Impressions et lignes claires

Notre génération paie les turpitudes des générations précédentes. La transparence est attendue par les Français, elle est désormais exigée par la loi, et il est donc bien naturel de s'y conformer. Mais personne ne nous empêchera d'exprimer des doutes sur cette mise à nu sans limites. p.152

En nourrissant l'imaginaire et la culture, les livres et les films alimentent la machine cachée qui pousse ceux qui aspirent à gouverner, ils donnent des réfé- rences à une ambition, du relief à des convictions et des repères à un parcours. p.52

Petits mots

Face aux SMS triomphant, le mot manuscrit n'est pas mort. Pendant le conseil des ministres, où les portables sont prohibés, chacun dispose de petits cartons de correspondance et d'enveloppes. Les petits mots s'échangent. Il arrive même que certains soient sérieux. Aux questions au gouvernement, les portables sont autorisés et largement utilisés. Mais la culture des petits mots reste prégnante : Il fait signe à l'huissier en livrée, qui le délivre à son destinataire. L'occasion d'un échange direct avec les ministres, dont on n'a pas toujours le portable. L'occasion, aussi, devenue de plus en plus rare, d'admirer les jolies écritures, de décrypter les plus indéchiffrables, et, pour les plus talentueux d'en tirer de définitives conclusions sur la psychologie du personnage.
Ne pas négliger les petits mots. La politique, c'est souvent de grandes idées et de petits mots.

Ce que l'on dit est toujours moins important que ce qui est entendu

En politique comme dans la vie en général, tout ce qui est dit n’est pas forcément pensé.Et tout ce qui est pensé n’est pas forcément dit.Et ce qui est tu a souvent autant de sens que ce qui est verbalisé.

Peut être l'an 2020 sera-t-il considéré dans vingt ans , comme le paradis du débat public , le nirvana de la liberté d'expression , l'âge d'or de la politique avec un grand P.
Si c'est le cas nous pourrons nous inquiéter.

Vingt Ans aprèd

Notre Constitution est une merveille.

Gouverner est un art . Et l'art ça s'apprend.

Présider impose une solitude, une retenue et une maitrise de soi inimaginables. Présider suppose un enracinement profond dans le pays, dans son histoire et sa géographie, dans sa culture et son imaginaire, dans sa diversité et ses contradictions, dans ses aspirations et ses tabous. On peut bien sûr comprendre qu’il faille une sorte de présomption pour oser se présenter à de telles fonctions mais on aimerait déceler , chez tous ceux qui y aspirent, une forme de lucidité sur leurs propres imperfections, d’humilité à l’égard de l’ambition qu’ils nourrissent et de mesure dans les jugements qu’ils portent sur l’actuel titulaire de la charge.

Depuis trente ans, nous savons qu'il est urgent d'inverser notre addiction à la dépense publique et aux énergies fossiles. Le diagnostic est clairement établi, le remède identifié, la posologie déterminée. Malgré cela, le médecin refuse de l'administrer, écoutant avec attention, compréhension, voire soulagement, les objections et les cris d'angoisse du malade devant la rigueur du traitement nécessaire. Peut-être les médecins nous diront-ils un jour si ce comportement est conforme au serment d'Hippocrate.
Les alternatives sont assez limitées. Nous devons soit réduire nos dépenses (en argent public, en ressources naturelles), et c'est redoutablement difficile car l'addiction est très forte, soit augmenter nos recette, et c'est à la fois difficilement acceptable sur le plan fiscal (nous sommes l'un des pays les plus taxés du monde) et impossible sur le plan environnemental, puisque la planète n'est pas extensible.
Depuis trente ans, au fil de petites décisions et de grands renoncements, nous voici avec, au dessus de nos têtes, deux épées de Damoclès qui menacent à tout instant de s'abattre, dont nous savons qu'elles finiront par s'abattre, mais que nous préférons ignorer en renonçant à lever la tête.
Et donc, ces dettes se creusent.