« Pourquoi y a-t-il tant de gens qui commencent leur message par « c’est moi » ? Bien sûr que c’est toi. On a compris. Mais tu es qui au juste ? »
« Malheureusement, la vie n’est pas toujours à l’image de l’art. »
« Disparu, sans espoir cette fois, disparu comme s’il n’avait jamais existé. »
« La moitié du travail d’un bon flic consiste à poser les bonnes questions. »
Je refermai prudemment les yeux.
L’obscurité.
L’obscurité toute simple. Pas de sang, pas de survol, pas de lumières de la ville. Juste ce bon vieux Dexter debout, les yeux fermés devant son miroir.
Je les rouvris. Salut, l’ami, ravi de te retrouver. Mais où étais-tu fourré ?
Je pris une profonde inspiration et jetai un coup d’œil à mon reflet. Dans le miroir j’avais la tête de toujours. Une expression soigneusement maîtrisée. Des yeux bleus calmes et moqueurs, une imitation parfaite de la vie humaine. Mis à part le fait que mes cheveux rebiquaient comme ceux de Stan Laurel, je ne voyais aucun signe de ce qui avait court-circuité mon cerveau endormi et m’avait tiré du sommeil.
Je pus à nouveau réfléchir plus aisément. C’était en partie dû au calme et à la paix de l’eau. Mais c’était aussi parce que, dans la plus pure tradition maritime de Miami, la plupart des autres plaisanciers avaient l’air de vouloir à tout prix me faire la peau. Je trouvais ça infiniment reposant. Je me sentais chez moi. Ah, mon cher pays… Ces chers concitoyens…
Je secouai la tête violemment. Du calme, mon vieux. Pas de Dexter qui perd la boule, OK ?
Je mis les gaz à peine sorti du canal et me dirigeai vers l’entrée du chenal, puis vers le sud-est, en direction de Cape Florida. Le vent qui fouettait mon visage et le goût salé des embruns me remirent les idées en place, me donnèrent la sensation d’être propre et frais. J
Je guidai lentement mon Boston Whaler au-delà du canal, sans penser à rien, parfaitement zen, le moteur tournant au ralenti tandis que je passais devant les larges demeures, séparées par d’immenses haies et par des clôtures grillagées. J’adressai un grand geste machinal et un sourire éclatant à tous les voisins, qui prenaient l’air dans les jardins bordants les digues. Les enfants jouaient sur les pelouses impeccables. Papa et maman s’occupaient du barbecue, se prélassaient dans un fauteuil ou encore astiquaient le fil de fer barbelé, couvant leur progénitures du regard. Je saluai tout le monde. Quelques-uns me rendirent mon salut. Ils me connaissaient, m’avaient souvent vu passer, toujours enjoué, un grand bonjour pour tous. C’était un homme si charmant. Extrêmement gentil. Je n’arrive pas à croire qu’il ait pu faire ces choses-là…