Les denisoviens se seraient reproduits avec les Homo sapiens puisque les analyses génétiques réalisées chez les sapiens originaires de Mélanésie et de Nouvelle-Guinée montrent la présence de gènes denisoviens. Force est de constater que l'évolution de l'homme moderne ne s'est pas faite à partir d'une seule ébauche, mais plutôt après plusieurs tentatives aveugles, dont une seule donna naissance à Homo sapiens, sans qu'aucun plan préalable ait anticipé le résultat.
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Ainsi distingue-t-on facilement le néandertalien d'Homo sapiens par leurs gènes respectifs, mais représentaient-ils vraiment deux espèces différentes ? La question reste posée dans la mesure où certaines populations de sapiens possèdent jusqu'à 2 % de gènes néandertaliens, entre autres le peuple français. Cette contribution néandertalienne au génome de l'homme moderne, très discrète, mais incontestable, montre que l'interfécondité a été possible entre Neandertal et Homo sapiens. Serions-nous devenus des Homo neandersapiens ?
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Avec ses 900 grammes de cerveau en moyenne, Homo erectus a inventé la société, c'est-à-dire le partage du travail, la domestication du feu, la cuisson des aliments et les technologies de l'argile. C'étaient encore la Terre et son climat qui commandaient les modifications de l'espèce humaine. Neuf âges glaciaires s'étalent entre — 900 000 et — 15 000 ans ; signes encore visibles aujourd'hui des oscillations climatiques lentes qui ont perturbé la surface du globe.
Arrivés en Europe il y a plus d'un million d'années, les premiers hommes, y compris le fameux Cro-Magnon, se sont retrouvés pris au piège par les glaciations. Ces longues périodes glaciaires avaient modifié profondément les paysages, le contour des terres et le niveau des mers ; un pont continental de plus de mille kilomètres reliait alors l'Alaska et la Sibérie.
L'archéologie paléolithique a mis au jour quelques-uns de ces lointains mystères qui jalonnent ces périodes si fécondes en événements capitaux qui ont scellé le destin de l'homme moderne.
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L'histoire du cerveau humain se confond avec l'odyssée de notre espèce. Celle-ci apparaît, il y a environ deux cent mille ans, porteuse d'un cerveau moderne qui n'a pas évolué depuis. Qui sont ces hommes qui apparaissent au début de l'ère quarternaire ? Mâles ou femelles, ils vont peau nue et chevelus. « Lui » a appris très vite à protéger son pénis des regards des autres et des offenses des sentiers épineux. « Elle » exhibe volontiers ses seins pendulaires et ses fesses charnues, blasons de sa féminité. Ils n'ont ni honte ni pudeur ; les vêtements viendront plus tard avec la morale et la loi. Aucune émotion ne leur est étrangère, mais ils sont avant tout doués de compassion, caractère issu de la sélection naturelle, fondement sur lequel l'espèce s'est développée. Jamais ces êtres aux canines courtes et dépourvus de griffes n'auraient pu survivre sans l'entraide et la capacité de pénétrer l'âme d'autrui pour y lire des intentions ...
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Introduction
« L'homme et son cerveau, quelle affaire ! »
Anonyme
Quelle merveille ! devrait-on dire. Le cerveau d'un humain n'appartient qu'à lui, mais il n'en éprouve pas la présence, de la même façon qu'il ne sent pas sur son corps un costume si bien ajusté à ses mesures qu'il en est comme oublié. La tête est parfois lourde et douloureuse mais, paradoxe, le cerveau, organe de toutes les sensations, est en lui-même insensible : une masse molle qui s'offre sans douleur au bistouri du neurochirurgien. Taillé sur un patron qui est le même pour toute l'espèce, il exprime l'être propre de chaque individu, autrement dit de son âme — avec toute la prudence qui convient à l'emploi d'un mot chargé de métaphysique.
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