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3,63

sur 90 notes
Plusieurs mois désormais que Kerry Salter n'est pas rentrée chez elle, à Durrongo, sa ville natale qu'elle a toujours voulu fuir, plus précisément son frère, Ken, paresseux alcoolique qui rejette la faute sur toutes et tous et maltraite psychologiquement son fils, bien décidé à se détourner de son paternel par une plongée sans fond dans les abysses des jeux sur PC, et sa mère, Pretty Mary, qui n'est plus la même depuis la disparition de Donna, la cadette, il y a désormais de nombreuses années. Mais il était temps pour Kerry de se mettre au vert, faisant la route sur une Harley-Davidson volée et transportant un sac rempli de dollars, résultat d'un cambriolage qui a mal tourné - enfin surtout pour sa petite-amie qui a, elle, été arrêtée. Alors le coup de fil maternel pour annoncer que Pop, le grand-père, n'en avait plus pour longtemps, tombe à pic pour un retour tonitruant au pays, avec en prime une petite discussion avec trois corbeaux qui donne le ton du retour au nid.
Pop, - ce que nous conte le prologue -, c'est Owen Addison, celui qui a combattu fièrement en 1943, celui qui ne s'est pas couché pendant un match de boxe, alors qu'il en connaissait déjà les conséquences, parce que non, un aborigène, bien que plus agile et puissant que son adversaire, n'a pas le droit de gagner un match contre un blanc.

Tant le prologue, qui nous présente Pop au faîte de sa gloire, que les premiers chapitres qui nous content le retour de Kerry chez elle, et les conséquences de ce retour, sur la famille, mais aussi sur elle-même, nous mettent devant le fait accompli : ce roman ne sera pas tendre à lire, s'inspirant de toutes les violences subies à partir de la colonisation anglaise de l'Australie, vécues par l'autrice ou des membres de sa famille, retrouvées dans des archives historiques, issues de récits oraux aborigènes - ce qu'elle précise en introduction -.

La vie est en effet rude, et l'a toujours été, pour les Salter, depuis qu'Ava, l'arrière-grand-mère, enceinte, s'est fait tirer dessus alors qu'elle tentait de s'échapper des mains de son "patron", survivant miraculeusement aux balles et à sa chute dans la rivière qui annonce une île, qui deviendra du coup familiale et qui portera son nom. La misère est omniprésente, les coups du sort aussi, mais c'est sans misérabilisme, et surtout avec beaucoup d'humour, de gouaillerie, de légèreté dans les moments les plus graves, de péripéties menées tambour battant, à l'image même de Kerry, que l'autrice nous décrit L Histoire aborigène australienne, des exactions, encore et toujours - c'est désormais l'île d'Ava qui risque d'être spoliée par le maire de la ville, et qui réunira la famille dans un combat contre le colonisateur blanc qui l'a toujours spoliée -, et des manoeuvres mises en place pour les déjouer ou y résister envers et contre tout.

C'est un roman riche, à l'énergie fulgurante, aux personnages attachants dans leur anti-héroïsme, aux piques cinglantes et pince-sans-rire qui critiquent sans ambages la colonisation australienne d'hier et ses conséquences, toujours d'actualité, sur les aborigènes, très agréable à lire malgré la dureté des évènements racontés - qui plus est lorsque l'on sait que la majorité des évènements se sont réellement produits -

Je remercie les éditions du Seuil et Babelio de m'avoir permis la découverte, et de Melissa Lucashenko, et de la nouvelle collection "Voix Autochtones" qui est plus que prometteuse. Je vais lire sous peu le premier roman publié dans celle-ci, Cinq petits indiens, pour confirmer, j'espère, cette première excellente impression.
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Kerry Salter, jeune femme d'origine aborigène, vit dans le Queensland loin de sa famille. Sa vie est décousue. Elle a connu la prison pour femmes et n'a pas la langue dans sa poche. Elle ne craint rien ni personne, circule à moto et se pose là où bon lui semble, quand bon lui semble. Soupçonnée de cambriolage, elle fuit et retourne dans sa ville natale qu'elle ne pensait pas un jour retrouver. Avec pour seuls bagages son blouson et sa Harley, elle prend la route de Durrongo, direction le passé, les souvenirs, l'ennui et retrouvailles avec une famille un peu originale.

