Citations sur Hors saison (14)
"Yann voulait voir. Il voulait assister, être témoin de ce qui allait advenir, continuer à vivre, à s’imprégner, à arpenter cette station et ce recoin isolé de montagne qui, chaque jour, se vidaient, se retiraient, et s’effaçaient un peu plus du monde. Il se sentait empli d’une excitation et d’une impatience sourdes, investi d’une mission d’observateur des événements, du basculement en cours, comme un gardien de phare contemple la tempête, fasciné par l’ampleur des ravages à venir."
"Ce soir-là, après le diner, Yann emporta un plan des pistes dans sa chambre et le contempla avec l’impression qu’il y découvrirait quelque chose qu’il n’avait pas encore vu, un relief, une piste, un sentier, essayant d’évaluer les distances et se demandant de plus en plus ce qu’il pouvait bien y avoir au-delà du domaine, quand on pénétrait dans les bois."
"Plusieurs voyageurs regardaient dehors et profitaient de ce moment rare, où il n’est d’autre activité possible que la contemplation et l’observation, des moments propices aux rêveries plus intimes, où les pensées s’échappent vers des territoires qu’on n’explore plus beaucoup."
Aux côtés de Hans, il avait l'impression de s'ancrer, de grandir, il se nourrissait, s'emplissait de l'attention et de la tendresse qu'il lui portait, tout en sachant que ces instants étaient éphémères, une réalité fragile qui avait eu si peu de chances d'advenir.
Pour Yann, qui commençait à bien le connaître, il était comme un bel arbre qui s'effeuille, rongé de l'intérieur par des parasites.
La lune était faible, seul un croissant fin commençait à émerger par-dessus les crêtes. Yann en suivit la lente ascension de son regard inhabité et son esprit hypnotisé se délesta des lambeaux sombres qui s'accrochaient encore à leui. La nuite le rendait sensible à tout ce qui s'étendait autour de lui, aux distances, à la clameur des bêtes nocturnes et aux émanations de la terre.
Ils s'accrochaient à leur contrat et à leur préavis comme des naufragés à un rocher battu par les vents et menacé par la tempête silencieuse qui s'approchait.
Tu poses les bonnes questions. Et puis, tu me parais être quelqu'un qui écoutes, observes et attends avant de te faire un avis sur les choses et les gens. Je trouve ça bien.
Qu'il appréciait le vide de la station, l'absence de la foule, la possibilité d'appréhender le lieu de son dénuement le plus sobre, comme lorsqu'on arrive en avance et qu'on peut prendre le temps qu'il faut pour se préparer à un rendez-vous important.
En contemplant cette bâtisse à la grandeur terne, il retrouvait ce qu'on ressent lorsqu'on contemple un livre d'histoire, cette perception du temps qui passe comme quand on tient entre les mains des cartes postales anciennes, qu'on se rend compte à quel point les lieux qu'on connaît ont changé, changent et se transformeront encore.