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Trois jeunes finlandais migrent en Oregon pour échapper à l'envahisseur russe. du début du 20° siècle à la fin des années 60, Karl Marlantes raconte comment chacun d'entre eux s'est construit dans une Amérique aux multiples promesses.

Karl Marlantes a grandi aux Etats-Unis dans une ville de bûcherons, et cela se ressent dans le roman. Il donne beaucoup de détails sur les conditions de vie très rudes des ouvriers (bûcherons, ouvriers de conserverie, ...) ou des fermiers, ainsi que sur le quotidien des femmes. Aino, syndicaliste acharnée, se bat inlassablement pour faire reconnaître le droit des travailleurs, tout en essayant de remplir au mieux son rôle de mère. Ce roman compte plus de 800 pages, pourtant il se lit facilement. Les personnages sont nuancés, bien campés, l'arrière plan historique et politique fouillé, les rebondissements nombreux mais crédibles.

Une lecture passionnante.
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C'est un grand roman par la qualité du récit et aussi un gros roman (1139 pages dans l'édition de poche). Karl Marlantes s'est inspiré de l'épopée mythologique finnoise “Kalevala”, pour bâtir cette saga familiale, une transposition au début du XXème siècle. A travers elle, l'auteur, d'origine finlandaise par sa mère, retrace l'histoire peu connue de ces finlandais opprimés par les Russes au tout début des années 1900, qui immigrèrent sur la côte ouest des Etats-Unis dans les États de Washington et de l'Oregon pour tenter leur chance comme bûcherons ou pêcheur de Saumons.
L'histoire retrace les aventures d'une fratrie dont les trois membres suivent des chemins différents tout en conservant l'esprit de tribu: le personnage principale, Aino,une jeune au caractère bien trempé, déjà passionaria révolutionnaire marxiste en Finlande, devient meneuse syndicale aux Etats-Unis alors que ses deux frères Matti et Ilmari suivent des voies opposées: Matti tente sa chance comme petit entrepreneur d'une scierie et son frère Ilmari fermier s'accroche à sa foi luthérienne. A travers les combats d'Aino Karl Marlantes fait revivre certains conflits comme la grève générale déclenchée à Seattle en 1919 par le syndicat révolutionnaire IWW ( Industrial Workers of the World). C'est un monde dur où les conditions de travail sont dangereuses et la répression féroce. On revit également les trafic liés à la prohibition et les violences d'un monde où tout semble permis pour se faire une place au soleil, notamment pour les vétérans de la première guerre mondiale de retour dans un pays qui se construit à une vitesse folle. Saissisant de vérité le roman nous dépeint à la fois les beauté de la forêt primaire (une vieille indienne se lie d'amitié avec Ilmari et une de ses fille, personnifie le respect de la nature) et l'âpreté des moeurs de l'époque.
Karl Marlantes a vécu dans cette ouest américain où les pionniers n'ont pas toujours respecté la nature en n'hésitant à raser des parcelles d'arbres millénaires, et connaît parfaitement les techniques d'abattage du bois où de pêche aux saumons, d'où un vocabulaire précis dans des descriptions parfois un peu longues. Cela étant, il a parfaitement rendue l'ambiance de l'époque avec un intéressant panorama de cette histoire de l'ouest américain au nord de la Californie bourré de références historiques souvent peu connues en Europe. Il en est de même pour le début du roman en Finlande sous le joug russe.Les personnages de son roman sont très attachants, ce qui tient le lecteur en haleine jusqu'à la fin.
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Voici un roman qui vous embarque dans la vie des immigrés islandais aux Etats-Unis au début du XXe siècle à travers une figure féminine.

Nous suivons le destin parfois contrarié de cette femme qui décide d'affronter les épreuves mais aussi celui de sa famille et de ses amis qui ont également fait le choix de quitter la Finlande.
Un roman qui offre une fresque et donne à voir un monde où rien n'est facile mais où la solidarité est le maître mot.
C'est aussi une leçon de courage de cette femme qui refuse de laisser ses convictions de côté et qui coûte que coûte les défend.