Je remercie Babelio et les éditions du Seuil pour cette lecture.

Avec ce livre, je découvre la nouvelle collection de la maison d'édition dédiée aux peuples autochtones, peuples premiers, dont la mémoire et la voix ont longtemps été privés. L'autrice est d'ailleurs elle-même une écrivaine bundjalung de la côte est de l'Australie. "Celle qui parle aux corbeaux" est le deuxième roman publié aux Voix Autochtones.

L'histoire nous conduit tout droit dans le bush australien, en terre aborigène. Ce lieu fait partie de l'histoire et de la culture des tribus autochtones, premiers êtres installés sur le sol australien avant l'arrivée des colons blancs d'Europe.

Kerry a quitté les lieux pour ne plus jamais y revenir. Pourtant, des circonstances la ramènent chez elle. C'est ainsi que l'on découvre sa famille. Elle ne va pas s'ennuyer. de plus, elle apprend que le maire de la ville a l'intention de construire une prison à Ava's Island, l'île de ses ancêtres et terre sacrée qui a servi de refuge dans le passé.

Le retour de Kerry dans les lieux de son enfance est aussi l'occasion d'en apprendre un peu plus sur l'histoire de ce peuple. Sont ainsi successivement évoqués les premiers nomades, la colonisation, le racisme, le déracinement, la violence, le vol d'enfant, et l'alcoolisme.

"Celle qui parle aux corbeaux" est un roman qui aborde différents thèmes. On y ressent de la mélancolie à l'évocation des drames et des événements du passé. Il y a des regrets, des non-dits puis des révélations. La nature est également très présente. L'île a une place à part entière. Elle apporte sérénité et apaisement, son "agression" fait l'objet d'un conflit sérieux entre la famille Salter et la commune.

Une très belle découverte pour ce roman qui est lauréat du Miles Franklin Literary Award, le Prix littéraire australien.

Lien : http://labibliothequedemarjo..
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Voici mon retour de lecture sur Celle qui parle aux corbeaux de Melissa Lucashenko. Il fait partie de la collection Voix autochtones des éditions Seuil.
Kerry Salter a passé sa vie à esquiver deux choses : sa ville natale et la prison.
Sa dulcinée y croupit d'ailleurs depuis quelque temps. Armée de sa grande gueule et de sa rage, elle lutte contre les inepties du monde.
Alors que son père est sur le point de mourir, elle doit se rendre au plus vite à son chevet. Chevauchant sa Harley à travers le bush, elle revient dans le foyer familial et apprend que la terre de ses ancêtres est menacée par un projet de construction d'une prison.
Tandis que le combat s'intensifie pour arrêter le projet, de vieilles blessures s'ouvrent.
Celle qui parle aux corbeaux est un roman qui nous emmène dans le bush australien et dans la vie d'une famille : les Salter.
Il nous permet de découvrir l'Australie de nos jours, avec l'importance de la place occupée par les aborigènes. Ces derniers doivent encore et toujours lutter pour récupérer leur héritage perdu. Leur vie n'a jamais été facile et pour que cela change, il faut se battre, encore et encore..
J'ai aimé suivre cette famille animée par un besoin viscéral de faire la paix avec leur passé.
C'est un roman dur sur un peuple mal aimé, les aborigènes.
C'est le second roman que je lis de cette collection Voix autochtones et je suis ravie de la découverte.
J'avoue ne pas avoir envie d'en dire plus, c'est un ouvrage qui se lit plus qu'il ne se raconte.
Il m'a touché et j'ai adoré ma lecture. Je vous le recommande et le note cinq étoiles :)
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Mélissa LUCASHENKO. Celle qui parlait aux corbeaux.

En préambule, je remercie sincèrement Babelio et les éditions « Voies Autochtones » du Seuil, pour l'envoi de ce roman. Ce livre est présentée avec une belle couverture, très colorée et très explicite sur le contenu. Tous les totems sont présents. Cette illustration est signée Michaël CAILLOUX. Toutes mes félicitations.

