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Critique de Grecie


Grecie
15 septembre 2015
Voici l'un des romans les plus intelligents et les plus sensibles que j'ai lus de ma vie.

Mary est une quadragénaire qui a renoncé depuis longtemps à sa vie de femme. Elle excelle dans sa profession, car elle est d'une intelligence rare (quoique assez dénuée d'empathie), mais, disons-le, elle est bien partie pour passer à côté de ce qui fait l'essence de l'existence humaine. Voici que se place sur son chemin Tim, un jeune homme de vingt-cinq ans merveilleusement beau et parfaitement candide. Car Tim est mentalement déficient.

De cette rencontre improbable, Collen McCullough a fait une histoire d'amour tendre et singulière, qui porte aussi à réflexion.

J'ai tendance à me considérer comme ouverte d'esprit, mais j'avoue mon ignorance totale en ce qui concerne les états d'âme et le ressenti des gens comme Tim. À lire les premières pages du roman, comme Mary, je m'attendrissais comme devant un enfant et je me disais, avec regret, même, qu'il était impossible que ce lien tendre et complice évolue vers un lien de couple. Mais doucement, subtilement, l'auteur déchire le voile. Tim n'est pas un enfant. « Tim est un adulte (…) S'il avait été blessé à la jambe, il boiterait, comme c'est son cerveau qui est atteint, il boîte mentalement. Et ce genre de handicap ne l'empêche pas plus qu'un boiteux d'être un homme. (…) Pourquoi devrait-on lui dénier sa virilité ? »

Et ce qui peut paraître étrange (un lien amoureux et charnel avec un partenaire déficient mentalement) devient tout-à-coup parfaitement normal. le sentiment en est même magnifié, car, en effet, tout sépare Mary de Tim. « Rien ne vous lie tous les deux, si ce n'est votre amour, n'est-ce pas ? Il existe entre vous des différences d'âge, de beauté, d'intelligence, de fortune, de rang, de milieu, de tempérament… (…) Les liens sentimentaux qui existent entre vous sont authentiques, assez authentiques pour transcender toutes ces différences. » On a rarement vu à l'oeuvre un amour aussi pur, aussi dénué de considérations autres que le sentiment lui-même.

En dehors de ce lien qui unit Mary et Tim, d'autres personnages évoluent, parmi lesquels les merveilleux parents du jeune homme, et font de ce roman une petite pépite pleine d'humanité. Qui, du reste, ne s'encombre pas de parler « politiquement correct ». Plusieurs fois, le mot « débile » revient dans le texte pour mettre en valeur sans équivoque la difficulté d'être ce qu'est Tim dans une société très normée. Contrairement à ceux qui cachent sous un vocabulaire très lisse désintérêt et sécheresse de coeur, Colleen McCullough l'ancienne infirmière couche sur le papier les mots crus et c'est toute sa générosité pour les plus faibles qui vibre sous sa plume.
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