L'empire brisé, tome 2 : Le roi écorché

Combien d'entre eux sacrifierais-je simplement pour porter un coup à son armée, pour y faire un gros troue?
La réponse était : tous sans exception.

- Tu dois traquer tes peurs, Gog. Leur mettre une raclée. Elles sont ton seul véritable ennemi.

Certaines vérités n’étaient pas bonnes à révéler. Certaines portes devraient rester closes.

Et s’entendre proposer quelque chose dont on n’a pas envie, c’est comme se voir servir du calmar épicé quand tout ce qu’on souhaite, c’est du bœuf et des pommes de terre. Ça vous coupe l’appétit. Toutes sortes d’appétits.

— Deux pièces d’or la bouteille. À ce prix-là, c’est que ça doit être bon, non ?
Je bus une petite gorgée. C’était le genre de breuvage tellement amer qu’il vous pelait consciencieusement la langue.

L’amour, quel que soit son objet, est une faiblesse.

J’ai appris à voyager dans les rêves. J’arpente les domaines du possible et de l’impossible, tout en gardant ma lucidité ainsi que la conscience de chaque partie de mon être. Ou parfois je vole, je nage, je galope. Le sentier du monde est une ligne, un fil unique qui traverse les vastes étendues du songe, et si je suis cette ligne, je réussis à discerner ce qui est réel au lieu de m’empêtrer dans l’imagination de personnes inconnues, croisées par hasard.

Il n’y a pas de victoire sans sacrifice.

Se déguiser ne signifie pas enfiler des vêtements pour ensuite appliquer des fards et du khôl avec une main d’artiste. Non, cela tient à votre façon de bouger. Naturellement, un uniforme adéquat, un menton factice, une cicatrice de bon aloi… tout cela peut vous être d’une grande aide en certaines circonstances, mais l’étape décisive, le premier pas… c’est très précisément ceci. La façon dont vous marchez. Avancez d’un air décidé, ou en tout cas incarnez votre rôle avec conviction. Si vous croyez vraiment que vous avez le droit de vous trouver là où vous êtes. Si vous évoluez avec assurance. Alors, même un accessoire aussi insignifiant qu’un chapeau aura autant d’effet qu’un déguisement complet.

Lorsque vous entamez une ascension, vous n’emportez que le strict nécessaire. C’est une bonne règle de conduite que la montagne vous enseigne sans rien demander en échange. On dit que le temps est un admirable maître qui, malheureusement, tue tous ses élèves. Les montagnes prodiguent un enseignement tout aussi admirable, et elles laissent parfois vivre un élève doué, ce qui ne gâche rien.
Elles vous apprennent à envisager le changement. En altitude, le temps peut passer de « resplendissant » à « exécrable » en un clin d’œil. Vous gravissez une pente douce pour mieux, une seconde plus tard, vous y accrocher comme si elle était votre mère, tandis qu’un vent d’est tente d’emporter votre carcasse gelée.