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Citations sur Libération (11)

[...] il existe une forme de communication plus sensible et plus fiable que la parole : à travers le regard, le silence, les gestes, et des messages encore plus subtils, un être humain peut répondre à un appel lancé par un autre ; dans les situations de danger, cette connivence muette exprime mieux que tout aveu ou toute discussion, et sans équivoque possible.
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La folie n’a aucun but. Le fou fait quelque chose, sans raison et sans but, comme ça, il s’arrache les dents avec un clou rouillé, ou se met à éructer en norvégien, sans aucune signification. Cette nuit, ces malades mentaux vont « accomplir quelque chose ». P 106
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Et puis, tout le monde était fatigué. Compassion, entraide, tout sentiment élevé avait disparu. Chacun attendait la mort à tout instant, la bombe ou l’obus ou encore cette aventure terrible que représenterait le changement de régime, un bouleversement dont personne n’était capable de mesurer à l’avance les conséquences. P 25
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«Vous êtes un homme orgueilleux», fait soudain Elisabeth. Elle n'a pas plus tôt prononcé ces paroles qu'elle les regrette mais elle sent qu'elle ne peut faire autrement, il faut qu'elle exprime tout ce qui lui passe par la tête, maintenant. L'homme la regarde , une lueur froide et sombre dans ses yeux gris.
«Orgueilleux? demande-t-il en faisant traîner sa voix. Vous trouvez?» Cette fois, le ton est sévère.
Il fait un signe, comme s'il se résignait à répondre à cette accusation.
«Vous avez raison. Je suis orgueilleux, déclare-t-il tranquillement. C'est dans ma nature. Il m'est impossible de me défendre autrement dans ce monde.»
Elisabeth dit vivement, comme si elle y était obligée:
«Les juifs sont tous orgueilleux.»
L'homme ne bouge pas, ne remue pas un cil; il parle comme quelqu'un qui a entamé il y a fort longtemps, dès le début de sa vie, cette discussion dont il connaît précisément les arguments pour et contre, les questions et les réponses, il répond patiemment, même à l'impossible, il en a l'habitude, parce que cette discussion éternelle dure toute la vie.
«Les juifs sont des êtres humains dit-il de son ton professoral et monocorde, par conséquent, il y a parmi eux des orgueilleux. il y a aussi des rapiats, des voraces, des lubriques et des voleurs. Il y en a qui aiment tricher, d'autres qui mentent. Mais les juifs sont comme ça parce que ce sont des êtres humains, dit-il calmement. Les juifs, mademoiselle... les juifs sont divers. Ceux qui croient qu'il n'y a qu'une sorte de juifs ne les connaissent pas. Les juifs ne sont pas tous pareils», dit-il en élevant la voix.
[...]
Elisabeth soupire:
«[...]. Mais j'ai toujours pensé que les juifs étaient orgueilleux. Je ne sais pas s'ils se considèrent comme le peuple élu... Il se peut que ce soit une forme de propagande antisémite. C'est plutôt une forme d 'orgueil... comme si nous autres ne savions pas quelque chose qu'eux, les juifs savent.»
L'homme sourit de l'air de celui que la discussion amuse:
«Vous voyez, C'est peut-être là que se trouve la cause du malentendu. La généralisation, voilà le problème, la seule cause de tous les maux. Vous êtres de bonne volonté mais vous dites ausssi: eux, les juifs.. Vous aussi, vous croyez que les juifs partagent un secret commun, quelque chose qui les relie. Mais ce n'est pas vrai Mademoiselle, dit-il , sérieux à présent, grave, presque solennel. Les juifs, c'est une généralité, C,est comme si vous disiez les chrétiens... Il y a des juifs et il y a des chrétiens, et il est évident que l'origine, la religion, le mode de vie, l'ethnie induisent des traits spécifiques communs... Mais les juifs diffèrent plus entre eux qu'il ne se ressemblent. Croyez-moi... [...] Mais oui, ça doit être vrai qu'il sont orgueilleux, dit-il gravement. L'orgueil est un défaut, un péché peut-être aussi. Chacun expie par où il a pêché. Toutefois, ne pensez-vous pas que les juifs ont payé tous leurs péchés réels et imaginaires, ces temps-ci ?... [...]»
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C'est la guerre qui est là, on l'entend haleter. On dirait un monstre penché sur chacun dans le noir : on sent son haleine sauvage et fétide, son souffle brûlant sur le cou des sacrifiés.
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Que se passe-t-il dans l’âme des hommes à présent qu’ils ont perdu ce qui fait d’eux des êtres humains ? Que se passe-t-il dans l’âme d’un être resté fidèle à un pacte implicite et explicite entre les hommes et à la solidarité, dans un monde qui renie toute loi humaine et qui, pris d’une rage insensée, se détruit ? (…) Quelle peut être la motivation d’un homme comme le sabbathien ? Ce n’est pas l’argent. Il ne promet rien, n’implore pas, ne hait point, ne veut rien, n’a pas de projets à long terme. Il se contente d’agir alors que tous sont terrifiés d’agir ; il “accepte” quelque chose alors que les seules pulsions animant les hommes sont un égoïsme sauvage et un instinct de survie qui les fait gémir et geindre… Est-ce parce qu’il est croyant, que c’est un homme de foi ?... Peut-être. Mais peut-être est-ce tout simplement un homme, dont l’âme et le corps sont régis par une seule et même loi, une pulsation vitale contre laquelle il ne peut combattre. Cent mille personnes n’ont pas apporté d’aide ; celui-là seul a bien voulu. Et on ne peut percer à jour le “secret” de cette homme-là.
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C'était comme si, dans les ultimes instants de péril, toute une société perdait ce qui lui restait de dignité humaine : les gens dénonçaient en masse, écrivaient des lettres anonymes ou non ; se déplaçaient en personne, pour donner le nom d'un malheureux qui, dans ce dernier tourbillon de folie meurtrière, s'était traîné, à bout de souffle, dans le coin le plus reculé d'un refuge ...
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La troisième nuit qui suivit le nouvel an - au vingt-quatrième jour du siège de Budapest -, une jeune femme prit la décision de quitter l'abri d'un grand immeuble du centre ville assiégé où elle habitait, pour passer de l'autre côté de la rue transformée en champ de bataille et rejoindre, par n'importe quel moyen et à n'importe quel prix, l'homme qui se terrait depuis trois semaines avec six compagnons dans l'abri de l'immeuble d'en face, à l'intérieur d'une cave étroite et entièrement murée.
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"Il y a un instant,la guerre vivait encore dans l'âme d'Elisabeth,pas seulement sur les champs de bataille,dans les airs ou sous les mers.la guerre était aussi une sensation,une sorte de pensée fantomatique qui envahissait son corps et son âme,à l'état de veille ou de sommeil."

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C'est comme si les habitants de la cave étaient devenus fous, qu'ils se déshabillaient, brûlés par une chaleur insupportable, comme si un incendie latent embrasait soudain les profondeurs de l'immeuble, comme si on ne pouvait plus attendre ou se préparer; il faut parler, dire ce qu'on a tu, pas seulement la veille, et les dix-huit jours et nuit précédents, mais depuis plus longtemps, pendant des années, pendant toutes les périodes d'infinie souffrance de la vie.
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