Parfois, en grandissant, le temps passe et nous sommes obligés de jeter un coup d’œil en arrière. Et de tout remettre en question. Et alors, il est trop tard. Bien trop tard pour espérer réparer.
Certains hommes vouent leur vie à la justice ; ils se consacrent à l’étude et aux charges qu’ils endossent. Certains autres recherchent le pouvoir et l’influence ; ils visent les positions suprêmes, pour être capables de décider de notre avenir. D’autres encore apprennent à combattre et deviennent des guerriers légendaires aussi bien à la baguette qu’à l’épée. Ils sont toujours les premiers à se lancer dans la bataille, les derniers à la quitter.
Seuls les petits enfants, en se couchant chaque nuit, savent qu’il existe dans le monde des monstres capables de les détruire.
Nos aïeux pensaient qu’il existait d’autres mondes que le nôtre, d’autres dimensions que celles que nous voyons et ressentons avec nos cinq sens. Ils croyaient à l’existence d’êtres invisibles, plus puissants que nous, à la fois immortels et inhumains. Et ceux-ci n’existent pas seulement dans l’Au-delà, mais aussi dans le Néant, ce passage vide entre les deux mondes. Ils leur avaient donné des noms – et je ne vous indiquerai pas lesquels, parce qu’ils sont des centaines – mais l’un d’eux en particulier a toujours excité l’intérêt des ambitieux. Parfois, on l’appelle le Gardien des Portes, l’Être de Cendre et de Fumée, ou encore le Maître du Néant. Il ne parcourt pas les autres mondes que le sien, parce qu’il en ignore l’existence. Il est fait de vide. Il est à l’opposé de tout ce qui existe. De ce fait, il ne conçoit pas la vie – ni la nôtre, ni aucune autre forme. Sa nature même l’empêche d’en réaliser le concept.
Comme tous les gouvernements trop faibles, le ministère est handicapé par son sens de la justice. Il n’a aucun pouvoir contre des ennemis déterminés.