Une histoire qui marque. de la littérature comme on l'aime.

Merci à #NetGalleyFrance et à #calmann.levy pour la lecture de ce roman
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Magnifique chef d'oeuvre ! 850 pages dont jamais on ne se lasse, c'est un exploit. Je me suis régalée jusqu'au bout, c'est rare. Écrivain virtuose qui a vraiment donné de lui-même, merci pour ce superbe travail ! Je quitte l'ambiance, l'histoire, les personnages avec regret, ils m'ont accompagné pendant les grosses chaleurs. de la grande nourriture. Certainement l'un des meilleurs livres que j'ai lu de ma vie.
Histoire de finlandais réfugiés sur le cote Ouest de l'Amérique fin du dix-neuvième siècle. Construction épique de ce grand pays, conditions de travail terribles, comment les pionniers ont rasé les forêts primaires pour installer les fondations de ce pays dominant le monde, les premiers syndicats, la guerre, la constitution de l'identité nationale etc... L'héroïne principale, Aino, est un fier portrait de femme, engagée contre l'injustice, syndiquée, politisée, activiste, courageuse, subissant et se révoltant contre la violence des patrons, des milices, de même que les hommes de sa famille, tous très attachants malgré la dureté de leur vie. Rien de mieux pour comprendre comment ces gens vivaient il y a un bon siècle et sur quoi repose l'Amérique d'aujourd'hui. Une prédation effrénée et une énergie folle au travail.
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Ce livre n'est pas pour Idefix, le chien d'Obélix… Ça le ferait hurler à la mort de lire qu'on y abat tant et tant d'arbres…

Des arbres centenaires, millénaires, appartenant à des forêts primaires. Pas de tronçonneuses, juste des haches, des longues scies, de la sueur, du sang, des salaires de misère et l'exploitation de nombreux hommes par quelques hommes.

Ce pavé comprend assez bien d'ingrédients, notamment sur l'abatage des arbres, le syndicalisme naissant, le socialisme, le communisme, la lutte des classes, l'esclavage moderne, le travail des sages-femmes, les droits des femmes (heu, elles n'en avaient pas), la Russie qui tenait la Finlande sous sa coupe, l'immigration aux États-Unis, soi-disant terre des libertés, les religions, l'effort de guerre pour la Première Guerre Mondiale, l'Espionage Act (*)…

Oui, ça fait beaucoup de matières à ingérer, à intégrer dans le texte pour en faire un récit qui doit tenir debout… Rome ne s'est pas faite en un jour, les États-Unis non plus et ce pavé de 850 pages mettra lui aussi du temps pour en venir à bout. Peut-être un peu trop…

Avec 200 pages de moins, cela aurait été mieux. Il y a trop de détails techniques, dans ce roman qui pèse une tonne. le travail documentaire a été fastidieux pour l'auteur, sans aucun doute, il est précieux, je ne le nierai pas, mais purée, trop c'est trop.

Aino Koski est le personnage principal. Cette jeune Finlandaise qui a fui aux États-Unis est une syndicaliste convaincue, une Rouge, comme on dit, et à cette époque, c'est une insulte. Elle ne veut rien lâcher, elle harangue les bûcherons, leur parle de salaires équitables, de sécurité, de conditions de travail décentes, de capitalistes…

Raison, elle a. Tout à fait raison, même. Hélas, face à des gens qui gagnent des misères en bossant dur et qui ne peuvent se permettre de faire grève ou de perdre leur emploi, elle frise parfois l'idéalisme, la folie pure (elle se fout souvent des conséquences pour les autres, ses proches).

Son caractère est fort, elle aime la liberté, ne croit pas à l'utilité des mariages (vive les unions libres), mais il m'a été impossible de l'apprécier, comme j'ai pu chérir d'autres femmes (filles) fortes de caractère dans d'autres romans.

