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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Avec Rupture, Simon Lelic nous plonge dans un roman policier anglais pas comme les autres. le lieu du drame est celui de l'Ecole où un jeune professeur d'histoire, Samuel Szajkowski, tue quatre personnes - trois élèves et une collègue - avant de se donner la mort. L'inspecteur de police Lucia May est chargée d'établir un rapport afin que l'affaire soit classée au plus vite, à savoir que le tueur était un fou, un monstre. Mais au fur et à mesure de son enquête, ce qu'elle découvre est d'une toute autre ampleur et l'affaire ne peut être classée si facilement. Sa découverte dérange sa hiérarchie qui l'écarte alors de l'affaire. Mais l'enquêtrice en fait fi, continue et donne à voir au lecteur une vérité dérangeante.

L'enquête repose sur les enregistrements des interrogatoires menés. Celui d'enseignants, d'élèves, de parents d'élèves dont l'enfant a été tué dans le carnage, celui du directeur du collège, Mr Travis, et de sa secrétaire. Les pièces à conviction sont alignées au fur et à mesure sous les yeux du lecteur, qui découvre, comme le dit Lucia, que "ce n'est pas toujours celui qui appuie sur la détente qui est responsable".

Dans ce roman policier, Simon Lelic brosse un portrait peu reluisant de la société anglaise contemporaine et en particulier de son système éducatif où règne la loi de l'omerta.
Mr Travis est une caricature : comme le veut le système britannique, il recrute lui-même ses enseignants. Cependant, il n'a pour eux que peu d'estime, comme il a peu d'estime pour les élèves et ses compatriotes en général : "La majeure partie de la population adulte de ce pays sait à peine compter ses orteils, en admettant qu'elle soit capable de regarder plus bas que son ventre pour les localiser. (...) Les enseignants (...) ne se préoccupent que d'eux-mêmes". Pour lui, ce qui compte, ce sont les mathématiques et les chiffres. Et c'est bien là le noeud du problème. Il n'a que peu d'estime pour l'humain, ce qui n'est pas sans conséquence lorsqu'on est chef d'établissement scolaire. Il accorde nettement plus d'importance à l'argent qui rentre et qui sort de son établissement, d'autant plus que son collège est en passe de recevoir des fonds privés. Alors autant que l'affaire soit classée plutôt que d'effrayer les investisseurs. D'autant plus que le collège a déjà des antécédents : Eliott, un élève persécuté par d'autres élèves, a été sauvagement agressé et finit par se suicider. Tout comme Samuel était persécuté par ses élèves qui n'ont pas hésité à lui casser une jambe ou à lui mettre un étron dans sa malette. A cela s'ajoute l'hostilité de son collègue prof de sport, "T.J." pour un motif bien futil : Samuel l'a pris pour un prof de latin, ce qu'il a été vécu comme une insulte! Un type stupide, méchant et aussi immature que les élèves dont il a la charge. Les autres enseignants, témoins des mésaventures à répétition de leur nouveau collègue ne feront rien. Par peur de Mr Travis notamment...

Dans son enquête et son travail en général, Lucia elle aussi est persécutée, victime du machisme de ses collègues, en particulier de Walter qui tente de l'intimider en l'agressant dans un parking, mais aussi de Cole, son boss, plus préoccupé de son herpès et de sa carrière que de faire jaillir la vérité.

Dans ce roman policier, le lecteur ne découvre pas un tueur psychopathe mais terriblement banal, normal, victime d'une surdose d'humiliations, de persécution mais aussi d'indifférence dans un système qui laisse peu de place à l'humain. Un roman effrayant que l'on n'oublie pas une fois refermé. Bien plus qu'un roman policier, c'est certain...

Je pense que l'on entendra reparler de Simon Lelic, dont c'est le premier roman publié en France
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Voilà un roman qui peut faire peur. À cause de sa couverture et de son résumé notamment, qui peuvent faire croire que l'on va se trouver face à une sorte de resucée du trop bien nommé Carnages, de Maxime Chattam. Mais, passé ce difficile seuil psychologique, on se trouve face à un roman autrement plus subtil et engagé. Ouf.

Le point de départ de cette histoire est donc un massacre dans un collège public londonien. Samuel Szajkowski, professeur d'histoire, a déboulé dans une réunion et abattu trois élèves et une enseignante avant de se suicider. L'inspecteur Lucia May, chargée de l'affaire, pourrait donc boucler rapidement l'enquête. Sauf que, si le coupable est identifié clairement, ce qu'elle découvre à propos de ce qu'ont vécu cet enseignant et certains élèves dans cet établissement scolaire la pousse, malgré sa hiérarchie qui voudrait classer l'affaire au plus vite, à trouver qui sont les responsables.

