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Critique de Arthur409


Ce roman est mon premier contact avec l'oeuvre de Marie Ndiaye. le thème est un « récit biographique » dans lequel la carrière de « La Cheffe », cuisinière de grande renommée, est évoquée par un de ses collaborateurs qui l'a suivie sur une partie de sa carrière.
Ce collaborateur, qui est aussi le narrateur, essaie de percer le mystère de cette femme qui fuit les honneurs, qui est très secrète et ne montre qu'une figure lisse et sans expression à ceux qui veulent l'approcher.
Le récit commence à l'adolescence de la Cheffe, quand sa vocation se révèle presque par hasard. Ce passage tient une grande partie du roman, car c'est la clé pour toute la suite. C'est en réalité l'analyse de la naissance d'une vocation artistique. Car la cuisine est un art, bien sûr, mais ce qui est évoqué ici pourrait aussi bien s'appliquer, comme d'ailleurs c'est écrit en toutes lettres dans le livre, à la littérature, à la peinture, à la musique…
Le travail de création demande à l'artiste de s'isoler, au propre comme au figuré, ce qui a des conséquences parfois lourdes sur la vie sociale et affective. le cas de la Cheffe, qui consacre toute son énergie et son temps à son métier, peut faire penser par exemple au cas de Paul Gauguin abandonnant sa famille pour se consacrer à la peinture, ou à Glenn Gould vivant reclus après avoir renoncé à tout contact avec le public en concert.
La Cheffe semble donc supprimer de sa vie tout ce qui n'est pas son art, elle consent tout de même à élever sa fille, mais rencontre là un réel échec.
Sa vie n'est pourtant pas vide, car toute sa science et ses efforts continuels n'ont qu'un but, et ce but est altruiste : satisfaire ses clients en allant même au-delà de leurs attentes, en leur proposant des plats qu'ils ne connaissent pas, qu'ils ne peuvent donc pas réclamer, mais dont elle pense qu'ils leur apporteront quelque chose, une sorte de révélation. Cela commence avec le couple des Clapeau, les employeurs auprès desquels elle débute, puis avec les habitués de son restaurant, et cela tout au long de sa carrière, même quand elle sera « étoilée ».
J'ai retrouvé ici un thème voisin de celui d'un roman de Ito Ogawa, "Le restaurant de l'amour retrouvé" .
J'ai mis un peu de temps à lire ce livre, car le style de Marie Ndiaye demande un réel effort au lecteur : les phrases sont longues et très élaborées, souvent complexes, je m'y suis parfois repris à deux ou trois fois pour en saisir la construction et le sens. Je constate d'ailleurs qu'il ne figure pas au catalogue de l'Association des Donneurs de Voix, dont je fais partie, car enregistrer ces pages doit demander un effort tout particulier.
Mais ne serait-ce pas un parallèle avec la cuisine de haut niveau, où il faut procéder par petites bouchées que l'on mâche longuement pour révéler toutes les nuances subtiles de la recette ?
Il faudra que je voie, en lisant d'autres oeuvres de Marie Ndiaye, si ce style est particulier à « La Cheffe », ou si c'est sa marque de fabrique
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