Magdalena, Volume 1

Ce tome contient les épisodes 1 à 6 de la série débutée en 2010. Il peut être lu indépendamment de toute continuité.

Dans les sous-sols d'une église non identifiée, un cardinal montre le Livre des Magdalena (Marie-Madeleine) à Anneli, une jeune femme enveloppée d'un grand manteau noir avec une capuche lui dissimulant le visage. Il lui révèle que Marie-Madeleine a porté l'enfant de Jésus et que ce fut une fille. Anneli est l'une des descendantes directes de cette fille du Christ. Elle a reçu une éducation qui l'a préparée à être une combattante au service de l'Église catholique et à manier la lance de Longin. le prêtre l'informe de cette situation car la porteuse actuelle de la Lance et du titre de Magdalena est en passe d'être destituée.

Quelque part au Vatican, Kristof (un agent spécial de l'Église catholique) convainc le cardinal Innocent de donner une dernière chance à Patience, la porteuse actuelle de Lance et du titre de Magdalena. Un accord est trouvé et Kristof part pour l'île d'Elbe où séjourne Patience, car l'Église a une nouvelle mission à confier à Magdalena. La question des modalités du retour en grâce de Patience dans le giron de l'Église s'effectue lors d'un dîner en terrasse. Malgré son refus de se plier à l'autorité des cardinaux, les circonstances incitent Patience à accepter la mission : tuer un enfant supposé être le fils du Diable.

Dans la postface (2 pages), Ron Marz explique qu'il a dû patienter 8 ans avant de pouvoir réaliser le rêve que représente pour lui l'écriture de cette série (le temps de remettre Witchblade dans le bon chemin). Il souhaitait pouvoir lui aussi jouer avec l'hypothèse apocryphe selon laquelle Marie-Madeleine aurait été la mère d'un enfant du Christ, assurant ainsi une lignée porteuse de son sang à travers les âges. Pour cette première histoire, Marz met les pieds dans le plat et joue cartes sur table. Magdalena utilise bien la pointe de la Lance de Longin, elle est affiliée à l'Église catholique basée au Vatican, elle se bat contre des démons. le diable a une existence réelle et peut se manifester sur Terre. Dès la première histoire, elle doit empêcher l'avènement de l'Antéchrist.

Dès la première histoire, Marz accumule les clichés sans originalité, sans surprise, sans substance. Il reprend les banalités ridicules présentes dans The Magdalena Origins 1, à commencer par les cardinaux d'opérette. Beaucoup d'auteurs ont fantasmé sur le fait que l'Église entretienne une armée privée pour lutter contre les manifestations démoniaques sur Terre. Pourquoi pas ? Mais Marz dépeint les représentants de l'Église comme des individus toujours vêtus des habits de leur charge, manipulateurs, peu soucieux du bien être d'autrui, prêts à sacrifier leurs hommes de troupe, sans aucune incidence de leur foi. Ils ne sont plus que des généraux d'armée sans âme, voués à la guerre.

L'histoire aurait été la même s'il s'était agi d'une milice privée luttant contre les manifestations surnaturelles ; il suffit de remplacer les églises et les hommes de robe par des locaux anonymes en banlieue et des costards-cravates. La Foi et le système de croyances ne jouent aucun rôle dans ce récit. Ce sont juste des éléments de décors, sans grande signification.

Malheureusement l'intrigue en elle-même ne présente pas beaucoup plus d'intérêt. La rébellion de Patience contre la hiérarchie du Vatican ne fait entrer aucune composante religieuse en ligne de compte. Cette rébellion lui sert de trait de caractère psychologique principal et unique. Cette dame est à ce point dépourvue de personnalité marquante qu'elle en devient un stéréotype sans substance. Kristof n'est pas mieux développé. Et le charmant bambin sensé préparer la venue de son père satanique se présente également comme un cliché fade.

Les illustrations sont réalisées par Nelson Blake II, encré par Sal Regla et David Marquez (qui aide également aux dessins pour les 2 derniers épisodes). Ils utilisent un style aux traits fins, plutôt qu'un encrage appuyé. Chaque case présente un bon équilibre entre un nombre de traits restreints pour une lisibilité facilité, et un nombre suffisant d'informations visuelles. Les scènes d'action mettent en avant le mouvement, sans se transformer en une surenchère d'effets (la mise en couleurs est assez sage). La mise en scène des dialogues varie les points de vue pour éviter d'être trop statique, sans transformer chaque conversation en un duel épique. Nelson est discrètement efficace ; il a un style modéré sans être fade.

Un bon exemple de cette position graphique peut être trouvé dans Magdalena elle-même : elle dispose d'une silhouette svelte sans être anorexique, la taille de sa poitrine est normale même en maillot de bain, et Nelson ne la transforme jamais en objet sexuel. Ce style un peu discret trouve sa limite dans un manque de saveur : Nelson n'en fait jamais de trop, du coup ses décors (cathédrale, catacombes) manquent d'exactitude et de panache et ses personnages manquent de charisme. Un exemple parlant est sa représentation de Notre Dame de Paris et de ses abords. L'enseigne du métro rappelle plus celui de Londres que celui de Paris (il n'a pas vérifié ses références), la façade de Notre Dame est bien détaillé, l'intérieur est vide de tout touriste, ce qui est impossible en réalité.

Les éléments vraiment intéressants du point de vue visuel sont les couvertures qui ont été illustrées par Ryan Sook, très, très en forme.

Cette première aventure ne permet absolument pas de deviner en quoi Ron Marz estime pouvoir apporter quoi que ce soit à ce personnage, ou quels sont ses plans géniaux pour Magdalena et la lignée féminine du Christ. le lecteur découvre une histoire manquant d'originalité avec des illustrations sympathiques sans être remarquables. Il s'agit d'un récit concocté par 2 artisans honnêtes à qui il manque un peu de passion et beaucoup d'originalité.