Pour tout dire, elle m'a énervée bien souvent et fait lever les yeux au ciel. Malgré tout, je respecterai son engagement, car c'est grâce à ce genre de personne entêtée que nous avons des syndicats, l'inspection sécurité et hygiène,…

Les bémols posés, passons à ce qui est intéressant dans ce pavé ultra-détaillé : c'est tout de même une page importante de l'Histoire des États-Unis qui se trouvent mises en scène dans ce pavé, notamment dans des secteurs que nous connaissons peu tels que l'abattage d'arbres, la pêche aux saumons, mais surtout, sur la naissance du syndicalisme. Il faut garder en mémoire que certains (certaines) ont risqué leur vie, se sont battus, ont pris des coups, affrontés des dangers, pour faire progresser les droits des travailleurs.

Lors de ma lecture de la saga Blackwater (1919 et après), avec la famille Caskey, j'étais chez les propriétaires de scierie, les capitalistes et je ne me suis jamais demandée si leurs ouvriers étaient bien payés, s'ils avaient des conditions de travail décentes, humaines. Avec le roman de Karl Marlantes, je me suis trouvée du côté des damnés de la forêt et ça changeait tout.

Les personnages sont nombreux, mais il est difficile de les confondre, tant ils sont différents les uns des autres, certains étant même plus intéressants que d'autres (Matti Koski, le petit frère d'Aino, Aksel Långström, Kullerrikki et Jouka Kaukonen). Ils ne manquent jamais de profondeur et sont tous bien travaillés, même le Kullerrikki, le voyou siffleur, qui n'a pas un grand rôle, mais est attachant.

Malgré mes bémols dû à l'abus de détails, ce pavé met tout de même en récit tout un pan de l'histoire du Nord-Ouest des États-Unis (de 1901 à 1950) et on se dit que bosser à cette époque n'avait rien d'une sinécure, que l'on mourrait souvent, que l'on se blessait tout autant, qu'il n'y avait aucune sécurité sociale, aucun syndicat et que les patrons étaient les rois…

Une grande fresque historique, familiale, un pavé énorme, qui est mieux passé chez les autres que chez moi, à cause des longueurs et du fait que je ne me sois pas vraiment attachée à Aino Koski (mais j'ai adoré les autres).

Ce roman, c'est une partie de la construction de l'Amérique, loin des rêves promis, vendus, attendus… C'est aussi une grande fresque familiale sur l'apprentissage, l'exil, l'amour, l'amitié, la solidarité et l'envie de s'élever, de réussir, de gagner sa vie, de nourrir les siens, de garder la tête haute.

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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Si vous aimez les grandes fresques à la fois historiques et familiales, ce roman est pour vous !

L'histoire commence en Finlande au tout début du XXeme siècle au sein de la famille Koski. le frère ainé a déjà rejoint l'Amérique et sera suivi par son frère Matti et Aino, sa soeur, lesquels fuient notamment la domination Russe mais également la repression dont ils font l'objet du fait de leurs idées. Aino, le personnage central du roman est une vraie révolutionnaire et embrasse des idées clairement Marxistes.

Nous voilà embarqués dans un roman dense et précis. Sur fond de lutte des classes et de combats pour un peu de reconnaissance envers une population exploitée et aux conditions de vie très difficile, la vie de la famille s'organise entre joies et peines.

J'ai beaucoup aimé les personnages de cette grande fresque. Des hommes et des femmes pour la plupart courageux, travailleurs, besogneux.
Paradoxalement, Aino, le personnage principal me laisse un sentiment mitigé. Certes combative et pugnace pour ce qui est de défendre ses idées politiques, elle est très décevante d'un point de vue personnel. Peu d'amour pour sa fille et pour son mari. Elle les fera souffrir et il n'y a qu'à la fin du roman qu'elle sera un peu plus humaine.

Je ne me suis ennuyée à aucun moment et la description parfaite des conditions de vie et de travail permet de mieux connaitre le monde du bucheronnage ainsi que les fondements de la société Américaine.