Malgré donc les apparences, nous sommes bien loin du thriller. Ce que nous donne à voir Simon Lelic se sont les mécanismes du harcèlement et leurs conséquences. Si Szajkowski est le fil conducteur, on découvre vite d'autres victimes : le jeune Elliott, et même Lucia May. Chacun y réagira ou y aura réagi d'une manière différente.
La structure du roman, qui alterne les témoignages bruts, à la première personne, des collègues et élèves de Szajkowski, et l'enquête, à la troisième personne, de Lucia, permet de dévoiler peu à peu la mise en place de ce mécanisme pernicieux qui existe autant par l'autoculpabilisation de la victime que par sa mise à l'écart par ses collègues ou camarades qui, par crainte d'être touchés par ricochet, par pudeur, par mépris pour la faiblesse ou par croyance en un certain ordre naturel des choses où les plus gros mangent les plus petits, se refusent à intervenir.

Ce qui se révèle à nous tout au long de ce roman, c'est aussi l'évolution de notre société où l'individualisme forcené vient s'appuyer sur le désir de maintenir un certain ordre de façade, amenant ceux qui pourraient régler les problèmes à les ignorer délibérément pour ne pas ternir l'image d'une entreprise ou d'une institution. Cette culture où chacun doit être un winner, quitte à écraser les autres ou à les regarder se faire écraser, et où l'incompétence, pour peu qu'elle soit recouverte d'un mince verni d'allégeance aux convenances, est récompensée. le personnage de T.J., le professeur de sport méprisé autant des élèves que des enseignants mais qui s'impose par une apparence de force et sa capacité à enfoncer les plus faibles, en est l'exemple-type. Plus encore que celui de Travis, le directeur du collège qui tente d'étouffer tout ce qui pourrait nuire à son établissement et se montre prompt à faire endosser aux victimes la responsabilité de leurs propres malheurs.

Voici donc un premier roman bien mené, fin là où le discours lénifiant pourrait être plus facile, et qui va vous faire passer un moment plutôt désagréable. Parce que la littérature, ça n'est pas que l'évasion.

Lien : http://encoredunoir.over-blo..
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Quand une enquêtrice cherche à savoir pourquoi un professeur tire sur des élèves avant de se suicider. Un livre très sombre qui alterne témoignages recueillis pour l'enquête et la vie plutôt tourmentée de la policière. Une ambiance lourde qui maintient le suspense jusqu'à la toute dernière page.
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Ce roman est une franche réussite. le personnage de Lucia May est extrêmement bien décrit. Cette jeune personne d'une trentaine d'année, qui sort d'une rupture amoureuse, laisse parler son coeur plutôt que son instinct professionnel. Devant les faits froids, marquants et dramatiques, elle y voit l'occasion de se remettre en cause, et par là même de remettre en cause le système, autant judiciaire que scolaire. Car toute la question du livre qui nous tient en haleine est simple : nous connaissons le coupable, mais qui est responsable ?

La structure et le style aident beaucoup à dévorer ce roman, tant tout est fait pour jouer sur les sentiments. Outre ceux de Lucia, Simon Lelic incorpore dans son récit les témoignages des gens interrogés, du directeur aux collègues de Samuel, des enfants à la soeur de Samuel. Ces chapitres sont très bien faits, sans qu'il y ait les questions de l'inspectrice, ce qui ne gène en rien la compréhension, mais rajoute une note dans la véracité du passage.

Il y a les personnages secondaires, très bien faits, bien vivants, qui ont tous une part importante dans le déroulement de l'intrigue, en particulier Walter le collègue de Lucia qui la harcèle sexuellement au bureau et qui la place dans la même situation que Samuel ou son ami avocat Philip qui lui rappelle de ne pas mettre d'émotion dans son travail, de se contenter d'analyser et reporter les faits.

Et puis, c'est une charge en règle contre l'éducation britannique (seulement ?) qui considère qu'un professeur a forcément l'autorité nécessaire face à ses élèves, et donc qu'il n'a pas besoin d'être conforté dans cette position; il y a les discours affligeants (c'est mon avis) du directeur qui avoue qu'il ne sert à rien de chercher à comprendre un élève perturbateur, qu'il faut lui laisser terminer sa scolarité et qu'ensuite il ira toucher ses indemnités de chômage; Il y a tous ces professeurs censés donner l'exemple, être ouverts, accueillants envers les autres, qui rejettent et martyrisent l'un des leurs parce qu'il est étranger, différent, froid, renfermé, solitaire, introverti, ces professeurs qui sont plus puérils et gamins que leurs propres élèves, jusqu'à en être des monstres responsables; il y a ce système que tout le monde est prêt à laisser mourir, au nom de l'opportunisme personnel.