Une belle immersion en Australie, au pays des aborigènes, au sein d'une population délaissée et dont les autorités locales n'ont de cesse de s'approprier leurs terres. Ce roman est divisée en deux grandes parties, avec une introduction. En 1943, Owen Addison, un sang-mêlé, gagne un combat de boxe contre un blanc Johnny Corbett. Suite à cette victoire, il subit un cruel châtiment, qui le hantera jusqu'à sa mort. Il construit une famille.

Pretty Mary, veuve, fille de Owen dit Pop, lui apporte tous les soins dont il nécessite. Cependant, il est âgé et la vie le quitte. Prévenue de la mort imminente de leur grand-père, Kerry Salter, sa petit-fille fait un retour au pays, juchée sue une belle moto, une Harley Softail, dernier modèle, vraisemblablement volée, nantie d'un vulgaire sac de sport bleu. Elle se dirige vers Durrongo, là où vit sa famille. Son frère Ken, alcoolique et sans emploi vit des allocations versées par l'état, et des paris hippiques que joue son grand-père. Elle a un autre frère, dit Black Superman, ce dernier a bien réussi dans sa vie professionnelle : il habite en ville et occupe un bon emploi. Donna, la soeur aînée a disparue il y a presque vingt ans. Sans doute est-elle décédée, noyée. Sa mère Pretty Mary, affirme qu'elle est toujours vivante. Les cartes le lui ont révélé, elle pratique la chiromancie pour assurer l'entrée d'argent, dévoilant l'avenir à sa clientèle.

le retour de Kerry plonge la communauté au sein de leur devenir. En effet, la jeune femme va devenir une militante de la cause aborigène. Elle a surpris une conversation entre le maire de la ville, Jim Buckley et un agent immobilier. La municipalité désire construire une prison sur les terres allouées, il y a bien longtemps aux aborigènes, et c'est là que reposent les aïeux. Ils ne pourront plus communiquer avec les âmes de leurs défunts ! La famille de Kerry va donc tenter de faire échouer ce projet. Une énorme surprise : alors que la jeune femme veut louer un bien à Durrongo, elle est accueillie par … sa soeur Donna. Et de rebondissements en rebondissements, la famille resserre ses liens. Parviendra-t-elle à faire obstruction au futur projet d'établissement pénitentiaire sur la terre de leurs ancêtres ? Quels sont donc les raisons de la fuite de leur domicile des deux filles, Donna, puis Kerry, à la fin de leur adolescence ? Pourquoi Donna n'est-elle jamais revenue voir sa famille et a-t-elle pris une nouvelle identité, construit une nouvelle vie ? Quels secrets se cachent derrière ces fuites ? La justice sera-t-elle rendue ?

Cette narration nous immerge dans la culture aborigène, le racisme, les relations humaines entre les races, les croyances populaires liées à cette civilisation que l'homme blanc, le whitefella veut absolument démanteler, à tous prix, la jugeant décadente. Peu importe les moyens utiliser pour plonger ce monde révolu à leurs yeux et il faut donc s'orienter vers le progrès. La lutte entre les blackfellas et les whitefellas est présente, même au sein d'une même famille. Les relations entre tous, sont sujettes à la différence de la couleur de la peau, selon le degré de métissage.

Mélissa, dans ce récit remplit le rôle de l'avocat, défenseur du droit de l'homme, quel que soit sa couleur, sa religion. Elle nous plonge dans la culture aborigène, décrit les coutumes des ancêtres, leur amour pour la nature, la faune et la flore. Ces éléments doivent être respectés. le rôle dévolu au requin, dans ce roman, marque la notion de respect du aux animaux. Il en est de même pour le discours tenu par Kerry avec les corbeaux se disputant une proie. C'est cet épisode qui donne le titre de cet ouvrage. Je vous conseille de lire ce livre. Vous approcherez la civilisation des aborigènes en Australie. Un pays neuf mais qui n'est pas épargné par les forces du mal, introduites par les whitefellas… Je remercie encore Babelio et « Le Seuil » pour m'avoir offert ce livre, un très bel instant de lecture, dépaysement idéal. Bonne journée et belle lecture.
( 04/04/2023)

Lien : https://lucette.dutour@orang..
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La nouvelle collection du Seuil « Voix autochtones » propose avec une magnifique couverture de donner la parole à tous les Peuples Premiers et publie le dernier roman de Melissa Lucashenko, auteure aborigène d'Australie.