Les sujets annexes sont nombreux (prohibition, trafics, progrès divers) et les thèmes abordés également (pardon, rédemption pour ne citer qu'eux)

Un roman passionnant et riche mais très abordable. Ma plus grosse difficulté ayant été de visualiser les scènes de bucheronnage...j'avoue que ça n'a pas été très clair pour moi...mais ce n'est pas l'essentiel.


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Finlandais dans l'obligation de s'exiler de leur pays, à cette époque sous joug russe, Matti et Aino Koski rejoignent leur frère, Ilmari, déjà installé depuis plusieurs années au bord de la Columbia River, aux Etats-Unis. Ils seront suivis de peu par une de leurs connaissances, Axel Langström, suédois vivant en Finlande, dans l'obligation, lui aussi, de s'exiler. Encore adolescents, ou tout jeunes adultes, les garçons deviendront bûcherons, comme la majorité des scandinaves ayant immigré dans ce coin du pays, mais ils voudront, très vite, fonder leur propre entreprise. Aino, quant à elle, d'abord cantinière dans les campements de bûcherons, va vite être rattrapée par les idées socialistes qu'elle a quittées en Finlande, et devenir une des égéries des Industrial Workers of the World, à ses risques et périls.

Je ne connais pas suffisamment, et l'histoire de la Finlande, et l'histoire du syndicalisme américain, ou encore celle de la vie des bûcherons de la Columbia River, de la première moitié du XXème siècle, pour confirmer ou infirmer la véracité de ce qui nous est raconté, mais j'ai pleinement eu la sensation de vraiment remonter le temps, dans un Far West à son crépuscule, détrôné par l'industrialisation massive qui doit permettre à une population états-unienne grandissante de vivre au mieux, au détriment d'une autre partie, issue d'une nouvelle immigration, qui travaille au contraire dans des conditions inhumaines.

Et puis l'auteur, Karl Marlantes, américain d'origine finlandaise dont la famille a vécu ainsi, dans l'Oregon, semble s'être particulièrement documenté avant d'écrire ce roman, de fait précis, tant quant à la description de la vie quotidienne dans les campements et sur les chantiers, très dangereux, de coupe d'arbres gigantesques, qu'à celle des traditions finlandaises, ou encore de l'activité syndicale de l'époque.

Et puis je me suis attachée à la famille Koski : certes, Faire bientôt éclater la terre est avant tout un roman historique, dense, mais il est aussi une fresque familiale d'apprentissage, d'amour, de solidarité face à l'adversité, qui incarne avec romanesque, et parfois émotion, une part d'Histoire assez peu connue, finalement, en Europe de l'Ouest, si l'on ne s'intéresse pas un minimum au sujet.

