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Critique de Tibere


Tibere
09 septembre 2012
Reflet flamboyant d'un Paris en pleine déconfiture morale, métaphysique et en train de se consumer (« La Ville Eteinte » devrait remplacer le surnom de « Ville Lumière » !), l'homme qui arrêta d'écrire est surtout l'histoire d'un écrivain qui passe une période de troubles, tel un Dante entrant dans cette sinistre forêt du Doute, qui l'amènera ensuite à franchir les portes de l'Enfer.
D'ailleurs, il est assez évident de constater que ce roman est bourré de références à la Divine Comédie, ne serait-ce par sa structure en trois parties (Enfer –Purgatoire – Paradis) et par certains personnages (Jean-Phi le Blogueur étant le Virgile accompagnant l'auteur dans sa traversée jusqu'au Paradis, Emma incarnant ensuite la Béatrice du Paradis…)

L'auteur ne veut donc plus écrire. Il décide de « vivre la réalité » et donc accepte de laisser triompher le mensonge du matérialisme, d'entrer pleinement dans cette modernité infernale. Il y a beaucoup de passages marquants dans cette première partie. On y voit des célébrités désabusés du petit écran, des stars pas vraiment éclatantes se trémousser dans le Baron, une boite de nuit « branché » c'est-à-dire sinistre et triste. On se marre franchement dans certaines scènes, comme la conférence de presse de Canal+ ou la réunion des écrivains dans le Train Bleu de la Gare de Lyon. Tout ces gens ne sont pas heureux. Personne ne semble savoir ce qu'est l'écriture, tant ils sont agités et incapable de prendre du recul. Ils vivent dans le temps présent, sans passé, ni futur (et donc espoir). Ils ont laissés toute espérance dans ce Paris infernal.

Vint ensuite le temps du Purgatoire, qui se métamorphose dans une nuit dans l'hôtel Amour, où l'on fait connaissance avec les âmes qui ont vécu l'enfer, mais qui ont décidé de se repentir. Certains personnages sont réellement attachant, Zoé qui aime les écrivains, Liza et son « Non, je rigole ! ». C'est dans cette partie que l'on rencontre un des dialogues les plus longs du livre, entre l'auteur et le « Libre Penseur » sur les attentats du 11 septembre. Si on comprend le but de l'auteur de montrer que la thèse complotiste est ringarde et fausse, on s'agace un peu de la longueur de l'exposé.

C'est finalement avec la disparition du Jean-Phi dit Virgile et l'apparition de cette Emma dont l'auteur tombe amoureux que l'on rentre réellement dans le Paradis à travers la remontée des Champs-Elysées parisien. Beaucoup plus symbolique et parfois ponctué de scènes étranges sinon absurdes sur le coup, on y croise des personnages qui sont encore dans l'estime de l'auteur, je pense en particulier à Alain Delon, dernier modèle de l'acteur vivant français.
L'homme qui arrêta d'écrire va peu à peu recommencer à penser à l'écriture grâce à la Femme. Il ne vivre pas avec elle, mais elle lui donnera l'impulsion pour reprendre l'écriture à nouveau. Emma le dit dès sa première rencontre avec l'auteur, « Tout est circulaire chez vous ». Un éternel retour. On ne se défausse pas aussi facilement de l'écriture ! Elle reviendra d'une manière ou d'une autre. Et cette épopée dans ce Paris postmoderne formera une excellente trame pour écrire un roman. La boucle est bouclée.

En fin de compte, après avoir lu cet ouvrage, il est tout à fait compréhensible que les milieux éditoriaux actuels ne lui aient pas décerné de prix littéraires. La vanité et le mépris ont eu raison de l'originalité et de la joie de ce livre. Certes, il n'est pas parfait, on ressent certaines longueurs par moment, mais c'est véritablement un livre puissant et plein d'espoirs au fond. Pas forcément sur notre monde actuel, mais sur les âmes vivantes qui restent encore présente ici-bas. Et il y en a ! Il y en a…
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