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Critique de Antyryia



Le 17 mai dernier, les éditions Hugo ont décerné pour la première fois deux prix du meilleur thriller. Parrainé par Michel Bussi, le tricycle rouge de Vincent Hauuy a remporté le prix du meilleur thriller français tandis que c'est ce livre - Notre petit secret de Roz Nay - qui a été élu meilleur thriller étranger, prix parrainé par Douglas Kennedy. Mais dans un pays qui compte plus de deux mille prix littéraires ( un record ! ), peut-on accorder un réel crédit à ces multiples oeuvres récompensées ou la stratégie est-elle uniquement commerciale ?

Nombreux sont les auteurs qui ne tarissent pas d'éloges sur la qualité de ce premier roman de Roz Nay : Ruth Ware, Mary Kubica, Chevy Stevens ou encore Andrew Pyper l'encensent en effet sur la quatrième de couverture de la version outre-Atlantique.
Pour ma part, je ne serai pas aussi catégorique. Avec un tel titre, je m'attendais à un de ces nombreux thrillers psychologiques où à grand renfort de mensonges et de dissimulations l'auteur parvient à égarer son lecteur et lui réserve à chaque fin de chapitre un retournement de situation, une succession de révélations. Mais on en reste assez éloigné ici même s'il y a bien une certaine manipulation.

L'héroïne, Angela Petitjean ( PJ ), est interrogée par le policier Novak au sujet de la disparition d'une dénommée Saskia. Tout le roman consiste à reproduire cet interrogatoire dans lequel Angela racontera une bonne partie de sa vie d'adolescente et de jeune adulte de ces dix dernières années. Pour que le lecteur se souvienne de la particularité de cette narration, les longues séquences souvenirs alternent avec des questions, des remarques ou des accusations du flic.
"J'ai l'impression d'être une catholique au confessionnal, avec le prêtre dans le même compartiment que moi."
L'aspect policier ne tient qu'à un fil. le seul suspense, c'est de savoir ce qui est arrivé à Saskia, et pour le savoir il faudra lire jusqu'au bout cette histoire. Elle a disparu, et plus si affinités.
Est-elle morte ? Si oui qui, quand, comment ?
"Avez-vous fait du tort à Saskia pour prouver que vous aviez raison ?"
"Saskia est-elle morte, Angela ? Prisonnière ? Ou pire ?"
Mais oui, le roman est construit de façon à ce qu'on ait envie de savoir, le maigre fil tient bon et les pages se tournent facilement.

Mais le chemin est long pour y parvenir, parce qu'il est surtout question de la biographie amoureuse d'Angela. Qui tient en un nom : Hamish Parker ou HP. Même si elle se garde bien de le qualifier ainsi, il est son âme soeur. D'abord bons amis, HP enchaîne les conquêtes tandis qu'Angela, qui se persuade ne pas en vouloir davantage, se contente provisoirement de cette relation amicale et platonique.
"On était amis. On était bien ensemble et on se connaissait par coeur."
"Je n'étais pas comme la plupart des adolescents, les vrais sentiments avaient de l'importance. Un baiser devait avoir du sens."
Mais ces deux-là sont faits l'un pour l'autre. Même leurs amis ou leurs parents en sont persuadés. La mère d'Angela elle-même encourage cette relation, comme si elle savait d'instinct qu'HP serait tôt ou tard son gendre.
Et en effet, les deux finiront par se trouver.
Après quoi plus rien ne sera pareil.
"Une fois actionnée, la lumière qui nous éclairait n'a plus jamais été la même."
Mais deux choses viendront barrer la route à leur passion. La première, ce sont les études d'Angela qui va être scolarisée à Oxford, en Angleterre ( le livre se passe à Cove dans le Vermont ). Un amour adolescent, aussi intense soit-il, peut-il survivre à huit mois de séparation ?
Et la seconde raison est Australienne.
Elle s'appelle Saskia.
"Je ne suis pas en compétition avec elle. Elle est ennuyeuse et prévisible."

Je ne suis pas sûr que "thriller" soit le terme le plus adapté pour cataloguer un roman dont les principaux rebondissements sont amoureux. Qui HP va-t-il choisir ? Angela va-t-elle succomber aux charmes de Freddy à l'université ? Les âmes soeurs vont elles être réunies ? Jusqu'où Angela est-elle prête à aller ?
Autant de questions dont - à part la dernière - on se fiche un peu des réponses. Enfin, même si le livre est bien écrit, que la lecture est facile, que la curiosité est aiguisée, le roman finalement donne une trop belle part à ces sentiments entre jeunes adultes. Et même si les réflexions ne sont pas toutes puériles, que les analyses de ces sentiments sont faîtes avec une relative justesse, d'autres passages sont à mon sens très clichés ou peu crédibles.


Notre petit secret est le roman d'une obsession amoureuse maladive, traîte de la jalousie malsaine et d'une possessivité exacerbée.
"Tu es jalouse et collante !"
"Et tes amitiés sont perverses."
Les réactions excessives d'Angela et son attitude hautaine avec le policier qui l'interroge la rendent d'emblée plutôt antipathique, mais aucun autre protagoniste n'est véritablement attachant. Pour autant, si l'empathie ne fonctionne pas, l'identification reste possible dans la mesure où nous avons quasiment tous été confrontés à des chagrins d'amour douloureux, qui ont pu parfois créer des idées ou des réactions démesurées.
Quant à l'enquête policière qui ponctue à doses homéopathiques l'histoire, on connaît le mobile, on connaît celle qui semble être la principale suspecte, par contre on ignore le sort de la potentielle victime et les circonstances de cette disparition.
Si vous allez au bout de cette exploration des conséquences d'un premier amour perdu, alors vous aurez droit à quelques révélations un peu plus intéressantes, notamment en fin de première partie, et à une conclusion plutôt originale et réussie.
Mais c'est insuffisant pour faire de ce livre un incontournable du genre.

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