Je me replongerai volontiers, un jour, dans un roman de l'auteur, qui manie avec brio histoire et Histoire, du moins de la façon dont, moi, je l'apprécie.
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Fuir la répression russe en Finlande pour tomber dans le libéralisme forcenée des Etats-Unis naissant, la vie est dure pour les pionniers et particulièrement pour les femmes, surtout si elles ont des idées socialistes et émancipatrices.
Mais ce qui frappe le plus dans cette épopée familiale, c'est la manque totale de considération pour l'environnement, les nécessités de la survie et la recherche du profit conduisant à exploiter totalement les ressources naturelles d'un endroit avant de se déplacer vers un autre, phénomène qui mène inexorablement vers le désastre d'aujourd'hui mais qui était totalement inconnu à l'époque tellement la nature paraissant inépuisable.
Mais comment prendre en compte l'avenir de la planète quand on lutte chaque jour pour avoir de quoi se nourrir et avoir un endroit pour dormir sans mourir de froid.
Cet engrenage fatal rend pessimiste que l'avenir de l'humanité.
Et pourtant il y a quand même des moments de bonheur et cette rage de ne pas baisser les bras.
Ce récit âpre et très bien écrit est prenant jusqu'au bout.
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Il y a les sagas qui tirent à la ligne. Celles qui peignent des dynasties auxquelles les épreuves ne servent qu'à prouver la résilience. Celles où le cours de l'histoire consacre toujours l'intuition et la droiture des personnages du récit. Opportunément blancs de toute faute, miraculeusement et éternellement du bon côté. Ce qui est bien plus facile lorsqu'on écrit a posteriori, évidemment.
Et puis il y a Faire bientôt éclater la terre. On suit durant quelques décennies le parcours heurté de Finlandais obligés d'émigrer aux Etats-Unis pour fuir la répression russe qui sévit dans leur pays. Aino, jeune femme aux engagements politiques communistes fortement affirmés, son petit frère Matti, travailleurs et tête brûlée, Illmari leur aîné déjà installé tout au nord, sur la côte ouest depuis quelques années. Askel aussi. Et, déjà regroupés en une petite communauté, Kyllikki qui vend des chaussures dans la boutique de ses parents, Rauha la fière, Lena, Jouka le beau joueur de violon. Et tous les autres.
Le temps est à l'exploitation forestière par des self made men. Pour soutenir les besoins toujours galopant de la construction, on fait tomber des pins gigantesques, on abat des monstres d'arbre. Les campements sont précaires, insalubres. Les salaires misérables. le travail dangereux. On y parle suédois, norvégien ou finlandais. Un peu anglais aussi. On crache sur les autres immigrés, grecs ou italiens que la faim rend capables d'accepter des salaires encore plus indigents que ceux dont on ne peut pas se contenter.
Pas vraiment une success story donc. Pas non plus un récit misérabiliste. Les personnages de cet épais roman subissent les affres d'une existence chahutée par le cours du bois, la première guerre mondiale, la crise de 29. Ils rencontrent des deuils, des pertes, des blessures.
Tout l'intérêt de cette histoire, outre son aspect profondément romanesque et dépaysant, réside dans la relation des mouvements sociaux qui émaillent ces années.
Je m'étais toujours demandé comment on pouvait expliquer que les idées de gauche aient eu aussi peu de prise aux Etats-Unis. J'avais bien en tête la plus tardive chasse aux sorcières de McCarthy mais, sans penser qu'elle pouvait avoir surgi ex nihilo, je ne la rattachais à aucun phénomène antérieur dont j'aie connaissance.
Les immigrés finlandais du début 20e siècle étaient, pour certains, porteurs d'un idéal communiste que la révolution russe viendrait mettre au pouvoir dans leur pays d'origine quelques années après (avec les suites totalitaires que l'on sait). On était encore à un moment de l'histoire où on pouvait espérer, aux Etats Unis aussi, une révolution prolétarienne qui installe l'égalité heureuse, les lendemains qui chantent.
Karl Marlantes met magnifiquement en scène cette opposition frontale entre les intérêts individuels de quelques pionniers arrivés avant, bien décidés à incarner un avatar du rêve américain, et les tentatives d'union des ouvriers récemment immigrés. Il raconte la douloureuse mise en place des syndicats, les bastonnades organisées par les shérifs à la botte des puissants patrons, la répression constante, le déni de la liberté d'expression dans une Américaine puritaine, libérale et raciste. L'écrabouillement pur et simple des idéaux collectifs au profit de la sacrosainte liberté d'entreprise individuelle.
En filigrane, on lit aussi la dangereuse marche forcée vers une exploitation toujours plus radicale des ressources qu'offraient ces terres encore quasi nues de présence humaine. On découvre des portraits de femmes fortes, loin des logiques de subordination à l'oeuvre dans les couples Wasp. Et on se prend d'affection pour ces tempéraments insupportables, capables de ne se laisser guider que par leurs idéaux au détriment de leurs affections. Bref, on vibre, on frémit et on a l'impression de comprendre un peu mieux l'histoire de l'Amérique, le moment où les choses auraient pu prendre un autre tour. Une lecture enrichissante !
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Début du XXe siècle en Finlande sous domination russe : la famille Koski va être durement confrontée à la répression de la police du tsar contre toute tentative de rébellion ou toute revendication et chacun à leur tour, les 2 frères, Ilmari et Matti, et leur soeur Aino, devront fuir leur pays pour les Etats-Unis. Ils se retrouveront dans le Nord Ouest américain encore quasi vierge où chacun essaiera de construire sa vie : c'est l'époque où tout semble possible pour les pionniers si on est prêt à travailler dur et à se taire. Aino l'idéaliste refusera d'abandonner ses idéaux de justice sociale et en paiera parfois le prix fort.

