Ces émotions extrêmes n’étaient pas habituelles chez lui. Il était bien sûr fréquent pour Gus de s’extasier sur la beauté des femmes, comme d’ailleurs de se concentrer avec passion à leur conquête. Mais jamais il n’avait ressenti ce coup de poing-là.
La seule chose qui semblait égayer Mado et allumer un peu de lumière et d’éclat dans ses ténébreuses prunelles, c’était des bêtises de magazines féminins. Et ces futilités-là ne poussaient guère au labeur. Elle pouvait passer des heures plongées dans son satané Midinette, et ses romans-feuilletons.
Il la trouva belle, obscure et lumineuse, mais parce qu’il faisait nuit, parce que la lune l’irradiait, parce que la pluie déposait sur sa peau ce voile gras et translucide qui la faisait briller. Elle n’était qu’illusion. Elle n’était que Mado. Elle n’avait toujours été que cela. Son accidentelle, celle que même le plus cruel des destins n’aurait pas osé admettre lui avoir promis. »
Les appels du hasard, pour être fructueux, méritaient toujours un peu de lâcher prise.
Gus faisait partie de la classe des ouvriers, des tâcherons, de ceux que l’on rémunère pour agir et non pour penser.
c'était Mado le problème. Mado.
Mado déconcertait. Mado intriguait
Octobre finissait et avec la fraîcheur du soir, une averse commença à tomber. Au lieu de se rencogner sous un arbre, Gus alla cueillir les gouttes glacées, les laissant inonder son visage et laver peut-être tous les tourments de ces derniers jours.
Elle offrait un peu d’elle, de la douceur de sa vieille main tendue, de l’authenticité de sa réelle commisération, de la chaleur réconfortante de son foyer. Elle ne s’en glorifiait pas. Pouvait-on se glorifier d’un peu ? Mais elle apprenait d’elle-même et se réjouissait de se découvrir éclairée et pure dans une époque propice à la noirceur de l’Homme.
Il ne s’en offusquait pas. Ça aurait servi à quoi ? Il l’avait voulue, il l’avait. Dès leur premier contact, elle l’avait rebuté, mais c’est aussi ce qui avait augmenté son désir. Il ne pouvait pas se plaindre d’avoir été trompé. Il disposait d’elle comme il en avait envie, avec une fringale aiguisée d’aigreur, sans égards, sans pudeur, sans phrases tendres, sans mensonges.
Il la trouva belle, obscure et lumineuse, mais parce qu’il faisait nuit, parce que la lune l’irradiait, parce que la pluie déposait sur sa peau ce voile gras et translucide qui la faisait briller. Elle n’était qu’illusion. Elle n’était que Mado. Elle n’avait toujours été que cela. Son accidentelle, celle que même le plus cruel des destins n’aurait pas osé admettre lui avoir promis.