Une carrière de sportif, c'est court. Plus ou moins selon les disciplines, mais c'est toujours court, bien plus que n'importe quelle autre carrière professionnelle.
Et la fin est très difficile à gérer. Il s'agit de savoir s'arrêter "au bon moment", ne pas faire la saison de trop, sans se priver de belles années non plus.
Sans compter que s'il est délicat pour tout un chacun de quitter un métier que l'on aime et de se retirer de la vie active, le sportif cumule d'autres difficultés. S'arrêtant jeune, il lui faut se trouver quelque chose à faire, et lui qui a vécu sous le feu des projecteurs doit s'habituer à ne plus avoir autant d'exposition médiatique, voire à ne plus en avoir du tout selon les cas. Les plus prévoyants s'y préparent, d'autres non, mais tous ont un pincement au coeur au moment de raccrocher les crampons, les pointes, la raquette, etc.
Ceux, oui, CEUX désigne en bon français à la fois les femmes et les hommes dont on parle, nul besoin d'employer le lourdingue "celles et ceux", encore moins le grammaticalement faux "toutes celles et ceux", bref, nul besoin de faire du pseudo féminisme à deux balles, les vrais combats sont ailleurs : allez lutter contre cette abomination qu'est l'excision, allez sauver des fillettes prépubères d'odieux mariages forcés... les réels sujets ne manquent pas, hélas ! Et laissez la langue française tranquille, merci.
Bon, je reprends : ceux dont les portraits sont brossés dans ce livre ont eu la chance de ne pas connaître la souffrance de la retraite sportive. Mais, est-ce vraiment une chance ?
Pas vraiment.
Qu'ils soient morts dans l'exercice de leur sport ou pour diverses autres raisons, ces sportifs ont été fauchés en pleine jeunesse, la vie a été cruelle avec eux, ne leur octroyant que de trop maigres années.
J'ai aimé le côté "inventaire à la
Prévert" de l'ouvrage dans lequel on trouve pêle-mêle des cyclistes, des boxeurs, des footballeurs, des rugbymen, des pilotes de formule 1, et d'autres.
Christian Montaignac a été journaliste au journal L'équipe pendant près de quarante ans et connaît très bien son sujet.
Chaque portrait est précédé d'un très beau dessin (bravo Bertrand Vivès !) et des dates de naissance et de mort de la personne dont il va être question. J'avoue (déformation professionnelle...) que je n'ai pu m'empêcher à chaque fois de calculer : oh, là, là, 28 ans ; pff, 32 ans... quel gâchis !
Si chacun se doute bien que la formule 1 ou la boxe sont des activités dangereuses ("On estime à plus de cinq cents le nombre de boxeurs morts à la suite de combats depuis les règles fixées en 1884"), et que personne ne s'étonne que la mort y prélève de temps à autre son tribut, d'autres sports à l'air plus inoffensif ont pourtant généré leur lot de tragédies.
D'autres morts surviennent hors du champ sportif : untel meurt d'un accident de voiture en rentrant chez lui après une victoire trop arrosée, tel autre meurt bêtement... il y a tellement de façons de mourir, et le sportif n'est pas plus à l'abri que le citoyen lambda.
On trouve vraiment toutes les morts possibles dans ce livre, y compris le meurtre et le suicide : "
Les tragiques" est un titre très bien trouvé !
Dans la succession des portraits, j'ai retrouvé des figures connues, comme
Ayrton Senna, et une majorité de noms que je ne connaissais pas du tout et dont j'ai aimé découvrir l'histoire.
Rien d'exhaustif, bien sûr : chacun n'a droit qu'à quelques pages, et certains récits qui m'ont touchée m'ont donné envie de chercher davantage d'informations.
Une lecture instructive, qui intéressera les passionnés de sports et les simples amateurs.
Je remercie Babelio de m'avoir proposé cet ouvrage dans le cadre d'une Masse critique privilégiée, et les éditions en exergue pour l'envoi de ce bel objet.