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L'espoir n'est pas pour elle, avec tout ces regards et pas un seul pour l'aimer.

Pour un regard indulgent, l'Américaine Sandy Allen, la plus grande femme du monde (2,32 m) peut quand même compter sur Ma, sa grand-mère qui à la place de sa fille volage a toujours veillé sur elle. Sur Fellini qui la sublimera dans son très controversé et onirique Casanova, ainsi que sur son assistant, Gérald, qui racontera quarante ans après : « Elle me serre le cœur. Une douceur si immense et si passive, que peut-elle devenir ? On aurait envie qu'elle vous prenne dans ses bras, s'y blottir indéfiniment. Elle serait une Sainte Vierge dont le manteau est un abri pour les pécheurs, chaque mortel. » Enfin Sandy peut aussi compter sur Isabelle Pestre qui de son écriture profonde a su magnifiquement lui redonner, au delà de la mort, son émouvante humanité si souvent bafouée.

Merci à Babelio et aux Éditions Flammarion pour cette belle lecture.
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Sandy Allen était une américaine que le Guinness book des records a homologuée comme la femme la plus grande du monde (2 mètres 32), dans les années 1970. Elle a vécu 53 ans, ce qui lui a permis de connaître successivement deux mondes : d'abord un monde où elle a notamment gagné sa vie comme « freak » auprès de qui les visiteurs des chutes du Niagara pouvaient satisfaire leur curiosité en posant toutes leurs questions (regardez la vidéo sur youtube où on la voit expliquer tranquillement qu'on peut tout lui demander car elle a déjà tout entendu, depuis des questions sur sa vie sexuelle jusqu'à la taille de ses brosses à dents) ; puis dans notre monde actuel, où elle a perçu des allocations et récité un texte, « it's OK to be different », devant toutes sortes de publics, notamment des écoliers. Un texte respectueux, politiquement correct, émouvant ; il est reproduit dans le livre.

Au fil des pages, Isabelle Marrier illustre puis propose une lecture contre-intuitive très intéressante de ce texte, et de ce passage d'un monde à l'autre. Elle suggère que Sandy Allen trouvait sa « raison d'être » plutôt dans le premier monde. Freak, certes, mais pouvait-elle choisir autre chose que d'occuper ainsi l'espace et de fasciner celles et ceux qui croisaient son chemin ? Le texte « it's OK to be different » traduisait-il sa pensée, ou celle que nous voudrions qu'elle ait ? Qui est le freak de qui, quand on demande à quelqu'un de dire ce qu'on a envie d'entendre, si possible en nous tirant des larmes, avant de se retirer discrètement de la scène ?

Certes, it's OK to be different. Mais alors, vraiment OK, OK jusqu'au bout, quitte à déranger : OK, le droit d'exprimer sa colère d'être différent ; OK, le droit d'exprimer sa souffrance d'être différent ; OK, le droit de ne pas rester pudiquement dans son coin au prétexte qu'on ne peut pas ne pas fasciner et incommoder par sa différence ; OK, le droit de dire « je » et de ne pas seulement parler la langue de la norme…

Isabelle Marrier part de ces constats politiquement incorrects pour aller à la rencontre des ressentis intimes de Sandy Allen, qui « a toujours fait ce qu'on attendait d'elle », ne s'est jamais exprimée, a quitté la projection du film de Fellini où elle apparaissait parce qu'elle n'avait pas envie d'être exhibée, ou peut-être parce qu'elle n'avait pas envie d'être reconnue pour ce qu'elle n'était pas, ou peut-être encore parce qu'elle aurait voulu avoir le choix d'être dans la norme. Isabelle Marrier précise bien que c'est sa lecture personnelle, et qu'on peut en avoir d'autres : mais elle s'engage, et nous oblige à nous confronter à des questions dérangeantes, mais fondamentales.

Merci au Cercle littéraire de la Fnac, qui m'a fait découvrir ce livre.
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Isabelle Marrier nous raconte Sandy Elaine Allen (1955-2008), la plus grande femme du monde (2,32m), la géante exposée dans le Casanova de Fellini. Elle [renverse] ce que je connaissais du féminin et de l'être humain; elle nous donne à voir, à comprendre les souffrances physiques et morales qui ont été les siennes.