Le roman est centré sur une jeune femme noire, Kerry Salter, qui après avoir évité la prison et fui sa famille pendant des années, est forcée de rentrer chez elle dans le pays de Bundjalung pour faire face à une crise familiale impliquant l'héritage de ses ancêtres et la confiscation des terres. Militante pour les droits aborigènes, l'auteure n'hésite pas à dénoncer les politiques d'aménagement du territoire qui refusent de tenir compte des droits ancestraux. Elle n'hésite pas à se moquer des Blancs, rebaptisés "sauvagesnormauxblancs" ou "whitefellas" à qui elle reproche de n'avoir ni culture ni bon sens.

Pour autant, le portrait de famille est sans concessions. Dans le rôle de la mère, Pretty Mary, une ancienne alcoolique qui tire les cartes au marché et mène sa famille à la baguette. L'un des frères est alcoolique et très violent, la soeur aînée a disparu à l'adolescence, le neveu est anorexique et va de plus en plus mal.
Lorsque Kerry rentre au village parce que son grand père est mourant, elle n'a pas l'intention de s'attarder, sachant que " ce putain d'endroit était déjà maudit au delà de tout remède".
Toutes les familles aborigènes connaissent ces malédictions : racisme et pauvreté. Racisme d'autant plus visible lorsque l'on est noir, mais tout aussi agressif si on a la peau plus claire. Et la pauvreté qui fait vivre des familles complètes dans des maisons délabrées et des caravanes, rend la promiscuité plus difficile à supporter et engendre de nombreuses violences.
Les femmes sont les premières victimes de ces violences et il leur faut faire preuve d'une forte personnalité pour y échapper. Kerry, en tant qu'homosexuelle, doit encore plus s'imposer, auprès de son frère mais aussi de sa propre mère qui privilégie systématiquement ses fils.
Dans sa note, Melissa Lucashenko précise :" pour que le lecteur n'aille pas penser que le portrait dressé par ce livre de la vie des Aborigènes est exagéré, j'ajouterai que les membres de ma famille élargie ont subi au moins une fois dans leur vie la plupart des faits de violence évoqués dans ces pages. "

Si Kerry reste finalement au village après l'enterrement du grand-père, c'est en partie en raison de la beauté de la nature et de l'attachement aux terres familiales. Elle doit se battre pour empêcher la construction d'une prison au bord de la rivière, mais elle est aussi envoûtée par cette nature que l'auteure décrit avec passion. Ces paysages, la faune et la flore, sont traversés par des intrusions de réalisme magique, notamment avec les corbeaux et le requin, qui enchantent les habitants. de la même manière, le choix de l'auteure d'employer des termes aborigènes et de ne pas ajouter de lexique, ajoute de l'exotisme et du mystère à cette atmosphère, comme bercée par le son du didgeridoo.
Le bush, la rivière, les arbres et les animaux aux noms étranges soulignent la solidarité d'une communauté capable de se rassembler, au-delà de toutes les violences précédemment évoquées, pour célébrer une appartenance.

Merci à Masse critique privilégiée et aux Editions du Seuil pour cette belle découverte.
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MERCI aux Éditions du Seuil [collection Voix Autochtones] qui m'ont fait parvenir CELLE QUI PARLE AUX CORBEAUX dans le cadre d'une opération Masse Critique.
La couverture est très réussie, colorée et engageante ; une baleine, des corbeaux, des essences d'arbres exotiques, un requin Bouledogue, des symboles graphiques aborigènes, une Harley Davidson…. Mais indiscutablement, quelque chose de plus grand que notre quotidien semble se nicher entre ces figures totems.

Kerry, un sacré brin de fille toujours en délicatesse avec la justice, débarque dans le bourg de Durrongo avec ses grosses bottes de cuir et sa Harley pétaradante qui fait sa fierté et son honneur. Elle fait halte à la sortie du bourg tandis que l'injurient trois corbeaux dédaigneux envers cette stupide blackfellah qui semble s'être trompée de route…
Rien, rien, RIEN de se qui se produit ensuite n'aura de conséquence ; de la bête la plus petite à l'arbre le plus grand, du terrible serpent brun aux corbeaux croassants, des sables antédiluviens à l'air chargé de bonnes et de mauvaises nouvelles, tout aura un impact dans la suite des évènements.
Ainsi va la vie dans le bush.

