AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de elodiekretz


Comme tous les lecteurs passionnés, dès que je sors de notre petit cercle, j'ai le droit à cette sempiternelle question : mais pourquoi donc lis-tu autant ?

La réponse pour moi est double : pour me réfugier dans mes genres et univers de prédilection - le roman noir, la grande saga sur plusieurs décennies avec "petite histoire dans la grande", le nature writing, le roman à portée sociologique - mais aussi pour être perturbée dans mon confort de lecture, être déstabilisée puis happée irrésistiblement et découvrir que oui, même en lisant beaucoup et depuis longtemps, on peut être profondément bousculée par un livre. Et cela a été le cas avec Mama Red de Bren McClain. Je vous raconte....

J'ai lu ce livre par curiosité au départ, en n'en attendant pas grand chose de précis, ni en bien ni en mal. La 4e de couv est énigmatique, c'est un premier roman, une jeune maison d'édition sans image précise associée (du moins pour moi)... le début est quelque peu déstabilisant puisque sur les deux personnages principaux, l'une est une vache, Mama Red, dont le nom a donné son titre au livre. Oui UNE VACHE...et, même si j'aime le nature writing, c'est quelque peu inusité voire perturbant pour une citadine comme moi. J'étais donc intriguée...mais la qualité de la plume est là d'emblée et j'ai poursuivi ma lecture, en étant de plus en plus émerveillée, puis happée, enroulée, entraînée à l'intérieur du livre.

Il y a tant de choses dans ce livre excellemment traduit par Marie Bisseriex. Nous sommes en Caroline du Sud, dans les années 40 et 50, nous suivons à la fois Sarah, qui s'est retrouvée avec un fils adoptif presque par hasard, veuve ensuite très vite, qui aime son fils mais ne sait pas comment "être une bonne maman" et Mama Red, qui incarne la quintessence de la fibre maternelle. Pour gagner de quoi nourrir son fils, Sarah décide d'acheter un veau afin que son fils puisse le dresser et gagner le prix d'un concours local organisé par un éleveur peu scrupuleux. Ce veau que lui vend ce même éleveur a pour maman Mama Red. Ainsi ces deux là, Sarah et Mama Red, vont-elles être amenées à se rencontrer.

En voyant ainsi le sentiment maternel incarné par Mama Red, Sarah va enfin libérer ses émotions, oser des gestes affectueux, alors qu'elle était persuadée depuis toujours "n'avoir aucune once de fibre maternelle en elle". C'est aussi l'occasion pour elle de raviver ses souvenirs : son enfance auprès d'une mère glaciale et castratrice, sa rencontre avec Harold, son amitié avec Maddie, la naissance de son fils, Emerson Bridge... Petit à petit, les blancs dans le roman se remplissent et la psychologie des personnages s'éclaire, notamment celle de Sarah, avec infiniment de subtilité et de sensibilité.

Sarah va aussi se découvrir des trésors d'ingéniosité et d'énergie pour mener à bien avec son fils l'entraînement du veau, auquel elle ne connaît rien au début... Une mission d'autant plus délicate que l'abattoir attend chaque année le vainqueur au même titre que les autres... et Ermeson Bridge, s'est très vite attaché à son veau.

En plus de Sarah et de Mama Red, nous suivons des personnages tous plus justes et vrais les uns que les autres, l'éleveur Luther Dobbins "Big LC" , son fils "Petit LC", sa femme Mildred, le propriétaire de la maison de Sarah auprès de qui celle ci a des arriérés de loyers et qui se rêve éleveur.

C'est l'un des livres les plus originaux et les plus poignants que j'ai lus. L'émotion est magnifiquement présente et remarquablement dosée. Et l'amour filial, surtout l'attachement maternel est - c'est suffisamment rare pour être signalé - très très joliment traité, comme l'est aussi cette cause juste mais très galvaudée aujourd'hui du bien être animal sans oublier une dénonciation des inégalités sociales et du dénûment que ne renierait pas John Steinbeck. Au nature writing, j'ajoute désormais le farm writing parmi mes genres de prédilection.

Un grand merci à Léa Touch Book du Picabo River Book Club et aux remarquables éditions le nouveau pont pour cette superbe lecture
Commenter  J’apprécie          110



Ont apprécié cette critique (11)voir plus




{* *}