Le rire tient la peur à distance et fait reculer cette insécurité liée au monde adulte qui les frôle dangereusement.
Le rire tient la peur à distance et fait reculer cette insécurité liée au monde adulte.
Ce n'est pas parce qu'on trouve la mort obscène qu'on peut s'y soustraire.
A l'âge de cinq ans, Rosie connaît ses parents sur le bout des doigts et les fait manger dans le creux de sa main. A dix ans, elle pourrait en remontrer à Iago, question rouerie. Lorsque ses sœurs rentrent, aux vacances, elle les observe attentivement. Elle devient championne de stratégie en deux temps trois mouvements. Elle n'a jamais entendu l'expression "diviser pour régner", mais elle sait parfaitement la mettre en pratique.
C’est le genre de type qui ne tient à ses possessions que dans la mesure où elles suscitent chez autrui admiration et convoitise.
Cette fieffée Pamela parle aux deux filles de la chance qui leur est offerte et elles sont tout excitées. N'ont-elles pas dévoré toutes les histoires de pensionnat d'Enid Blyton ? N'ont-elles pas rêvé de festins nocturnes, de jouer au hockey ? Elles ont hérité des gènes de l'actrice et du pilote de chasse. Elles meurent d'envie d'expérimenter, d'explorer, de tester leurs limites. Elles meurent d'envie de s'éloigner de Mo et Pa et par-dessus tout, de Rosie. Elles supplient qu'on les envoie en pension.
- C'est curieux, dit Em. J'ai l'impression que tu es bien plus ma soeur que Rosie.
- Tu te souviens de ce que disait Pa ? demande Liv. Molly O'Grady et la femme du colonel sont plus soeurs que si elles étaient du même sang. Quelque chose comme ça. C'est une citation de Kipling.
- C'est sûr que quand je pense à Rosie, le sang me monte à la tête, s'exclame Em avec véhémence.
- Je ne pense pas que ce soit ce que voulait dire Kipling.
- Mais Kipling n'avait sans doute pas une soeur du même acabit que Rosie.
- Tous les âges sont délicats, marmonne Pa.
Rosie douillettement installée dans la maison de Rup à Chelsea, mène une existence de plaisir et de fêtes ininterrompues. Bien qu'ils aient l'intention de fonder une famille, ils ne se sentent pas encore prêts. Après tout, Rosie est si jeune, et Rup n'est pas tout à fait "établi".
-Etabli comme quoi ? demande Livy à Em, sur un ton caustique.
-Comme le plus grand couillon de Londres, répond Emmy.
Ce n'est pas parce qu'on trouve la mort obscène qu'on peut s'y soustraire.