De Bernard Plossu, on connaît ce goût prononcé de la marche, de la route, comme condition même de la production des images. Mais cette route, comme jadis de Walker Evans ou de Robert Frank, ne passe pas au centre, elle se fait chemin de traverse, elle se situe toujours à la périphérie pour révéler en creux la vanité du centre. Nulle condescendance dans cette attitude, nul désir forcené non plus de solitude ou de retrait. Il y a chez Plossu une évidente nécessité à saisir le tissu de réel par ses franges, à tirer quelques fils pour le révéler pleinement.
L'autoroute repeuple les sentiers de grande randonnée. Le pas humain a fait le terroir ; le cheval, la nation ; l'auto, le continent ; l'avion, la planète Terre ; le lanceur spatial, le cosmos. Il y a bien un façonnage locomoteur de l'espace vécu, car l'étendue comme le temps, est une catégorie technique et donc évolutive.