AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Fleitour


Le premier roman de Carole Martinez, le Coeur Cousu, comme le Petit Prince de St Exupéry, est le rayon lumineux du soleil de l'enfance, une suite musicale de rires et de chagrins, un poème infini déclamé par l'aînée, le chant d'une mère murmuré aux pierres, une broderie aussi longue que les innombrables pas des enfants.

Est-ce un roman ou un psaume, chanté au rythme de la marche, et porté par le chatoiement des mots, leur musicalité, " en psalmodiant, page 102, les mots appris pour faire lever les morts". Puisque Anita se refuse aux mots écrits, c'est une déclamation qui peu à peu, nous enlace, nous force à lire à haute voix le psaume de Frasquita Carasco, quand elle se couvre de sa robe brodée de fleurs.

Le talent de Frasquita est dans la magie de ses doigts, depuis le coeur cousu, à la délicate reconstruction du visage de l'anarchiste catalan, les réalisations de la jeune femme, étonnent, subjuguent et suscitent aussi des craintes et peut être révèlent des pouvoirs occultes.

Je suis sous le charme, et plus encore comme envoûte par l'âpreté du destin de Frasquita, et la douceur de ses mots. On retrouve la féerie des contes, la fragilité des bonheurs aux richesses éphémères.
Alors que les commandes affluent, que les jeunes filles à marier cachent sous les robes de Frasquita leurs ventres déjà ronds, d'un bébé qui grandit, la très belle Adélaïde réclame pour elle seule, la plus belle robe, la plus majestueuse parure pour sa beauté en rouge sang.

C'est au sommet de ses réussites que le papillon se réveille, bat des ailes libérant l'effet dévastateur, celui d'un fil rebelle comme le grain de sable, ce fil qui dépassait à peine, "Adéaïde l'attrapa entre ses ongles et l'arracha". Ce fil unique brisa architecture du tissu, tout un pan de la robe s'effondra , "Ma robe ne tenait qu'à un fil avouait Frasquita p 345".
 

L'enfant Martirio souffla bientôt nous seront seul de nouveau, nos anges se retrouveront sur les routes, caravane bancale où sur la charrette de son mari José devenu fou à cause d'un jeune coq rouge, les enfants de Frasquita Carasco, Anita, Clara, Martirio, Angela, Pedro, Soledad écoutent les derniers mots de la mère à l'esprit décousu..


Ce très beau récit est un hymne à l'enfance, ce temps où les enfants jouent, et rient dans l'insouciance et la légèreté de leur être. La couture procède de la même source lumineuse faite de rêves, de découvertes, d'improvisations, de spontanéité, où le jeu des tissus, invente des formes, rehausse les couleurs ou les voient fondre dans des camaïeux délicats.

La broderie, la couture, l'atelier et son calme avant la clameur des enfants, oh mamie, comme c'est beau et doux ! Je suis le premier émerveillé après avoir vu les tissus, achetés à la Droguerie, au salon du fil, chez Myrtille, de découvrir une robe de princesse, une parure de lit brodée au nom du prochain bébé, une pochette de classe, un sac de plage.

Un livre, Haute Couture, vient d'être publié chez Gallimard, par Florence Delay raconte les 16 robes peintes par Zurbaran, un peintre aux natures mortes exceptionnelles, qui a peint les drapés qui ont inspiré Balenciaga.

A nos fils, nos aiguilles, et nos loupes, brodons sur ces livres des chroniques de laines nuancées.




Commenter  J’apprécie          343



Ont apprécié cette critique (34)voir plus




{* *}