Faire bientôt éclater la terre est une magnifique saga familiale dans un contexte et une période historique assez peu connus (en tous cas qui étaient nouveaux pour moi) : le développement de l'Ouest américain dans les territoires les plus au Nord avec les campagnes effrénées de bucheronnage pour fournir suffisamment de bois à la construction des villes (comme à San Francisco après le terrible tremblement de terre de 1905), aux lignes de chemin de fer puis à la grande guerre de 1914. On découvre la région par les yeux des frères et soeur Koski qui se retrouvent tous dans le même petit bout de territoire encore sauvage près de la Columbia River. L'auteur nous offre de magnifiques descriptions de cette nature encore sauvage et grandiose, menaçante, de ces arbres immenses (la photo de couverture du roman est juste impressionnante), de ces forêts qui paraissent infinies face aux maigres moyens des hommes pour les exploiter (scies manuelles, "mule électrique" pour convoyer les troncs puis chemin de fer ou flottage). le récit de ces efforts des hommes pour dompter la terre hostile et en tirer de quoi vivre, de leur vie frugale où on n'hésite pas à parcourir 10 kilomètres à pieds pour aller au bal le samedi soir, où une femme peut rater le mariage de son frère quand le vent trop fort empêche le bateau de circuler, où les ouvriers n'ont d'autre vie que celle de prendre des risques insensés pour abattre les arbres géants qui les entourent, de se coucher épuisés juste après le dîner et de se relever aux aurores pour recommencer, est totalement passionnant et résonne étrangement par rapport à notre époque d'abondance où par contraste on prend enfin conscience de la finitude de la nature et de sa surexploitation continue.

En parallèle de ce côté presque "documentaire" il y a aussi tout l'aspect saga familiale lui aussi très réussi avec de vrais personnages, étoffés, qui évoluent au fil des années et qu'on finit par avoir l'impression de connaître depuis toujours. Chacun des 3 frères et soeur a sa propre personnalité et on se plaît à les voir évoluer, tenter de se construire petit à petit une vie décente dans une époque où le moindre coup dur pouvait encore vous menacer de la déchéance immédiate. C'est un vrai plaisir de voir l'évolution de la famille, les mariages, les naissances, les amitiés, racontés de manière très simple et à la fois très attachante et réaliste. Et au milieu il y a ce magnifique personnage de Aino, la seule fille de la fratrie, la rebelle, celle qui fera passer ses convictions avant tout le reste quitte à y sacrifier sa vie. C'est un personnage qui m'a parfois (souvent) agacée de par son intransigeance et ses combats permanents. J'ai souvent eu envie de la secouer, de lui dire de penser un peu à ceux qui l'entourent et qui l'aiment au lieu de courir après un idéal de justice sans doute inatteignable et pour lequel personne ne la remerciera jamais. Et en même temps c'est celle qui me reste le plus en tête une fois ce roman refermé, un bel exemple de courage et un personnage suffisamment complexe pour porter tout le reste du roman sur ses épaules.

Vous l'aurez compris, malgré quelques longueurs (près de 900 pages quand même !) et une lecture parfois exigeante tant le récit abonde en descriptions et prend son temps pour construire sa trame, Faire bientôt éclater la terre a été pour moi un grand livre. Un de ceux dont on se rappelle longtemps, un de ceux qui vous permettent de vraies découvertes, une belle histoire, bien construite et passionnante. Si les pavés ne vous font pas peur, n'hésitez pas à vous lancer et à découvrir ces Finlandais exilés qui eux aussi ont participé à l'histoire des Etats-Unis, vous ne le regretterez pas !
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