Très bonne surprise que ce classique japonais.
Plongés en apnée avec Bird dans une situation étouffante où il rejette en bloc la réalité de son fils né difforme, on se retrouve à partager les angoisses de cet homme sans grande hauteur morale, qui subit sa vie davantage qu’il ne la mène, et on traverse cette histoire comme lui, en spectateur détaché de sa propre réalité.
A lire sans hésiter
Bird se mit à pleurer. La tête pansée, comme Apollinaire... Cette image avait simplifié ses sentiments, leur avait donné un sens. Il se sentait devenir bêtement sentimental, mais en même temps il avait l'impression d'être justifié, et il découvrait même une certaine douceur à ses larmes. Mon fils a été blessé comme Apollinaire, sur un champ de bataille inconnu, et il en est revenu avec des pansements autour de la tête. Il faudra que je l'enterre comme un soldat mort à la guerre...
Bird continua à pleurer.
C'est peut être la jalousie qui l'a fait parler comme elle l'a fait, dit-il, mais ça n'ôte rien à la portée de ce qu'elle m'a dit.
Je ne suis ni assez diabolique pour étrangler ce bébé de mes mains ni assez angélique pour mobiliser une armée de médecins et les supplier de sauver la vie d'un enfant condamné à être un monstre.
Bird sentit, en parlant, qu'il était méprisable. Le médecin avait avait une lueur de dégoût dans les yeux.
Il est difficile de dire avec certitude s'il vaut mieux avoir vécu que ne pas être né.
Je n'ai pas cessé de m'enfuir, et je l'ai presque fait. Mais on dirait que la réalité nous oblige finalement à faire front...Je veux dire que, même si nous tentons de nous mentir, il vient toujours un moment où nous nous rendons compte que ce n'est pas possible indéfiniment.
Si le bébé n’a pas de foie, vous n’avez qu’à lui en mettre un ! On ne me la fait pas, à moi… Je leur ai dit : on fait bien des anus artificiels, vous devriez donc être capables de fabriquer un foie artificiel, ça ne doit pas être beaucoup plus difficile !
Un jour que j’étais ivre, je l’ai déflorée, presque violée, dans une cour, en plein hiver, sans même m’en rendre compte… Et maintenant, des années plus tard, je passe la nuit dans sa chambre, complètement soûl, et je ne me réveille que pour vomir. Quel salaud je suis !…
C’était la plus belle heure d’une journée d’été. Une brise qui lui rappelait ses excursions d’écolier caressa agréablement la joue de Bird, rougie par le manque de sommeil. Sa peau but avidement la douceur du moment présent et un sentiment de libération se fit jour dans sa conscience.