« Ses jours se mâchent comme du pain sans sel. Elle brave le monde comme tous les solitaires. Elle n'a pas le choix. Elle ne peut pas se cacher. Elle ne pourra jamais. Toujours, elle rentrera les épaules, fléchira la tête pour franchir les portes et se cogner au chambranle. Elle n'est pas seulement d'une hauteur de colosse mais en possède d'autres attributs, la carrure, la masse, la taille épaisse, la cuisse énorme, la maladresse, la laideur, les mains et les dents larges. Elle est timide et caustique. C'est drôle une géante pour ne pas être triste. »

L'énumération de ce qu'elle savait déjà à vingt ans (pages 100 à 102) est d'une justesse et d'une vérité étourdissante, éblouissante, effrayante.

« [..] Les regards qui ne veulent pas insister. le dessus des portes. [...] Les regards qui insistent et détaillent. le cercle métallique du panier de basket. La vieille dame qui étouffe un cri à son passage. N'être pas attendue pour elle mais pour sa taille. Les affreux éclairs de répugnance à son approche. Son corps décapité dans tous les miroirs en pied. La honte des solitaires. [...] Les larmes, seule. [...] La pitié retenue. [...] L'humiliation. »

Cette lecture enrichit. On y fait l'expérience de la minorité. Et c'est un autre regard que l'on souhaiterait adopter face à la différence, un regard plus sain, moins fuyant, plus tendre, dépourvu de jugement.

« J'écris pour toucher le réel. J'écris pour atteindre l'homme boiteux à travers cette fumée de compassion et de dégoût. [...]Ils ne mendient pas. Ils tendent un miroir à notre intime infirmité, ils nous vendent un retour sur notre pauvreté fondamentale. Autant dire que leurs affaires vont mal. »

À découvrir !
Lien : https://seriallectrice.blogs..
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Bien après la mort de Sandy Allen, Isabelle Marrier l'a croisée un jour, sur l'écran d'un cinéma (magie du 7ème art !) et l'amplitude de cette femme sur la pellicule de Fellini l'a fascinée.
De la fascination, malsaine, Sandy Allen en a provoqué, bien involontairement. Atteinte d'une tumeur de l'hypophyse générant la libération d'hormones de croissance incontrôlables, cette jeune fille, élevée par une grand-mère bienveillante au fin fond des États-Unis, serait restée anonyme, aurait épousé au mieux un bon gars et fait un ou plusieurs enfants si cette maladie n'avait pas bouleversé sa destinée.
Isabelle Marrier, à son tour fascinée mais sans voyeurisme, avec empathie et douceur, en a fait l'héroïne de son roman. Grâce à la plume bienveillante et sensible de l'auteur, Sandy Allen, ni belle, ni brillante, regagne normalité, profondeur et féminité, elle qui n'a jamais pu connaître l'amour ; quel homme aurait pu serrer dans ses bras cette géante ?.
Merci à la Masse Critique de Babelio et aux Éditions Flammarion de m'avoir permis de découvrir ce roman et cette auteur.
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Voici mon roman de cette rentré littéraire de janvier.
Dans le roman "Le silence de Sandy Allen", Isabelle Marrier nous narre un roman bien veillant et extrêmement tendre sur la femme la plus grande du monde.
Sandy Allen, née en 1955 comme Bill Gates et Steve Jobs, mesure déjà 1m 87 à 10 ans. Elle subit toutes sortes de brimades, moqueries et autres quolibets de ses camarades. Ils vont même jusqu'à chanter l'hymne du Géant vert, très connus aux Etats-Unis. Mais Sandy Allen ravalera ses larmes et restera bien gentille à ces attaques.
Elle rentrera dans le World Records Book (Le livre des Records) comme femme la plus grande du monde. Maigre consolation pour Sandy mais elle jouera le jeux des interviews et des tournées où elle est exposée comme une bête de foire.
Paradoxalement, elle apprend qu'elle est atteinte de la maladie d'acromégalie : maladie du dérèglement des hormones de croissance
Mais un jour, Fédérico Fellini va la remarquer dans un journal local et va lui composer un rôle pour jouer dans le film qu'il est en train de préparer : "Casanova". Mais va t'elle accepter ? en effet, Sandy n'aime pas se montrer ?
A travers cette histoire vraie, Isabelle Marrier nous conte l'histoire de cette femme marginale mais si humaine. Elle pose le problème des personnes hors normes et leur difficultés à s'insérer dans une société qui n'acceptent pas totalement la différence.
Un roman poignant, lucide et tellement tendre à hauteur de'une femme de 2m32. Une lecture qui fait du bien.

