Loin, très loin de tout

Owen est adolescent en Amérique. Ce qui est loin d'être simple, déjà, quand on est aussi peu ordinaire que lui.
Il nous décrit un passage de sa vie, alors qu'il termine le lycée.
Owen n'est pas un ado ordinaire. Il est curieux, intelligent. Passionné de médecine et de psychologie. Et terriblement mal à l'aise avec les autres ados.
Il nous raconte comment il a rencontré une jeune fille, aussi peu ordinaire que lui, dont la passion est la musique. Et comment ils ont établi le contact, et se sont rapprochés.

C'est un livre qui s'adresse aux adolescents. Il est agréable et rapide à lire.
Ca ne veut pas dire pour autant que les situations ou les personnages sont simplistes, loin de là.
J'ai pris ce livre en souvenir du bon temps que j'ai passé, ado, à lire "Le sorcier de Terremer". Et pour voir ce que ça peut être, la littérature d'ados.
Bien sûr, aucune trace ici de magie, de dragons ou de monde différent du nôtre. Mais j'ai retrouvé cette intimité qu'Ursula le Guin crée entre le lecteur et le héros.
Franchement, à lire "Loin, très loin de tout", je me suis presque persuadée que j'étais un jeune garçon intellectuellement précoce, qui découvrait des correspondances entre la science et la musique, qui mûrissait petit à petit et qui découvrait l'amour.

Quand mon fils aura une douzaine d'années, si je le trouve avec ce livre entre les mains, ça me fera plaisir, et je m'en irais sans faire de bruit, en me disant qu'il est entre de bonnes mains!...

Adolescence et non conformisme.

Un joli petit récit d'une rencontre entre deux adolescents sensibles et un peu surdoués. Owen, promis à une carrière scientifique, rencontre Nathalie, au talent musical en devenir. Une relation s'installe, plutôt intellectuelle, entre ces deux jeunes gens, dont le besoin de communication et d'échanges trouve enfin son équivalent cognitif. de grandes questions d'aspect philosophique seront abordées alors, typiques de l'âge de l'adolescence, l'avenir, le sens de la vie, les relations humaines... Un bel ouvrage, teinté d'espoir... mais avec parcimonie.

Je connaissais Ursula K. le Guin sans jamais n'avoir rien lu de son travail. Terremer et ses suites, cycle de fantasy très connu et souvent cité comme un classique du genre, me faisait envie depuis plusieurs années : la lecture d'un dossier à ce sujet dans Bifrost 78 me décida à sauter enfin le pas. Cette femme, fille d'anthropologue, elle même érudite dans ce domaine et bien d'autres, qui se présente comme taoïste précoce et féministe tardive, me surprit alors par un style d'écriture poétique, plus proche du conte philosophique que de l'heroic fantasy traditionnelle ; aussi par la limpidité de ses intrigues ainsi que la cohérence de son système de magie — lequel repose sur le langage primordial, dans lequel le nom d'une chose est également la chose elle même — et la précision quasi scientifique dont elle fait usage pour décrire les civilisations de son archipel fictif (je pense notamment aux enfants de la haute mer, un peuple qui vit toute l'année sans terre en vue, sur d'énormes radeaux, ou à la vie monacale des femmes des tombeaux d'Atuan)...
J'ai découvert Loin, très loin de tout sur les étales d'une braderie de bibliothèque, alors que j'étais encore en pleine lecture de Tehanu, le quatrième roman de sa fameuse série. C'est le nom de le Guin qui m'attira, plus que l'objet en lui même : tout petit livre, édité par Actes Sud dans une collection jeunesse (Babel J), et dont la quatrième de couverture ne promettait rien de plus qu'une histoire d'amour adolescente. Une centaine de pages que j'envisageai sur le coup comme une pause, un petit moment de transition entre deux lectures de plus grande ampleur. Je n'imaginais pas qu'avec ce texte, j'allais trouver l'un des récits les plus ambitieux que j'aie pu de lire... (suite sur mon blog)
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Owen a 17 ans, et malgré tous ses efforts, il ne parvient pas à se fondre dans la masse, à aimer les mêmes choses que les garçons de son âge, à s'enthousiasmer pour la voiture que son père vient de lui offrir, à se réjouir de la vie toute tracée qui l'attend. Mais il ne se sent pas prêt non plus à se rebeller contre cette société qui ne lui permettra jamais de vivre ses rêves et de se réaliser ... alors il balance sans cesse entre choisir sa propre voie et se couler en douceur dans le moule qu'on lui présente. Lorsqu'il se retrouve par hasard dans le bus à côté de Natalie, une autre élève de son lycée avec laquelle il n'a jamais échangé plus de deux mots dans sa vie, il est loin d'imaginer que ce simple trajet commun va lui permettre d'être enfin lui-même avec un autre être humain, aussi compliqué que cela puisse se révéler au fil du temps.

On ne présente plus Ursula le Guin, auteur célèbre de science-fiction. Pour ma part, je me souviens avoir lu Terremer il y a bien des années, après avoir lu une nouvelle s'y rapportant dans un recueil. Mais je ne connaissais pas ses autres écrits (et elle écrit aussi des romans pour jeunes lecteurs), et je découvre une autre facette de son talent avec ce court roman centré sur la période si sensible de notre vie où nous ne sommes plus vraiment des enfants mais pas encore des adultes, cette époque où l'école est bientôt derrière nous mais où la vie "après" nous apparaît encore bien lointaine et mystérieuse. Ce moment si délicat où on découvre des sentiments et des relations qui vont nous marquer notre vie durant ...

C'est avec une grande délicatesse et beaucoup de musicalité qu'Ursula le Guin nous entraîne à la rencontre de deux jeunes gens, Owen et Natalie, qui savent ou ne savent pas ce qu'ils attendent de la vie, et qui découvrent ensemble le prix de leurs choix et de leurs décisions.

J'ai passé un excellent (mais bien court) moment en leur compagnie, même si j'ai regretté de ne pas connaître les pensées de Natalie puisque c'est Owen le narrateur de ce roman ... sans doute ont-ils éveillé des échos dans mon coeur ...
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Une pépite. Un roman court intemporel sur l'amitié et l'amour adolescence, sur la difficulté à trouver sa place, sur le conformisme et sur le passage à l'âge adulte. On y parle aussi invisibilisation des femmes, charge mentale et injonction de la mère au foyer et hypersensibilité chez les hommes. C'est court et avec peu d'action mais fort !