Citations sur Le coeur cousu (318)
Et se mains, vous ai-je jamais parlé de ses mains ?
Les mains des conteuses sont des fleurs agitées par le souffle chaud du rêve, elles se balancent en haut de leurs longues tiges souples, fanent, se dressent, refleurissent dans le sable à la première averse, à la première larme, et projettent leurs ombres géantes dans des ciels plus sombres encore, si bien qu'ils paraissent s'éclairer, éventrés par ces mains, par ces fleurs, par ces mots.
Je n'étais pas vraiment belle, du moins comme ma sœur Clara l'était, mais j'avais, paraît-il, une grâce singulière qui les clouait aux murs
Mes sœurs me répétaient en riant les confidences des jeunes gens qui les suppliaient de plaider leur cause, ce qu'elles faisaient avec un brin de dérision, me décrivant les ridicules symptômes de leur amour, leurs bégaiements, leurs regards mous. Et nous riions.
Mais moi, je songeais à leur membre dressé, soudain à l'étroit dans leur culotte, et j'oscillais entre rire et dégoût.
« Il arrive qu’on interrompe une promenade, oubliant même ce vers quoi l’on marchait, pour s’arrêter sur le bord de la route et se laisser absorber totalement par un détail. Un grain du paysage. Une tache sur la page. Un rien accroche notre regard et nous disperse soudain aux quatre vents, nous brise avant de nous reconstruire peu à peu. Alors la promenade se poursuit, le temps reprend son cours. Mais quelque chose est arrivé. Un papillon nous ébranle, nous fait chanceler, puis il repart. Peut-être emporte-t-il dans son vol une infime partie de nous, notre long regard posé sur ses ailes déployées. Alors, à la fois plus lourds et plus légers, nous reprenons notre chemin. »
- Mais c'est la couturière ! Voilà celle qui pourrait lui raccommoder le visage. Il faut l'envoyer chercher... Manuel ! Si tu veux que Salvador vive, retrouve cette étrangère. Elle seule pourra vous le rapiécer comme il faut. Mais fais vite, il se défait à vue d'oeil !
Il y avait tant de bobines, tant de couleurs dans cette boîte qu'il lui semblait impossible qu'il existât assez de mots pour les qualifier. De nombreuses teintes lui étaient totalement inconnues comme ce fil si brillant qu'il lui paraissait fait de lumière. Elle s'étonnait de voir le bleu devenir vert sans qu'elle y prenne garde, l'orange tourner au rouge, le rose au violet. Bleu, certes, mais quel bleu? Le bleu du ciel d'été à midi, le bleu sourd de ce même ciel quelques heures plus tard...
La beauté vient de ces espaces vides délimités par les fils! Révéler, cacher. Désépaissir le monde. Ce qui est somptueux, c'est de voir au travers! La transparence... La finesse de la toile voile et encadre un morceau d'univers et ce faisant le révèle... Exposer la beauté d'un être en le couvrant de dentelle...
J'ai peur toujours de cette solitude qui m'est venue en même temps que la vie, de ce vide qui me creuse, m'use de dedans, enfle, progresse, comme le désert et où résonnent les voix mortes.
Il arrive qu`on interrompe une promenade, oubliant même ce vers quoi l`on marchait, pour s`arrêter sur le bord de la route et se laisser absorber totalement par un détail. Un grain du paysage. Une tache sur la page. Un rien accroche notre regard et nous disperse soudain aux quatre vents, nous brise avant de nous reconstruire peu à peu. Alors la promenade se poursuit, le temps reprend son cours. Mais quelque chose est arrivé. Un papillon nous ébranle, nous fait chanceler, puis il repart…
Le fil. La broderie. Des enfants comme des perles taillées dans sa chair, des sourires brodés et tant de couleurs sur les tissus pour exprimer sa joie ou sa douleur. Toutes ces couleurs !
Le silence de la nuit s'est posé sur ma page.
Du silence et rien d'autre.
J'entends, dans le désert de ma vie, battre mon coeur ensablé.
Les mots coulaient désormais de la bouche de ma sœur,
simples, clairs et vivants,
tandis que ses mains s'agitaient
comme pour les guider ou les palper.
Les mots venaient à nous, nous soutenaient, nous berçaient, nous enlaçaient, nous réchauffaient
et les mots ne tarissaient pas.
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