Le livre, dédié à son frère qui plongeât dans une rivière pour lui sauver la vie, commence fort et se poursuit à « tombeau ouvert », au sens propre comme au figuré.
En préambule le rappel d'une affaire issue des archives d'audiences criminelles d'une Cour de District où on apprend qu'une fille aborigène [Christina Copson] a été inculpée pour avoir tiré sur son agresseur qui tentait de la violer sous le seul prétexte qu'elle n'était, selon lui, qu'une gin, c'est-à-dire une « trainée aborigène » et qu'il avait bien le droit d'en faire ce qu'il voulait (sic)… Dans la confusion, le déni ou la provocation, la Justice – comme on le sait aveugle – semblant préférer mettre tout le monde sous les barreaux plutôt que de paraitre laxiste, a punis l'un et l'autre.
Melissa Lucashenko met aussi en garde le lecteur quant à la violence de certaines actions évoquées ici et là qui pourraient paraître très exagérées et qui pourtant furent tout à fait réelles ; le livre repose sur des faits ayant été vécus soit par des membres de sa propre famille – [ils] ont subi au moins une fois dans leur vie la plupart des faits de violence évoqués dans ces pages – soit tirés d'archives historiques, soit encore véhiculés par l'histoire orale aborigène.

Ce roman puissant est basé sur l'injustice faite aux Aborigènes depuis la spoliation de leurs terres par l'Empire Britannique dès 1770, alors que le lieutenant James Cook prenait possession des deux tiers de l'Australie pour la raison que l'île-continent paraissait inoccupée. Par la suite, la privation de nationalité aux aborigènes, la substitution des enfants arrachés à leurs mères et placés dans des orphelinats, ou la destruction de sites aborigènes par des sociétés minières ont poursuivis l'oeuvre destructrice…
En 1847, un certain E.W. Landor déclarait : « Nous nous sommes emparés de ce pays, nous avons abattu ses habitants, jusqu'à ce que les survivants aient jugé sage de se soumettre à notre autorité. »

On vola la terre, puis on s'empara des jeunes femmes, des jeunes enfants…
On piétina des sols sacrés, des symboles, des évidences…
On nia une culture, une langue, des actes innommables.

Ce beau roman mérite d'être lu. C'est aussi un voyage pour l'âme, en communion avec les Forces du Vivant.


Comme le chante MIDNIGHT OIL dans BEDS ARE BURNING :
Out where the river broke the Bloodwood and the desert oak (Là où la rivière s'est arrêtée, le Bloodwood et le chêne du désert)
Holden wrecks and boiling diesels steam in forty five degrees (Les épaves d'Holden et les diesels bouillants grésillent à quarante cinq degrés)
The time has come To say fair's fair to pay the rent To pay our share (Le moment est venu de dire qu'il faut être juste, payer le loyer, payer notre part)
The time has come a fact's a fact It belongs to them let's give it back (Le moment est venu ; un fait est un fait, cela leur appartient, allez, rendons-le.)
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Le sujet me tentait, le résumé m'ayant alléchée lorsqu'on m'a proposé de le recevoir dans le cadre d'une masse critique Babelio. La couverture est sublime et l'objet livre très réussi. Concernant le texte, alors là, ce fut pour moi une autre histoire : un rendez-vous manqué ! J'ai lu, abandonné puis repris pour finalement abandonner à nouveau. Impossible de me laisser emporter par cette histoire. Les personnages ne m'ont pas touchée (l'héroïne est franchement revêche), l'écrit tourne en rond sur un fond de récit éculé. Les mots sont crus à en devenir lassants. Bref, j'ai reposé le livre vraiment déçue et j'en suis désolée.
Lien : https://aufildeslivresbloget..
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Une petite virée en Australie, ça vous dit ?
Attention ça secoue. Ma dernière incursion de l'autre côté du globe datait du 1er confinement durant lequel j'avais lu Cul de sac de Douglas Kennedy, certes déjanté mais dont l'humour ne m'avait pas totalement convaincue. J'en avais déduit que ma méconnaissance du continent océanique et de sa culture m'avait empêchée de saisir les subtilités du récit et toutes ses finesses.
Il y a plusieurs années j'avais aussi lu La Dernière valse de Mathilda de Tamara mckinley que j'avais qualifié de beurk seller. C'est vous dire mon enthousiasme.

