Incontournable BD jeunesse Mars 2023
Cette jolie BD jeunesse italienne, intitulée "
Le voyage de Pistil" en version française, présente Pistil, une créature au visage lunaire et au corps similaire à celui d'un bouc qui vit dans une petite forêt, où il aime manger les pommes des arbres environnants. Seulement, un matin, il a les quatre pattes dans l'eau. La rivière est sortie de son lit et a charrié avec elle un petit poisson à la peau dorée, Croissant. Croissant sent au fond e lui qu'il doit gagner la mer, mais il est un peu perdu à travers ses arbres. Il propose à Pistil d'entreprendre un voyage avec lui pour rejoindre l'océan. Les deux animaux vont progressivement devenir amis, faire des rencontres, parfois sympathiques, d'autres dramatiques. À travers leur voyage, c'est également l'occasion de voir comment l'humain a un impact sur la nature.
Cette BD a une douceur autant dans son traitement que dans son graphisme. Sur ce premier point, le pari était grand, car même adoucie, la Nature est implacable. On verra un lézard se faire manger par une chouette, un renard manoeuvrer pour manger Croissant en employant la manipulation et un étendu d'arbres coupés dont il ne reste que les souches à perte de vue.
La Nature a ses lois, la chaine alimentaire qui implique que des animaux mangent d'autres animaux en est une. Pourtant, malgré ses détails, ça reste doux. On se laisse bercé comme sur l'eau, en suivant Pistil et son ami aquatique.
Bien sur, la douceur est grandement épaulée par le rendu visuel. Avec des tons pastels vaporeux, des lignes très fines pratiquement invisible et des cases sans pourtour, on a l'impression d'être dans une aquarelle. Les animaux, la géographie et les plantes ont été minimalités dans leur forme et ont des formes géométriques qui rappelle un peu des blocs de bois à assembler. Parfois, les formes sont homogènes, parfois on sent la présence des ombres. Les tons jaunes, magentas, oranges, verts et bleus se côtoient de manière à séparer les décors. Au début, c'est un nuancier mauve-magenta-rose qui est utlisé pour la forêt de Pistil. Les oranges-jaunes prennent ensuite le relais pour la montagne avec monsieur écureuil, puis les verts-jaunes présentent un décor juste après le barrage, ainsi de suite. J'aime bien cette idée, ça permet de mieux cerner la diversité des lieux, comme si nous changions de "tableaux". Aussi, cette explosion de couleurs aquarelles met la Nature en évidence.
La composante de la relation de l'homme avec la nature se perçoit à quelques reprises. La présence du barrage est déjà un premier élément. Elle gâche le paysage et a impliqué l'inondation des lieux, monsieur castor en parle aux deux amis. Puis, c'est le paysage de désolation des arbres abattus, qui rend la chouette fragile à l,exposition du soleil et raréfie les lieux possibles pour nicher. le renard occupe un moulin abandonné par les humains. Néanmoins, dans le dernier "tableau" Croissant et Pistil rencontre un garçon, qui va pêcher Croissant avec un seau. le garçon devine à la présence de Pistil qu'ils sont amis et le relâche. Un geste simple, dirions-nous, mais dont la portée est immense. Ce garçon est un allier de la nature et la respecte. La libraire jeunesse en moi ne peut s'empêcher d'y voir là l'espoir de la jeunesse elle-même, surtout celle de maintenant, plus sensibilisées que jamais aux enjeux des changement climatiques, du Vivre ensemble naturel et de la fragilité des écosystèmes. Et c'est pour cette même jeunesse que les adultes doivent consentir à plus d'efforts pour cerner ses enjeux.
Enfin, l'amitié des deux héros est infiniment touchante. Solidaires, complémentaires, affectueux, ils ont beau être d'espèces différentes, il se seront mutuellement épaulés et auront grandit durant ce voyage. Un message déjà vu certes, mais amené de manière originale et accessible.
Une belle trouvaille au rayon des Bd pour le lectorat intermédiaire.
Pour un lectorat à partir du second cycle primaire, 8-9 ans.
Catégorisation: BD jeunesse Fantasy, littérature jeunesse intermédiaire, second cycle primaire, 8-9 ans
Note: 7/10