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Critique de GeorgesSmiley


Atypique, malicieux et ironique. Voici un roman policier dont l'intrigue et sa résolution sont secondaires pour ne pas dire légères, mais là n'est pas le vrai sujet. Au fait, quel est-il, le vrai sujet ? Se moquer gentiment de la mode du polar scandinave, de ses enquêteurs abimés, dépressifs et empêtrés dans des déboires conjugaux ? Critiquer les lecteurs qui, ne voulant lire que des polars, passent à côté de tout le reste de la production littéraire, présente ou passée ? Egratigner la presse et les media qui ne vivent que de la misère du monde et des catastrophes, les éditeurs l'oeil toujours vissé sur leur compte de résultats, ou bien « le cirque médiatique (qui) le fatiguait. Un ministre de la Justice auteur d'un roman policier médiocre recevait plus d'attention qu'un poète de talent, et cinq minutes sur un talk-show étaient plus efficaces que des critiques élogieuses. L'écrivain timide et gauche, dépourvu de charisme et de bagout, n'avait même plus envie de publier un livre. Tout ce qui comptait, c'était d'être fort en gueule et bien de sa personne, surtout si l'on était une femme. Les écrivains se prêtaient à tout pour vendre leurs romans – lectures publiques, salons, foires – et on affichait même leurs portraits sur des posters ou sur les bandeaux qui entouraient leurs livres. Pas étonnant qu'il se sente un peu découragé. »
Le vrai sujet, c'est sans doute la poésie. A contrepied de Wallander, l'enquêteur chargé de démasquer l'assassin est heureux en ménage. Et, à ses heures perdues, il n'écoute pas des opéras mais écrit des poèmes. Quand à la victime, poète célèbre mais aux tirages confidentiels, elle a fini par se laisser convaincre de s'essayer à son tour au roman policier. le roman est bon, l'éditeur est ravi, les rotatives dopées aux amphétamines sont fin prêtes à tourner sans relâche, et le compte d'exploitation s'apprête à passer au vert autant que l'Irlande à la fin du printemps. Oui, mais alors, quid du poète maudit et intransigeant ? Un poète qui abandonnerait un instant la poésie pour ramasser un oeuf ou deux sous la poule aux oeufs d'or du polar scandinave, est-ce bien raisonnable, est-ce bien tolérable ? Et si c'était le mobile du meurtre ?
Bjorn Larsson aime la poésie et s'y essaye, sous la plume du commissaire, même s'il semble s'en excuser dans la postface. Il convoque, au cours de l'intrigue, un expert suédois et glisse, dès qu'il en a l'occasion, des vers d'auteurs célèbres, dont à ma grande confusion, je dois confesser qu'à l'exception de Rilke je ne connaissais même pas les noms. Son ambition est grande, transformer des joggeurs en lecteurs de poésie : « Si seulement tous ces gens désoeuvrés avaient lu de la poésie au lieu de sortir au grand air ! »
J'ai passé un bon moment de lecture et fini par découvrir qui a assassiné le poète mort qui écrivait un roman policier (j'avais bien une petite idée qui s'est révélée exacte mais le mobile m'échappait). Cela pour dire que l'aspect policier du roman, sans être exceptionnel, reste de bonne facture. Bien que n'ayant aucune compétence en matière de poésie, il me semble que cet aspect de la personnalité et de l'oeuvre de Bjorn Larsson est mieux illustré dans certains de ses autres romans dont je recommande vivement la lecture : le Capitaine et les Rêves, ainsi que le Cercle Celtique où ses descriptions marines sont de toute beauté. Ici, j'ai eu un peu de mal avec certains passages, un peu trop didactiques à mon goût. A découvrir pour sortir des sentiers battus.
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