Alors quand masse critique m'a proposé cette lecture je me suis dit banco ! On repart dans le bush faire mieux connaissance avec les autochtones et se faire enfin une belle lecture australienne.

Hélas encore une fois la mayonnaise n'a pas pris. J'avoue avoir même lutté pour arriver au bout. Il y a la truculence des personnages mais pas vraiment de connaissance de leurs us et coutumes. C'est trop survolé, comme si le lecteur connaissait déjà implicitement les termes aborigènes et sa culture.
La famille, le racisme et l'écologie sont les trois thème principaux, qui s'enroulent au fil des pages comme un serpent australien et qui déplaçant le sable, dévoile les secrets de famille les failles dans ses fondations qui la fragilisent.
On tourne quand même toujours un peu en rond dans cette famille qui s'englue dans ses souvenirs et qui a du mal à avancer, entre petits boulots, grandes débrouilles, petites galères et grands traumatismes.
Mention spéciale toutefois pour le chien Elvis qui a une belle place, ainsi que l'île enchantée. Et si c'était ça le véritable sentiment écologique : considerer la nature comme faisant partie de l'identité d'une famille ?
Hélas comme on est à une époque où il faut sauver la planète : il faut sauver la planète et empêcher que l'île enchantée des aborigènes soit transformée en prison par les méchants blancs. Ce n'est même pas au sens figuré. C'est mignon mais un peu facile quand même. Côté scénario, on ne dépasse pas le niveau plutôt très basique d'Avatar…
Bref, pas de coup de coeur australien de mon côté et la déception de ne pas avoir un peu plus de culture générale aborigène. A part les kangourous, les didgeridoos, je reste assez inculte.

Alors, faut-il le lire ? Euh je le prête si vous voulez, mais je ne garantis pas le coup de coeur, loin de là.
Je suis finalement plus proche des irlandais…
Pour la culture australienne j'avoue avoir un faible pour le film romantico-cul-cul Australia. Mais je ne suis pas contre des suggestions de bonnes lectures de cette partie du globe…à vos commentaires ! Merci
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Nous voici en 2018, au fin fond d'un bled paumé, dans la Nouvelle-Galles du Sud, dans le bush australien. Kerry, 34 ans, revient chez sa mère après en être partie 17 ans plus tôt et n'y être que rarement retournée. Son grand-père est en train de mourir et elle est recherchée par la police pour vol.
Elle retrouve sa mère, qui se donne du courage en tirant les cartes, son frère aîné, rongé par la rage, le fils de celui-ci anorexique. A l'occasion de la cérémonie funéraire, elle retrouve également son autre frère qui est devenu fonctionnaire à Sydney. Au-dessus de cette famille aborigène, plane l'ombre de la soeur aînée, Donna, disparue alors qu'elle avait 16 ans, sans savoir si elle est morte ou pas. C'est alors que le maire blanc de la ville décide de vendre des terrains de la commune, sacrés pour la famille aborigène, pour construire une prison. Elle ne peut accepter ça.
L'auteure nous propulse dans un monde qu'elle connaît bien puisqu'elle est elle-même aborigène et dans une famille foutraque, atypique, dysfonctionnelle où la violence est le moyen de communication privilégié entre les adultes mais aussi entre les adultes et les enfants.
Elle nous fait découvrir ce qu'a pu être et l'est encore la vie des aborigènes sous la férule des colons blancs qui se sont accaparé leurs terres, les terribles conséquences individuelles et collectives de la violence subie par des générations. le racisme est bien sûr central dans ce roman : des blancs vis-vis des aborigènes et inversement avec, parfois, l'ambivalence de ceux qui sont exploités et veulent ressembler à leurs exploiteurs afin de sortir de leur condition.
La nature et les animaux sont très présents et sont un élément constitutif de la culture aborigène, les êtres humains s'intégrant à la vie sauvage sans la détruire et y retournant après leur mort.
Ce roman est foisonnant, dépaysant, débordant de vie, d'énergie mais aussi de rage. Il suinte la misère, le désespoir, l'échec mais laisse entrevoir de la lumière à la fin.
Le style est cash, le langage parlé, authentique, parfois ordurier sans que cela soit sur-joué, sans fioriture. J'ai regretté que les nombreux mots dialectaux, qui confèrent de l'authenticité aux dialogues, n'aient pas été expliqués en bas de page même si, pour certains, à force de les croiser dans différents contextes, on finit par en saisir le sens.
Une belle découverte que je dois à Babelio à travers une masse critique privilégiée et aux éditions Seuil que je remercie pour m'avoir emmenée là où je ne me serais peut-être pas aventurée.
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J'aime déjà beaucoup cette collection toute nouvelle, que ce soit à cause des thèmes (les voix autochtones permettent de connaître une autre facette de l'histoire que celle racontée ordinairement) ou des couvertures que je trouve magnifiques. Quand j'ai vu cet ouvrage, j'ai pensé que c'était un auteur d'Europe de l'est et quand j'ai compris que c'était une auteur aborigène, dans un texte en plus traduit par David Fauquemberg (dont j'avais énormément apprécié le Nullarbor sur le même thème), je n'ai pas pu résisté plus longtemps et je me suis plongée dans l'histoire.

