La LCR et le blackbloc sont infiltrés depuis longtemps, les flics obtiendront facilement des informations au coeur du contre-sommet. Il n'y a bien que les militants gauchistes à croire que l'infiltration de leurs groupes est impossible. Ceux-là pensent qu'un ou deux indics seulement ont réussi. Il y a quelques années, Martinez a rencontré un ancien RG. Il a infiltré les autonomes parisiens au début des années quatre-vingt et lui a raconté qu'à l'époque ils étaient une quinzaine à travailler sous couverture comme lui. Bien sûr, il y a eu des cas foireux qui ont pu corroborer la certitude des totos d'être impossible à infiltrer : les mythomanes ou les délinquants expliquant qu'ils agissent aux ordres des flics pullulent dans les tribunaux.
L’expérience lui a appris qu’un rire partagé ou une accolade étaient des moments propices pour poignarder.
Cette ville est une poudrière au milieu de laquelle tout le monde joue avec le feu.
Un vieil empire chancelle-t-il sur ses fondations déjà ébréchées ?
Un nouveau monde est-il en train de naître ?
Samedi 16 juin 2001, Göteborg est en feu.
Un homme propulse un pavé sur la vitrine de l’agence NordBanken. Deux ou trois autres, cagoulés, vêtus de noir, l’imitent puis s’enfuient. Un jeune type, l’air sérieux, agite un drapeau rouge sur lequel les visages de Marx, Lénine et Mao sont dessinés. Une camionnette est la proie des flammes, des détonations claquent, la fumée, le gaz lacrymogène tourbillonnent dans les rues.
Vive la Révolution ! entend-on. À mort les bourgeois ! À mort le capitalisme !
Une jeune femme masquée d’un foulard noir échappe de peu au poitrail démesuré d’un hongre caparaçonné. Elle rit en lançant une pierre qui rebondit sur le casque du cavalier.
Le gouvernement a envoyé la police en armure et la gendarmerie montée. Des véhicules blindés foncent sur les avenues, écartant les émeutiers comme le patriarche ouvrit la mer. Mais cette mer d’hommes et de femmes vociférant, projetant des pavés et des bouteilles sur la soldatesque, se referme aussitôt sur leur passage.
Des chevaux fous de peur lancés au galop sur une foule brandissant des drapeaux rouges et noirs.
Des incendies, des commerces saccagés, des chaussées dépavées, une ville dans le chaos.
Un vent de colère et de refus qui souffle depuis loin, très loin, remontant sans doute le fleuve Göta älv pour se déverser dans les rues.
Faire gagner les fascistes revenait à bouffer de la soupe avec une fourchette.
Si Berlusconi est un bouffon, un Auguste au nez rouge, Le Pen est un clown blanc, autoritaire, mais triste.