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Critique de jlvlivres


La traduction de « Les Métamorphoses » d'Ovide par Marie Cosnay (2017, Editions de l'Ogre, 528 p.) vient de sortir, après une dizaine d'années de dur labeur. On le comprend, car il s'agit de 12000 vers répartis en XV livres et narrant 246 métamorphoses. Cela va de la création du monde « Avant la mer et les terres et le ciel qui couvre tout, / le visage de la nature était un sur le globe entier » à la mort de César, transformé en étoile « tandis qu'on la porte, l'âme prend lumière et feu, /quitte le sein, vole plus loin que la Lune, / traîne une chevelure de flammes dans le vaste espace, brille en étoile ».
Texte superbe de Publius Ovidius Naso, né un an après la mort de César, estropié en courtisant la femme d'Auguste, sans doute victime d'une machination et d'un escalier bricolé par Virgile son rival. Comme quoi l'accession aux hautes fonctions de poète et d'amant sont parfois redoutables. Une introduction et une postface en forme de préface par Marie Cosnay éclairent le tout, suivies par un glossaire de 38 pages. Un utile rappel de ces familles qui eurent toutes leurs aventures et embrouillaminis. La traduction est, elle aussi, superbe. Commencée avec 3 livres (X, XI et XII) lorsque ces textes étaient au programme des terminales et publiée sous le titre « D'Orphée à Achille » (2011, Nous, collection Nobis, 109 p.). Avec cette belle introduction à la mort d'Orphée « Pour toi pleurent les oiseaux tristes, Orphée, et la foule des bêtes, / Pour toi les cailloux rudes et les forêts qui ont suivi tes poèmes / Pleurent ». Et quelques extraits publiés sur le site de Marie Cosnay en sa maison des écrivains. A ne pas confondre, toutefois avec « Des Métamorphoses » (2012, Cheyne, Grands Fonds, 88 p.).
Alors, qui faut-il admirer, la traductrice ou l'auteur ? Les deux, à coup sûr. L'un pour sa jeunesse « Ovide, ce jeune homme ». La première pour nous léguer ce texte, long, mais pas ennuyeux du tout à lire, parfois drôle, toujours d'actualité. Qu'on en juge entre la « traduction nouvelle » de Louis Puget et al, d'après le texte de Désiré Nisard de 1850 (1869, Firmin-Didot, 880 p.) et cette présente version. « Avant la création de la mer, de la terre et du ciel, voûte de l'univers, la nature entière ne présentait qu'un aspect uniforme ; on a donné le nom de chaos à cette masse informe et grossière, bloc inerte et sans vie, assemblage confus d'éléments discordants et mal unis entre eux » et « Avant la mer et les terres et le ciel qui couvre tout, / le visage de la nature était un sur le globe entier. / On le disait Chaos, matière brute, confuse, / Rien qu'un poids inerte, des particules / Amoncelées, sans lien, discordantes ». L'intérêt n'est pas ici de comparer, mais de constater que cette nouvelle traduction est tout à fait lisible, sans emphase ni grandiloquence.
Ah que n'ai-je eu Marie Cosnay comme professeur, moi qui ai accumulé des 0.25 en latin, le 0.0 étant éliminatoire, l'année du baccalauréat. Et qui ai eu ce dernier avec un 5.0, tout de même, en version latine. C'était en section C, il est vrai, ce qui n'excuse rien. Autant dire que mes lectures dans le texte original ont été limitées, tout comme celles en allemand. L'idée de changer l'ordre des mots pour lire en faisant des trajets d'escargots et de placer les verbes en queue de phrase pour faire patienter l'auditeur ou le lecteur, heurte profondément mon esprit quasi-cartésien. Des métamorphoses que l'on connaissait, d'autres qui étaient moins connues. La mythologie grecque et une partie des épopées revisitées. Ah qu'il est loin, où l'on écoutait Homère raconter tout cela au coin du feu sur une plage de Ios.
Donc tout commence par le Chaos initial, « du début du début du monde / jusqu'à mon temps ». On arrive très vite au livre II et à Phaéton qui s'étend sur 365 vers. Est-ce voulu, en référence au nombre de jours durant lesquels le char du soleil passe dans le ciel. Hélas Phaéton ne sait pas bien le maitriser, pas plus qu'il ne connait les noms des quatre chevaux qui le tire, soit Pyrois, Eous, Aéthon et Phlégon. Son père lui dit pourtant la route à suivre « Tu verras des traces de roue ». En vain, le permis à points n'était pas encore inventé, ni le réchauffement climatique qui récupère doucement la perte du char du soleil.
Et puis il y a Médée, je l'aime bien la Colchidienne amoureuse de Jason, qui va voler la Toison d'Or. Et surtout qui va faire croire qu'elle va rajeunir son oncle en faisant bouillir un bélier pour en faire ressortir un agneau dans une potion magique avec toutes les herbes et pierres.

Ce que contiennent ces « Métamorphoses » c'est un peu toute la mythologie et les belles histoires, comme celle de César, « en Mars et en toge » et surtout « rien n'est plus grand qu'être le père de l'autre ». Amusant de voir ainsi le grand César en grand-papa gâteau racontant les histoires du petit chaperon rouge au futur Brutus. Et ceci alors que la Rome ancienne n'est plus, on est passé au règne des successeurs d'Auguste, avec les guerres de palais et les coups tordus que cela implique. Ovide en sait quelque chose, lui qui encense César, mais est exilé peu après à Constanta en Scythia Minor, la Roumanie actuelle. C'est l'ancienne Tomes, justement, qui relie son nom à Jason et au découpage du frère de Médée, lancé par-dessus bord pour ralentir la poursuite par Aétès, le père, après le vol de la Toison d'Or.
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