L'aveu posthume est aussi violent que l'aveu du vivant, peut-être plus même, qui ne laisse aucune place pour l'interrogatoire. (p. 330)
Dans un mois, je fêterai mon quarantième anniversaire. Il est temps que ma vie commence. Je la vois comme une montagne dont je viendrais de terminer l'ascension. J'arrive courbaturée jusqu'à vous et pour tout dire assez fatiguée. Je suis à mi-chemin, la descente est encore longue et elle promet d'être belle. Je dois juste m'alléger avant de l'entamer. Disons que ma mère m'aurait beaucoup trop couverte pour le voyage, je vais laisser des affaires ici avant de poursuivre mon chemin. (p. 18-19)
- La mort détruit tout sauf si l'on cultive la mémoire des défunts, disait mon père, fort de l'expérience de son peuple*. (p. 224)
[* d'origine juive]
"Elle hait ces écrivains impuissants, petits larbins de l’imaginaire qui ne sauront jamais décrire ce que fut la sensation de respirer le même air que Rosa, ces auteurs qui ne savent même pas inventer le mot pour dire son chagrin, l’obligeant à fabriquer celui, vulgaire, de soeurpheline."
La révolte assèche la tristesse, c'est une vertu.
Il y a des étreintes qu'il faut savoir refuser, celles dont on ne sait si elles sont une tendresse ou une entrave. (p. 257)
On se dit qu'on a le temps, inutile de précipiter les grandes explications, elles seraient mesquines et vilaines; attendons que se dégonflent les peines; on se dit qu'un jour le moment viendra de donner des réponses, d'oser des questions;
le moment entre eux n'est jamais venu.
Peut-être était-ce même le but de tout ce voyage: vivre intensément sur un socle vierge et puis partir sans rien garder, ne surtout pas rapporter ce qui pourrait encombrer l'avenir.
Pendant des années, elle pleure chaque matin en silence. C'est une longue nuit sans étoiles, épaisse et sale, du goudron qui colle à ses yeux. (p. 91)
Les promesses de cimetière
sont les plus cruelles des geôlières.
(p. 299)