Et derrière tout cela, il y a un homme et un drame. Cet homme dont on ne connaît ses émotions que par la façon dont les autres le voient, que par l'image dont Lucia s'en fait. Jamais il n'intervient autrement que par le discours d'un autre, mais on arrive à se brosser un portrait de cet homme tellement fier d'inculquer l'histoire à des élèves, qui avait le défaut de ne pas rentrer dans le format standard d'un professeur britannique.

Rupture est le premier roman de Simon Lelic. Cela en devient d'autant plus impressionnant. Vous l'aurez compris, Rupture de Simon Lelic est un livre tout en finesse et en subtilité à lire. Urgemment.
Lien : http://black-novel.over-blog..
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Comme son nom ne l'indique pas, Simon Lelic est un jeune auteur anglais dont Rupture est le premier roman paru en 2010. Un fait divers sanglant endeuille un établissement scolaire, lorsque Samuel, professeur d'histoire, prend pour cible ses collègues et élèves avant de retourner l'arme contre lui. Bien que tragique, cet événement ne devrait pas entraîner une enquête longue puisque l'assassin est identifié par des dizaines de témoins et que l'action de la justice s'éteint avec son suicide.


Pourtant Lucia May, inspectrice, dont on découvre rapidement qu'elle est en proie au harcèlement de ses collègues-flics masculins, souhaite rendre un rapport approfondi sur cette affaire, et c'est contre l'avis de sa hiérarchie, contre l'avis du directeur de l'école, qu'elle recueille des témoignages auprès de professeurs, élèves et parents d'élèves. Qui était Samuel ? Comment en est-il arrivé à une telle extrémité ? Etait-il un monstre ou comment l'est-il devenu ? Sans jamais vouloir excuser ses actes, Lucia veut néanmoins comprendre le processus qui les a générés. Peu à peu, émerge le portrait nuancé d'un jeune homme timide, introverti, évitant, intolérant aux frustrations, recruté parce que L Histoire est inscrite dans les programmes scolaires alors que cette matière apparaît inutile au directeur de l'école. Samuel devient rapidement l'objet de railleries, de harcèlements de la part d'apprentis tortionnaires, enfants de milieux aisés.


Simon Lelic décortique avec talent les mécanismes du harcèlement ; il montre comment des racketteurs, des persécuteurs peuvent sévir au sein d'institutions (police, écoles, entreprises), avec une indulgence coupable. En l'occurrence dans Rupture, le directeur de l'école, bien que parfaitement informé des comportements déviants à l'oeuvre dans son établissement, préfère les ignorer, craignant que les subsides privés alimentant son fonctionnement se tarissent, sous l'effet d'une mauvaise publicité.


Il s'agit d'un roman dont la forme se rapproche d'une enquête journalistique, pas ou peu de fioritures ou d'effets romanesques, une progression glaciale à mesure que sont recueillis par Lucia, sous forme d'enregistrements, les témoignages de ceux et celles qui ont connu Samuel. Une lecture salutaire, nécessaire, même si elle dresse le constat effrayant d'une société déréglée, la notre.
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Un beau jour, Samuel, professeur d'histoire d'un collège londonien réputé, entre en salle de réunion et se met à tirer avant de se suicider. Résultat : cinq morts. Qu'est-ce qui a pu pousser ce jeune homme de vingt-sept ans à commettre un tel acte ? Ce n'est pas vraiment ce que l'on demande à la détective Lucia May. Sa hiérarchie est claire : en cette année d'élections, elle ne doit pas faire de vague et le rapport qu'elle doit fournir doit se contenter de peindre le portrait de Samuel comme le psychopathe que tout le monde s'attend à ce qu'il soit.Pourtant, au fil des interrogatoires réalisés et retranscrits dans le roman, elle se rend compte que loin d'être un monstre, Samuel était un jeune homme qui a été poussé à bout. Des mois d'humiliations, de brimades, une hiérarchie qui, même informée, ne fait rien, des adolescents insolents et mauvais qui vont jusqu'à briser la jambe du professeur et des adultes qui ferment les yeux parce que c'est plus simple ainsi. Ce roman m'a beaucoup surpris parce qu'il pose la question de la responsabilité. Est-ce que cet homme qui a abattu des collègues et des enfants est vraiment entièrement responsable de leurs morts ? Et que dire de la direction du collège qui n'a rien fait pendant tous ces mois ? Cette direction qui avait conscience de ce qu'il se passait entre les murs de son établissement mais qui, pour préserver son image et ses subventions a fermé les yeux et rabaissé encore plus ce jeune homme jusqu'à ce qu'à bout de forces, complètement désespéré, il ait atteint son point de rupture et a ouvert le feu sur ses tourmenteurs.C'était un livre très touchant où le tueur est la principale victime. Un polar qui change, où la violence est présente partout, acceptée comme une norme et qui pose la question de la responsabilité des témoins. A force de fermer les yeux, ne sont-ils pas plus coupables que l'homme qui, isolé, désespéré, fini par craquer ?
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