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Critique de bobfutur


Voilà bien un livre à la hauteur de sa réputation, éclatant chef-d'oeuvre de la très jeune littérature post-soviétique, perpétuant la tenace tradition d'excellence littéraire d'un peuple coutumier des violences de l'Histoire…

Délirante mais solidement campée, l'histoire de ce livre alterne entre deux époques charnières du pays, chacune succédant à une révolution, marquant naissance et mort du soviétisme, le tout possiblement encapsulé dans la tête de notre héros dérangé, Poustota (signifiant « vide »), tour à tour opportuniste brigadier rouge au coté du légendaire Tchapaïev lors de la guerre civile, pour se retrouver enfermé dans un asile d'aliénés sous Eltsine, sans que soit jamais complètement décidé laquelle étant le rêve de l'autre.

D'une remarquable densité, convoquant avec une sautillante exhaustivité toute la panoplie de l'âme russe, trouble tord-boyau et oignons posés sur la table, grand écart d'apollinien à dionysiaque, d'une rationalité occidentale tentée par le cinéma américain, modèle d'oligarches oubliant leurs racines, d'autres plongeant jusqu'aux confins asiatique, chevauchant avec le Bachkire de petits alezans, le visage radieux fouetté par le vent des steppes… chacun philosophe, mais d'aucun capable de philosophie, mis à part ces quelques maitres anarchistes, que l'on hésite encore à ranger sous la lettre Φ, Bakounine ou Kropotkine rarement classés dans la même catégorie que Kant, Marx ou Nietzsche… à raison ?
En tout cas, de la philosophie, ce livre en fait, avec ce mythe de l'armée rouge, Tchapaïev, transformé en néo-platonicien, lui qui a fini noyé dans l'Oural, à la frontière géographique de l'Europe et de l'Asie…

Pas mal de poésie, aussi, ce qui permet au passage d'admirer le travail de traduction du tandem Galia Ackerman - Pierre Lorrain, qui en font juste ce qu'il faut pour expliquer certaines subtilités aux non-slavophiles, sans jamais freiner l'allure échevelée de l'embarcation.

Mis à part un petit creux aux trois quarts du livre, emporté loin vers une autre figure tutélaire nationale, le Diable, l'histoire ne connait aucun répit dans ce feu d'artifice, rejoignant une très sélective catégorie incluant « Underground » de Makanine ou ce « Train Zéro » de Bouïda, conjuguant à chaque fois des références familières pour en sculpter de l'inédit.
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