L'auteur bundjalung nous entraîne dans la petite ville (imaginaire) de Durrongo en Nouvelle Galles du sud et nous fait entrer de plein pied dans l'intimité de la famille Slater, famille aborigène où la violence règne en maître dans les relations familiales, violence du langage et violence physique. La langue exprime très bien cette colère qui semble inhérente aux protagonistes, que ce soit l'héroïne Kerry, son frère Ken ou tous les personnages qui gravitent autour d'eux et qui tient le pathos éloigné de l'intrigue.

Le but n'est pas de plaindre les personnages mais bien de montrer la résilience d'une culture anéantie par la colonisation qui a non seulement accaparé les terres, mais séparés les enfants des parents et chercher purement et simplement à anéantir la culture aborigène au nom de la civilisation. La phrase dite par Pretty Mary est emblématique de ce contexte : “Faudrait que vous leur appreniez cet aspect-la, Nunny. Comment envahir les pays des autres et les assassiner, en appelant ça la civilisation.”

Le rapport à la Terre et à la nature est aussi très bien décrit, les seuls moments de calme étant ceux passés sur l'île “sacrée”, île spectatrice des hauts faits de leur grand-mère Ava qui a permis au clan d'exister aujourd'hui. Permettant de démontrer l'antinomisme entre la propriété individuelle occidentale et lien spirituel à la terre des aborigènes, même pour une famille qui ne connaît plus vraiment sa culture..

La résilience passe par la communauté qui peut se moderniser (“Voici donc qu'un homme ouvertement gay se voyait désigné comme le successeur de Pop dans une ville poussiéreuse du bush dirigée par des péquenauds blancs corrompus”), s'ouvrir par la lutte militante (en particulier pour la récupération des droits fonciers), en dépassant et réinventant la tradition. C'est un livre qui appelle à vivre ensemble, sans oublier les souffrances et les injures, la colère et qui rappelle que les solutions trouvées par l'homme blanc ne sont pas transposables. La tout dans une langue très vive et colorée, tout sauf reposante à part dans les moments de grâce passés sur l'île.

L'important est bien la transmission et la ré-appropriation de leur culture par la famille Slater, seule réponse aux souffrances psychiques et au futur incertain : “Si mamie Ava avait encore été là, il aurait peut-être appris à appeler [les baleines] depuis quelque promontoire de la côte, songea Kerry. Il aurait peut-être appris leurs chants particuliers et tout ce qu'il fallait savoir sur elles, mais oncle Richard, qui vivait à Lismore, leur avait juste transmis l'existence de ce totem, et le nom tribal de l'animal. Il revenait à Donny de décider ce qu'il allait en faire au XXIème siècle. Car “Mamie Ava était le lien : la dernière païenne de la famille à parler couramment la langue, avant que l'Église ne débarque et n'enfonce à la place le Notre Père dans la bouche d'une mamie Ruth de douze ans.”

J'ai deux petits bémols: j'aurais aimé que la partie un peu “fantastique” soit plus développée, les membres du clan étant capable de parler à leurs animaux totémiques et que la résolution du conflit foncier prenne plus de place.

J'ai vraiment beaucoup aimé cette lecture.
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