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Critique de Denis_76


Un chef d'oeuvre, pour moi !
Problématique possible : Pourquoi un gentil, un jeune homme éthique comme Tanios Maalouf resterait dans un pays où tout le monde se prend la tête ? Monter sur un rocher permet de voir plus loin !
« Thamar avait placé son trésor et sa vie entre les mains de Tanios, un inconnu. Il était sûr que jamais encore, elle n'avait agi de la sorte avec un homme. »
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Drames, changements de pouvoir, amour, gloire et beauté, tout y est dans ce conte oriental qui situe le village de Tanios, Kfaryabda, au coeur de la Grande Histoire.
Amin Maalouf est tellement doué que le lecteur vit les événement de Kfaryabda au rythme du coeur de Tanios !
Tanios était le fils de la belle Lamia, d'après les ancêtres de ce village de Kfaryabda.
Le narrateur trouve le livre d'un moine qui parle de la disparition de Tanios en 1840.
Mais revenons au début.
Vers 1820, Lamia a 16 ans, elle est mariée à Gérios, l'intendant du cheikh du village, Francis, lui-même marié, mais « qui saute sur tout ce qui bouge ». Les femmes trouvent divers subterfuges pour ne pas se retrouver seules avec lui. Mais parfois c'est impossible. C'est ce qui arrive à Lamia. Quelques mois plus tard, son fils naît. Qui est le père ? Gérios ou Francis ?
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A cette époque, le Liban, broyé entre deux grandes puissances, le Sultan ottoman d'une part, et le pouvoir égyptien. Il va subir la pression de ce dernier en la personne du Pacha Méhétmet Ali et ses sbires, dont certains investissent Kfaryabda. Et là, on passe de la légende de Tanios à la Grande Histoire.
Méhémet Ali a connu une immense popularité de son vivant en France et dans le reste de l'Europe.
Soldat ottoman d'origine albanaise, il devient le maître de l'Égypte après le fiasco de l'expédition de Bonaparte et modernise le pays autant que faire se peut, avec le concours de nombreux experts européens et en particulier français.

Côté village, Asma, fille de l'ancien intendant du cheikh Francis, l'ambitieux Roukoz, devient l'enjeu d'une lutte de conquête entre le brutal Raad, fils du cheikh qui vise l'argent de Roukoz, et Tanios qui a déjà tissé de sérieux liens amoureux avec Asma. Qui va l'emporter ? Raad ou Tanios ? Asma n'aura-t-elle pas son mot à dire ?
Finalement, le cheikh du village a un côté humain, ce n'est pas le cas du puissant émir de la ville voisine.
Quel salopard, cet émir !
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J'ai préféré ce livre à « Léon l'Africain ». Très émouvant par le sang versé, ce chef d'oeuvre nous laisse la langue pendante, dans l'expectative par ses nombreux rebondissements jusqu'au bout !
«  Et Alors ? Et alors ?
– Eh ! Eh !...
Druzes, chrétiens, musulmans : le Liban est un melting-pot.
Amin Maalouf ne parle pas de la guerre civile de 1975, mais de celle qui opposa le Pacha d'Egypte au Sultan ottoman, et dans laquelle son pays fut engagé.... guerre arbitrée par l'Angleterre.
Comme Mouawad, Amin Maalouf quitte le Liban à cause de cette guerre civile.
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« Pour tous les autres, tu es l'absent, mais je suis l'ami qui sait.
A leur insu, tu as couru sur le chemin du père meurtrier, vers la côte.
Elle t'attend, la fille au trésor, dans son île ; et ses cheveux ont toujours la couleur du soleil d'occident. »
Peut importe que Nader ait dit cela à Tanios près de son Rocher, ou Gébrayel l'ait évoqué au narrateur sur ce même Rocher, …
« Et là-bas, au loin, je voyais la mer, mon étroite parcelle de mer, étroite et longue vers l'horizon, comme une route. »
Comme Tanios sur son Rocher, lassé du conflit égypto-turc, comme le narrateur grimpé malgré l'interdit, sur le Rocher de Tanios, Amin Maalouf, lassé d'une guerre civile stupide, a sans-doute escaladé le Rocher de Tanios, et a suivi la mer, étroite parcelle de mer, étroite et longue vers l'horizon, comme une route …
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Coup de coeur !
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