AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de OuvrezLesGuillemets


Immersion totale et envoûtante dans le Londres de la fin du XIXe.

Février 1908, à la demande de son amie, la célébrissime actrice Ellen Terry, l'auteur Bram Stoker lui envoie tous les souvenirs écrits qu'il lui reste de leur ami décédé depuis peu, l'acteur Henry Irving.
Tous les trois ont, pendant de nombreuses années, redonné vie au théâtre du Lyceum à Londres, célèbre notamment pour ses représentations de pièces de Shakespeare.

« le Lyceum est couvert de chaînes, le verre des tableaux d'affichage brisé, les marches de l'entrée recouvertes de feuilles mortes et de bouteilles cassées. le porche sert de latrines aux gens de la rue ; les cadenas des portes principales sont noirs de rouille. Plus loin dans la rue, la splendeur de marbre de l'opéra Royal toise le Lyceum d'un air condescendant mêlé de pitié. Pauvre trou misérable. »

Toute ressemblance avec la forme épistolaire du roman Dracula n'est bien sûre pas fortuite. S'enchaînent ainsi des pages de journal, quelques retranscriptions d'enregistrement audio ou encore des liasses de notes, parfois très énigmatiques. Création dans la création, l'auteur se plait à imaginer qu'elles auraient pu être les sources d'inspiration de Bram Stoker dans l'écriture de son chef d'oeuvre. Et les références sont nombreuses, tantôt évidentes quand il s'agit du nom de certains personnages, tantôt plus discrètes. Je pense d'ailleurs que certaines m'ont échappé, ma lecture de Dracula n'étant pas récente.

Ce qui aurait pu juste être une belle idée de départ est magnifié par une écriture qui donne à chaque lieu, chaque personnage, authenticité et profondeur. L'effervescence d'une représentation au Lyceum, l'atmosphère angoissante des rues de Londres alors que Jack l'éventreur y rode, ou encore le mystère qui règne dans l'antre de Mina, tout est minutieusement décrit et prend vie sous nos yeux.

« Ciel pourpre taché de sang, marbré de traces de doigts noires et d'une poignée d'étincelles d'or. Puis une aube laiteuse se lève au-dessus des marais, des bleus pâles, des gris, des verts boueux, pareils à l'aurore sur une aquarelle de jeune vierge. Hêtres vacillants ici et là, sorbiers, grands érables, puis une rangée royale d'ormes battus par les vents, et le V d'une volée d'oies sauvages s'élançant à travers le vaste ciel, telle une flèche pointée vers quelque immensité. »

Les acteurs de ce spectacle victorien ne sont pas en reste. Exubérants ou mélancoliques, sublimes ou terrifiants, parfois au bord de la folie, ils sont tous superbement incarnés. Henry Irving a-t-il réellement inspiré Bram Stoker pour son Dracula, le mystère reste entier, mais la fascination qu'il a dû exercer fait elle peu de doute.

Un univers chatoyant, parfois sombre et étrange, qui oscille en permanence entre le réel, l'imaginaire et le surnaturel pour nous replonger avec délectation dans les récits gothiques du XIXe.

(Un grand merci à ODP31 dont la critique m'a permis cette belle lecture).
Commenter  J’apprécie          132



Ont apprécié cette critique (13)voir plus




{* *}