l'adieu.
Ce n'est pourtant pas triste. La façon dont Emmanuelle Lambert traite cette fin de vie est, certes poignante, mais c'est aussi apaisant.
Il y a une sensation de sérénité qui se dégage de ces lignes.
Ces 5 jours sont jalonnés de souvenirs mettant en avant la personnalité aimante et aimable de ce père. C'est plein de douceur, de poésie et d'amour.
C'est un bel hommage que Emmanuelle Lambert fait à son père.
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Dans ce livre autobiographique, la narratrice nous fait vivre les derniers jours de son père. En effet, celui-ci est atteint d'un cancer et il ne lui reste que quelques jours à vivre. Cinq plus précisément. le récit va donc se découper en chapitres correspondants aux jours.
Au fil des pages, la narratrice évoque des souvenirs, des faits d'actualité et de société de son enfance et son adolescence. On parcourt les années en égrénant des instants de vie jusqu'à ce moment ultime de la mort de son père.

L'écriture est parfois poétique et ne tombe jamais dans le triste. La mort arrive pour tous et dans ce récit, on sent qu'elle est accueillie comme quelque chose de logique, que c'est le moment.

Malgré la poésie des mots, je ne suis pas friande de ce genre de récit et je n'arrive pas à prendre le thème de la mort avec "légèreté" et "résignation positive".
Je ne le recommande que pour celles et ceux que ça ne dérange pas de vivre les derniers instants de quelqu'un.
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Emmanuelle Lambert nous confit les derniers jours passés auprès de son père mourant à l'hôpital. le présent fait rebondir le passé et nous entraîne dans la ronde de sa famille, de ses souvenirs. Ce père, figure centrale autour duquel tout s'orchestre est omniprésent et bienveillant. On sent beaucoup d'amour et de respect pour lui. le récit ne sombre jamais dans le trop ou dans l'apitoiement. C'est simplement beau, comme la vie. J'aurais pu la suivre ainsi des centaines de pages encore tellement l'écriture est fluide, éclatante, passionnée, dynamique, dosée avec délice.
Un vrai petit bonheur.
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Ça n'est jamais facile de parler de la mort de ses proches sans tomber dans le pathétique et la nostalgie. Mais il faut avoir vécu avec ce père, ancien soixante-huitard, matheux épris de musique et de liberté, pour traverser l'épreuve de sa mort avec tant d'élégance.
Emmanuelle Lambert, nous offre, avec ce court roman, ses réflexions sur la vie qu'elle a vécue auprès de cet homme hors du commun qui regretta d'avoir trahi les idéaux révolutionnaires de sa jeunesse mais qui, en s'intégrant à la société capitaliste, conserva sa marginalité et ses goûts artistiques.
Aînée de deux filles, elle prit le rôle du garçon que son père aurait aimé avoir, « dans un monde où nous étions tous deux contre le monde. »
Il marchait devant et elle, le suivait, dans toutes ses élucubrations, de lectures en concerts, de balades en siestes, avec admiration et amour.
Quand à 72 ans, il tire sa révérence, vaincu par le cancer, il part en paix, l'esprit tranquille d'avoir, malgré sa propre filiation « triste et brisée », transmit à ses deux enfants des valeurs qui comptent.
Mélange de souvenirs passés et de pensées présentes, l'écriture de l'autrice est particulière, sans fioritures, tantôt acide, tantôt drôle et il m'a fallu quelques pages pour y entrer.
Un roman qui témoigne d'une époque où les femmes se sont libérées de leur rôle exclusif de mère et où les hommes ont vu se consumer les rêves de révolution de leur jeunesse. le difficile sujet de la perte d'un parent, nécessite une capacité de dépassement qui n'est peut-être pas aisée pour tous, mais chacun devrait y puiser une moisson de pensées positives.
Pas un coup de coeur mais une lecture que je garderai en mémoire et qui s'achève par ce bel hommage : «Pour la musique, pour la beauté, et pour la vie, sois remercié.»
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Emmanuelle Lambert évoque dans cette autobiographie poignante la figure de son père, atteint d'un cancer de l'ampoule, organe situé à côté du pancréas, pourtant, comme elle l'écrit, "ce livre n'est pas un livre de deuil,{...] ici, ce n'est pas le deuil qui commande."
Le récit s'ouvre un dimanche de septembre 2019: Emmanuelle se rend au chevet de son père, il ne lui reste que quelques jours à vivre, cinq exactement. le récit s'égrène au fil de ces cinq jours et la narration alterne les souvenirs d'Emmanuelle Lambert avec son père et les moments passés à son chevet jusqu'à son dernier souffle, moment particulièrement bouleversant. Tout en évoquant son enfance et son adolescence avec son père, l'auteure évoque aussi toutes les figures familiales qui ont compté dans sa construction. L'écriture d'Emmanuelle Lambert permet véritablement de donner vie à toutes ces figures. le lecteur saisit le lien particulier qui unit le père à sa fille... mais alors pourquoi ce titre, le garçon de mon père?
J'ai lu avec beaucoup d'intérêt ce récit et je remercie NetGalley et les éditions Stock pour ce beau moment de lecture.
#Legarçondemonpère #NetGalleyFrance
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Dans cette autofiction, Emmanuelle Lambert retrace la personnalité de son père en suivant les six derniers jours de sa vie. J'avais choisi cette lecture grâce à ces deux phrases qui sont sur la quatrième de couverture :

Mélancolique sans le poids du pathos. Poignant et solaire.

Seulement, c'est bien de mort dont il s'agit, et je suis à l'âge où je vois partir les miens et mes amis et je n'ai pas eu le courage de lire les derniers instants de son père. C'est moi qui ai remis du « pathos » et ma sensibilité m'a empêchée de profiter du côté « solaire » pour le « poignant », j'ai été plus que bien servie, j'ai bien revécu mes proches qui ont récemment disparu avec des cancers en phase terminale.

Pour les lecteurs plus jeunes que moi et moins nostalgiques, je pense qu'ils auront plaisir à connaître ce père qui a mordu dans la vie et toutes ses nouveautés avec une force et une détermination peu communes. Avec trois amis scientifiques comme lui, ils ont été très actifs en mai 68. L'un est devenu médecin, l'autre mathématicien de génie et emporter par la folie et lui qui est au début de sa vie programmeur mais surtout le père de deux filles, l'auteure et Magalie sa cadette.

Le couple parental sera emporté par la tempête d'un divorce que la mère aura tant de mal à vivre, elle qui avait mis toutes ses forces dans la survie de cellule familiale beaucoup trop étroite pour ce père dont l'énergie était sans limite.

On sent que la narratrice a du mal à supporter cet aspect de la vie de son père, elle nomme sa nouvelle femme « l'épouse » il y a d'ailleurs un jeu sur les prénoms que j'ai eu du mal à comprendre, elle ne donne les prénoms que des personnes qui lui ont fait du bien mais ni de son père ni de sa mère.

Pour vous donner envie de lire ce livre, je dirai que son père m'a rappelé « les vieux fourneaux » . Je pense que vous pourrez alors sourire quand elle décrit sa façon de conduire et de faire du sport sans jamais prendre de leçons.
Lien : https://luocine.fr/?p=14497
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