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Critique de songtsen


Grâce à la lecture de ce livre, j'ai pu faire une nouvelle rencontre, celle d'un nouvel écrivain, que je connaissais à peine. Voilà tout ce que je demande au livre : m'étonner ! Merci aux éditions La Table Ronde.
De son vrai nom, Kurt-Erich Suckert, Curzio Malaparte (nom qu'il a choisi par opposition à Bona-parte ; cela montre déjà la démesure du personnage), journaliste et écrivain, est avant tout un intellectuel très engagé- et même enragé- qui a vécu la période trouble des deux dernières guerres qui ont déchiré l'Europe. Cet auteur, italien par sa mère, toscan et fier de l'être, s'est engagé très tôt dans l'histoire en participant dès l'âge de 16 ans aux combats de la première guerre mondiale dans l'armée française, et est devenu ensuite fasciste révolutionnaire. Il garda apparemment tout au long de sa vie une franche liberté de pensée, qui ne plût pas à beaucoup de ses compatriotes. Il dénonça très vite, dès le début des années 30, l'imposture d'un Mussolini, d'un Lénine et d'un Hitler, leur arrivisme, leur démagogie mais aussi l'aveuglement des peuples. Aucune complaisance chez cet auteur ! Il en paya d'ailleurs le prix par la relégation en résidence surveillée. Par après, il fut correspondant de guerre en Europe de l'est (raconté dans « Kaputt » 1943) puis participa à la libération de l'Italie (sujet de « La Peau » 1949). Il devint même communiste à la fin de sa vie…

Le premier texte intitulé « Muss » devait être au départ une biographie du dictateur italien. Il fut commencé en 1931, interrompu plusieurs fois et reprit dans les années cinquante. Il changea d'objectif et devint finalement une réflexion sur la relation du fascisme avec l'histoire, avec les italiens, et avec le national-socialisme allemand. Ce mouvement politique, essentiellement italien, y est montré comme restaurateur d'un ancien ordre classique, comme dernier avatar de la Contre-Réforme du XVIème, mouvement de redressement de la foi catholique face à l'émergence protestante. Mussolini est présenté comme Dieu le Père car ainsi le considérait ce bon peuple italien très croyant et aimant les saints. Malaparte dirigera essentiellement ses attaques contre le Duce, décrit comme un bonhomme sans scrupules, voulant se faire idolâtrer.
Son style est baroque et pourrait être rapproché de celui d'un Céline. le ton est net, dur et tranchant par moment, et grandguignolesque à d'autres.

Dans le second texte, intitulé « le Grand Imbécile », la charge reste mais les diatribes prennent un ton très satirique, voire très caricatural, afin de susciter le mépris pour le personnage. La cible des attaques sont surtout les caractéristiques physiques de Mussolini – ce qui nous vaut des descriptions grinçantes, folles, clownesques du chef fasciste. Mais en fin de lecture, je l'ai vu comme une réflexion sur les dictatures, ainsi que d'une analyse de la relation du peuple avec son chef et de la « nature italienne ». Certaines considérations peuvent d'ailleurs nous aider à décoder les événements politiques contemporains.
Malaparte ne mâche pas ses mots et cela me plaît beaucoup. La langue de bois, il ne connaît pas ; mais la langue de vipère, bien ! Ses mots sont des coups de massue, qui peuvent faire très mal. Après avoir refermé le livre, j'ai la nette impression d'avoir découvert un nouvel univers, étonnant, d'un écrivain très, très surprenant.
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