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Une biographie romanesque bouleversante de la plus grande femme ayant jamais vécu. Sandy Allen mesurait 2m32, ce qui ne simplifie pas la vie et suscite la moquerie. Pourtant, elle ne s'est jamais plainte et a cherché à vivre de son mieux avec ce corps. Isabelle Marrier engobe l'histoire de Sandy Allen dans une réflexion sur la différence et le rejet de l'autre, sur les canons qu'impose la société.
Lien : https://appuyezsurlatouchele..
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Comment peut-on vivre discrètement quand on mesure 2,3 mètres? C'est la questions qui sous-tend l'histoire de Sandy Allen, brillamment reconstituée à partir de témoignages et d'informations documentaires. Au-delà de l'histoire de Sandy Allen, Isabelle Marrier traite la question éthique du regard (paroles, gestes, comportements) qu'on porte sur les gens différents, les gens hors norme « sociale ». La mise en exergue de la vie de S. Allen retrace le profond silence ressenti par la personne ayant des caractéristiques particulières. Même si Sandy A. a joué dans le Casanova de Fellini, elle demeurera la personne ignorée malgré sa popularité, ignorée au regard de ses réels besoins et véritables émotions; elle sera devenue malgré elle presque un objet de cirque. L'auteure a su redonner vie à un personnage que la population de Shelbyville, Indiana, risque d'oublier rapidement.
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#CHRONIQUE « C'est pas la taille qui compte », cette phrase bien connue, ces mots taquins, rieurs, qui nous font sourire. Tous, sauf une femme.
Pourquoi ? Parce que lorsqu'on fait 2 mètres et 32 centimètres, la taille c'est la seule chose qui compte. Et c'est loin de faire sourire.
Enfin d'ailleurs, une femme, vraiment ? Certains n'oseraient l'appeler ainsi lorsque leurs yeux s'arrêtent quelques secondes de trop, et leur rire se cache derrière leur main sur son passage ?
Une géante, voilà ce qu'on en dit. Un monstre, une bête de foire, une curiosité.
Je vous présente Sandy Allen... Elle est habituée depuis son enfance à subir les moqueries. Rien n'est plus méchant que des enfants entre eux n'est-ce pas ?
« Les filles trop grandes, les garçons les voient sans les regarder deux fois. Elles ne seront pas comme tout le monde, elles ne seront personne. »
Jusqu'au jour où Sandy se rendra compte, avec beaucoup de difficultés, des blessures et un malheur immense ; que ce grand corps, ce corps qu'elle déteste tant mais dont elle ne peut se séparer, ce corps est son seul moyen de pouvoir faire quelque chose de sa vie.
Comme une malédiction devant laquelle personne ne pourrait la sauver. Une fatalité.

Objet incompréhensible du désir, Sandy réveille et titille nos côtés voyeurs.
La femme la plus grande du monde est-elle comme moi ? Combien de repas manges-tu par jour Sandy ? Et tu étais un gros bébé ? Je peux te toucher ça ne te dérange pas ? Et aux toilettes, tu dois remplir la cuvette en faisant pipi ? D'ailleurs, tu peux utiliser des tampons hygiéniques toi ? J'y pensais, ça serait chouette que tu fasses un show télé non ? Ou la pub Géant Vert, ça t'irait super bien !
Autant de questions qui résume le malaise et la difficulté de vivre de cette femme.
Isabelle Marrier nous raconte l'histoire, la vie de quelqu'un qui n'aura finalement jamais réellement vécu.
On est touché devant ce personnage. Effrayé devant cette société à laquelle on contribue, bien content finalement d'en savoir un peu plus sur la plus grande femme du monde. Cette femme que nous aurons réussi à déshumaniser autant que possible. Publié chez @flammarionlivres
Lien : https://www.instagram.com/p/..
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